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Derrida, ses livres                     Derrida, ses livres
Sources (*) :              
Jacques Derrida - ""Politiques de l'amitié", suivi de "L'oreille de Heidegger"", Ed : Galilée, 1994,

"Politiques de l'amitié", suivi de "L'oreille de Heidegger" (Jacques Derrida, 1994) [PDLA]

   
   
   
                 
                       

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Table

POLITIQUES DE L'AMITIÉ (expansion de la première séance du séminaire de 1988-89 tenu à l'EHESS sur le même thème).

p11 : Avant-propos

p17 : 1. Oligarchies : nommer, énumérer, dénombrer

p43 : 2. Aimer d'amitié : peut-être - le nom et l'adverbe

p67 : 3. Cette "vérité" folle : le juste nom d'amitié

p93 : 4. L'ami revenant (au nom de la "démocratie")

p131 : 5. De l'hostilité absolue. La cause de la philosophie et le spectre du politique

p159 : 6. Serment, conjuration, fraternisation - ou la question "armée"

p195 : 7. Celui qui m'accompagne

p219 : 8. Replis

p253 : 9. "En langue d'homme, la fraternité..."

p301 : 10. "Pour la première fois dans l'histoire de l'humanité"

 

L'OREILLE DE HEIDEGGER (Philopolémologie, Geschlecht IV) (conférence prononcée en septembre 1989 à l'Université Loyola de Chicago). [Sur la série des quatre essais Geschlescht, v Geschlecht III].

p343 : 1. Portées de voix. Rhétorique de l'amitié

p367 : 2. L'avoir, l'être et l'autrre : tendre l'oreille, accorder ce qu'on n'a pas

p391 : 3. Quelques'uns (Le mariage du ciel et de l'enfer)

p403 : 4. Tautologie, monologie, otologie. Le sacrifice de Heidegger

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On trouvera une analyse du thème de ce séminaire à la page suivante : [Derrida, aimance, amour, amitié].

 

 

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Formulations à partir de ce texte (les têtes de chapitre sont entre crochets) :

 

[Ce temps-ci, le contemporain, n'est ni présent, ni en rapport avec un autre temps ou avec lui-même; il est aspiré par l'espace et le temps virtuels du "peut-être"]

[Il faut entendre, dans les oeuvres, la discordance originaire, inouïe]

Il ne faut pas tenir une politique de l'amitié pour une assurance ou un programme : l'aimance hyperbolique est hantée par la possibilité de l'indécidable, de l'échec

A travers deux ruptures historiques majeures, les grands discours canoniques sur l'amitié fondent et déstabilisent d'innombrables oppositions, peut-être toutes

Par l'aveu d'un futur antérieur, indéniable, le temps et le mouvement de l'amitié débordent le présent

Une logique téléiopoétique, quasi-messianique, hante tous les énoncés : il suffit qu'un événement soit possible pour que, peut-être, il soit déjà arrivé

L'"aimance" tient à cela qu'il vaut mieux aimer, même dans la dissymétrie entre l'aimé et l'être-aimé, et même en aimant un mort - Poison Ivy (film de Katt Shea, 1992)

Depuis un lieu invisible, Jacques Derrida s'engage dans une aimance qui en appelle à une loi d'hétérogénéité, à la dissymétrie d'une singularité absolue

Il n'est d'amitié ou d'aimance qu'à la condition de se retirer des déterminations, savoirs, jugements, valeurs, qui éloigneraient de la singularité solitaire

A condition de s'ouvrir en tremblant au battement de coeur du "peut-être", l'aimance peut se produire comme décision hétéronome, don de l'autre

Un ami parfaitement fiable, capable du secret absolu, serait aussi improbable, introuvable, qu'un cygne noir

Chacun écoute, près de lui, à travers l'oreille, la voix d'un autre singulier qui, en tant qu'ami, lui dicte un sens et le fait venir à l'appartenance

On peut traduire la phrase attribuée à Aristote : "O philoi, oudeis philos" par : "Celui qui a trop d'amis n'en a aucun" (en amitié, il faut préférer la rareté, le repli, le retrait)

La destinerrance d'une phrase, c'est qu'elle s'adresse chaque fois à un seul - mais il est impossible qu'elle ne s'adresse qu'à un seul, elle s'adresse à plus d'un

L'amitié n'est jamais une donnée présente; son discours d'attente, de promesse, d'engagement, de prière, porte en ce lieu où une responsabilité ouvre à l'avenir

Dans la "communauté" des amis, l'ami est tout autre : c'est un ami de la solitude - sans lien ni reconnaissance, ni réciprocité, ni égalité, ni proximité, ni ressemblance, ni parenté

L'amitié m'inspire une confiance plus grande en l'autre qu'en moi-même, une foi démesurée qui me met sous la loi de l'autre

Une logique du don rappelle l'amitié à la non-réciprocité, la dissymétrie, la disproportion, l'irréductible préséance de l'autre

En secret, intraduisiblement, par une amitié poétique, résonne chez Carl Schmitt l'écho de la loi du pire

Le motif de l'amitié fraternelle, souveraine, inconditionnelle, exceptionnelle et indivisible, se retrouve avec ses paradoxes dans toute la tradition gréco-chrétienne

L'ami-citoyen, raisonnable et vertueux, est partagé entre la loi de l'amitié, qui commande un secret inconditionnel, et la loi de la cité, qui unit dans la conjuration du secret politique

"O mes amis, il n'y a nul amy!" Selon l'accent (iota) mis ou pas sous la lettre omega, la phrase est assertive (jugement) ou vocative (interpellation)

Le "Je t'aime" de l'amour doit rester dissymétrique et unilatéral, tandis que, dans l'amitié, cette dissymétrie s'entoure d'un voile de réciprocité et d'entente

Aimer ou être aimé, ce sont deux structures dissymétriques, deux expériences irréductiblement différentes

La structure testamentaire de l'archi-amitié annonce la possibilité d'une autre justice, d'une autre politique

Ce qui arrive peut-être, avec Nietzsche et la transmutation d'aujourd'hui, c'est le peut-être même, l'expérience inouïe, toute nouvelle, du peut-être

Une amitié au-dessus des lois, au-delà du principe politique, ne répondrait plus devant aucune autre instance qu'elle-même, elle se placerait au-dessus de la justice

En impliquant d'avance le destinataire sur le mode du peut-être, certaines phrases "auto-téléiopoétiques", qui ne disent rien, font venir à terme ce qui survient

Pour en appeler à une politique de l'amitié, il faut s'adresser à l'autre comme tel - par la mise en oeuvre d'une force performative qui ne puisse compter sur aucune assurance

On ne peut rendre compte du silence absolu du politique sur la femme, la soeur ou la différence sexuelle qu'en se portant au-delà du politique

Avant tout autre contrat, une amitié d'avant les amitiés, ineffaçable, inavouable, incommensurable, fondamentale et sans fond, respire dans le partage de la langue

La possibilité de l'amitié se loge dans la logique d'un cogito humain et fini : "Je pense, donc je pense l'autre"

Un combat originaire avant lequel il n'y a rien, pas même les combattants, projette et développe ce qu'on n'entend pas encore, l'inouï

L'amitié, c'est (peut-être) la communauté de ceux qui n'ont pas de communauté

Il n'y a ni concept du politique, ni définition, ni distinction, sans l'irruption de l'autre : la possibilité réelle de l'hostilité, de l'ennemi, de la guerre

Il est impossible de mettre en oeuvre la pureté d'une limite conceptuelle; la disjonction du concept, son inadéquation à soi, appartiennent au concept même

L'indissociabilité du concept et de la prise de position politique inscrivent un principe de ruine au coeur de tout discours politique qui se veut scientifique

Je ne peux m'interroger sur l'époque contemporaine, "la nôtre", qu'en m'adressant à un destinataire pour lequel je suppose à l'avance, par fiction, qu'il appartient à ce "nous"

Une décision déterminée par un savoir ou une théorie, même précédée de toute la science ou la conscience possibles, se transformerait en application irresponsable d'un programme

Structurellement, toute décision signifie l'autre en moi, c'est un commencement absolu qui fait exception de moi; aucune théorie du sujet ne peut en rendre compte

"Je t'aime entends-tu?"; cette déclaration d'aimance hyperbolique ne pourrait donner sa chance à une politique de l'amitié que soumise à l'épreuve du peut-être, de l'indécidable

Il n'y a rien de naturel dans la parenté ou la fraternité; le lien de naissance est un fantasme, qui engage dans l'ordre du serment, de la croyance et de la foi

En déconstruisant le schème généalogique de la démocratie, on réaffirme la force inconditionnelle qui, ici et maintenant, prend en compte les singularités anonymes et irréductibles

Double loi de la démocratie : elle doit respecter la singularité irréductible de l'autre, et il lui faut des sujets identifiables, représentables et égaux entre eux

Avec la politique de l'amitié, il s'agit de penser, à la racine de la démocratie à venir, une altérité sans différence hiérarchique

L'exigence d'une démocratie à venir, c'est déjà la déconstruction à l'oeuvre

En interrogeant les discours canoniques de la philosophie, Jacques Derrida voudrait, en son propre nom, analyser les forces qui les ont érigés à la place majeure qu'ils occupent

Par ses apories, son axiomatique impossible, l'oeuvre derridienne réfléchit et formalise la mutation d'aujourd'hui, sa dislocation absolue, son désajointement sans bordure

Il y a deux types de différend : l'inimitié entre frères, avec réconciliation possible, et l'hostilité contre l'autre, l'ennemi, l'étranger, comme condition du politique comme tel

L'ennemi est déjà là, en moi, je peux l'identifier, le nommer, l'appeler, même s'il a déjà disparu

L'ennemi, c'est moi-même comme le frère qui me met en question, qui me blesse et m'offense d'une hostilité absolue

On ne peut faire ni ce qu'on dit, ni ce qu'on dit faire, ni ce qu'il faudrait faire

Le modèle canonique de l'amitié exclut doublement le féminin : il n'y aurait d'amitié possible ni entre hommes et femmes, ni entre femmes

Quand des valeurs incompatibles coexistent, la folie guette et, d'urgence, elle appelle la pensée; de cette provenance monstrueuse, elle fait naître une vérité

Avec la dissolution des concepts classiques d'ennemi, de politique, d'hostilité, s'ouvre une bouche béante, sans voix, qui hurle dans le fond sans fond du chaos d'aujourd'hui

Dans la fraternité ou la citoyenneté, un lien mystique, obscur, fonde en nécessité l'égalité de droits sur l'égalité de naissance - ce qui peut justifier la pire xénophobie

Unis par un lien testamentaire (fidélité à la mémoire des morts et aux spectres des pères), les frères ne peuvent penser une vérité qu'en oubliant le "peut-être"

La vérité monstrueuse du politique, c'est qu'il n'y a d'hostilité absolue que pour un frère

Dans l'horizon du phallogocentrisme politique, le frère occupe une place unique et singulière, celle de l'"ami des hommes", le lieu irremplaçable de toutes les substitutions (khôra)

Quand on résume l'humanité de l'homme ou l'altérité de l'autre au mot "frère", on veut ignorer d'où ça vient, la portée politique de ce langage obscur

L'oreille de Heidegger est celle qui entend et sacrifie la voix discordante, inouïe, celle de l'inimitié originaire que le Dasein aura portée chez lui, "avant" le rassemblement du logos

L'analytique heideggerienne du Dasein, qui résiste à l'inconscient, reste réglée par les normes d'un vouloir-dire intentionnel absolu

L'amitié ne peut loger dans l'intimité économique d'un chez soi : elle est hors lieu, sans lieu, hors de soi, unheimlich, atopique

Le plus intempestif aujourd'hui, l'inconditionnel, c'est ce qui permet de se soustraire à l'espace de l'autorité théologico-politique

Une justice qui romprait avec le principe d'équivalence ferait signe vers une équité dont le juste nom serait "amitié", au-delà de tout calcul et de toute appropriation amoureuse

Pour pouvoir m'adresser à l'autre - penseur, messie ou Dieu lui-même -, je dois lui prescrire de rester libre, de pouvoir ne pas répondre à mon appel

Pour qu'une décision soit responsable, il faut qu'elle soit libérée du savoir, qu'elle soit donnée au nom de l'autre - c'est ce qu'on appelle la liberté

L'expérience du lieu, c'est que la pulsion territoriale est toujours contredite, tourmentée, déplacée, déterritorialisée par les télétechnologies - aujourd'hui plus que jamais

Toute l'oeuvre de Heidegger se rassemble autour d'une force marquante, le combat (Kampf) qui unifie d'avance l'aimance (phileîn), le logos et le polemos

Avant toute responsabilité, toute contresignature, nous sommes pris dans une socialité originaire : la courbure hétéronomique et dissymétrique d'un rapport à l'autre

Une assurance qui détruirait d'avance la possibilité de s'adresser à l'autre comme tel, ce serait le mal radical; c'est ce sur quoi, avant tout, on ne désire ni ne doit pas vouloir compter

Quand on ne peut plus identifier la figure de l'ennemi comme telle, alors vient la violence inouïe, le mal radical sans mesure et sans fond

Sans la possibilité du mal radical, du parjure et du crime absolu, aucune responsabilité, aucune liberté, aucune décision

La possibilité du mal radical, comme telle, s'il y en a, ne doit être ni vivante ni morte

Vers la fin du 19ème siècle, dans un monde qui ne tient plus ensemble, une mutation livre à la folie, au chaos, les concepts organisateurs de la communauté politique

En déclarant le vrai nom, le juste nom, d'"amitié" ou de "démocratie", on affirme sa fidélité et son respect pour ce nom, même s'il n'en revient que des spectres

Le nom propre agit mystérieusement, sa force défie le discours

Dès que je parle en mon propre nom, l'autre apparaît comme tel, comme "tout autre" qui m'excède, me surprend, m'assigne liberté et responsabilité, sans me les laisser

Le nom, qui est la structure même de la survivance testamentaire, est arraisonné par une histoire, un héritage, une renommée

Dans l'histoire du concept et de la pratique du partisan, l'instance proprement productrice de l'hostilité pure et donc du politique pur est la philosophie

Maternité et paternité sont des fictions légales : nous y croyons car nous en témoignons nous-mêmes

L'amitié est contradictoire en son essence même - car on doit vouloir le plus grand bien de l'ami, mais on ne peut pas le vouloir, car il deviendrait aussi autonome qu'un Dieu

Les discours sur l'amitié appartiennent à l'expérience de la perte, du deuil impossible - car réussir le deuil du frère ou de l'ami, cela pourrait faire revenir un père

La modalité du "peut-être" est quasi-transcendantale : il suffit de construire le concept politique de l'ennemi pour que, virtuellement, la communauté soit instituée

Aucune réponse, aucune responsabilité, n'abolira jamais le "peut-être" qui ouvre à jamais le questionnement

A l'origine de la philosophie est la tension nostalgique qui, après le deuil d'une aimance originelle en accord avec le logos, désire le retour du sage perdu

On peut faire l'hypothèse d'une autre aimance ou d'une autre politique, au-delà du politique, qui lierait l'affirmation de la vie à la suspension de la possibilité de tuer

Selon Aristote, la loi tendancielle du politique, son telos, son oeuvre, c'est de créer le plus d'amitié possible

Tout ce qui détruit les limites classiques du politique favorise le déchaînement de l'hostilité pure : dépolitisation, surpolitisation, hyperbolisation du politique

Il suffit que soit présupposée une décision relative à la question "Qui est l'ennemi?" pour que le politique envahisse et surdétermine toutes les strates de la communauté

Toute promesse d'amitié laisse entendre un projet de communauté politique, qui appelle plus d'un destinataire à se lier

La pensée derridienne du politique est hantée, avant toute question et toute affirmation, par le rêve d'une amitié sans foyer, sans présence, sans ressemblance, sans affinité

Une hyperaporétique de l'amitié est la condition archi-préliminaire d'une autre expérience, une autre pensée du politique, qui promet "peut-être" autre chose

L'amitié projette au-delà de la vie, elle conditionne la survie de l'autre, par-delà la mort

La raison a partie liée avec l'inimité : sans ennemi, on ne peut dire ni "je", ni "je suis", ni "je pense", on perd l'être, le logos, l'objet, la loi et la chose même

L'amitié suppose la rareté : par élection, affinité, proximité, familiarité ou choix, elle prend acte d'une préférence pour un petit nombre de singularités incalculables

"Répondre à l'autre", c'est l'acquiescement le plus originel, le plus fondamental, et aussi le plus inconditionnel

La responsabilité est temporelle, de l'ordre de l'écoute, tandis que le respect est visuel, de l'ordre de la distance, du secret, d'un espacement dont la rupture entraînerait le mal radical

Avec la formulation "Ennemis, il n'y a point d'ennemi!" (Nietzsche) qui répond à "O mes amis, il n'y a nul amy" (Montaigne), c'est une révolution du politique qui a lieu

La Révolution française a sécularisé et mis en oeuvre la promesse d'égalité et de réciprocité qui, dans l'amitié chrétienne, lie entre eux les frères

Axiome schmittien : la politique surgit avec la figure de l'ennemi; si cette marque différentielle s'efface, alors c'est la différence même qui s'efface

Il vaut mieux qu'entre amis l'alliance soit silencieuse; ensemble mais séparés, conjoints et dissociés, ils se taisent pour garder leur amitié

Ami ou ennemi, c'est le même respect pour le nom, la même fidélité à la singularité irremplaçable

Dans le rapport à la singularité de l'autre, il y a toujours de la responsabilité, du respect, du secret, et aussi le surgissement d'un tiers qui, en plus, porte l'universalité de la loi

Une amitié inconditionnelle, indivisible, serait gouvernée par un échange sans mesure ni réciprocité, un don sans don

La tâche qui reste à venir, au-delà du droit, c'est de mettre en oeuvre la démocratie en déracinant les figures qui prescrivent une fraternité androcentrée

Jacques-Elie Derrida est celui qui annonce la téléiopoèse, cette structure messianique

La phrase téléiopoétique ou messianique porte en elle une dénégation structurelle : en appelant le dangereux "peut-être", elle refoule la peur ou la haine qu'elle suscite

La phrase messianique ou téléiopoétique est travaillée par un drame : dans le temps où elle fait venir (présence), elle éloigne la venue (absence)

Le temps se retire doublement de l'amitié : il faut qu'elle soit à chaque instant réitérée à neuf; et il faut qu'elle survive, qu'elle résiste à l'épreuve du temps

Trahir l'humanité, ce serait le parjure suprême, le crime des crimes, la faute contre le serment originaire, la tentation du fratricide comme possibilité du mal radical

Au coeur de la parole, le silence est l'un des modes essentiels de l'"ouvrance" à la vérité - une vérité "unheimlich" qui désidentifie tout concept, défie toute opposition

A même le concept de la décision, de l'événement et de la responsabilité, s'inscrit leur loi structurelle : l'urgence absolue

La vérité de la vérité, c'est cette folie, ce fond sans fond qu'il vaut mieux ne pas savoir ni avouer - pour rester, "peut-être", sans l'avoir ni l'être, l'ami de la vérité

L'événement qui mériterait, une seule et unique fois, à telle date, le juste nom d'amitié, supposerait l'expérience d'une alliance improbable, la pensée d'un concept du "peut-être"

La proposition aristotélicienne selon laquelle il ne peut pas y avoir d'amitié entre Dieu et l'homme organise toute réflexion sur la possibilité d'une politique de l'amitié

L'amitié n'est pas réductible à ses conditions de possibilité : elle a lieu, c'est un événement

Séparés l'un de l'autre, irrémédiablement solitaires, les amis se taisent ensemble, dans le rire éclatant de leurs deux jouissances partagées, disjointes, hétérogènes

"Politiques de l'amitié", suivi de "L'oreille de Heidegger" (Jacques Derrida, 1994) [PDLA]

 


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1994_PDLAAA

YYA.1994.Derrida.Jacques

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