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de Jacques Derrida

Un seul mot - ou un syntagme.

         
   
Derrida, ses livres                     Derrida, ses livres
Sources (*) :              
Jacques Derrida - "Donner La Mort", Ed : Galilée, 1999, p21

Donner la Mort (Jacques Derrida, 1999) [DLM]

   
   
   
                 
                       

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Table

Jacques Derrida précise, en 1999, que, malgré les apparences, ce livre n'est pas le second tome de Donner le temps, paru l'année précédente. Il contient deux textes :

 

Donner la mort (nouvelle version d'une conférence prononcée au Colloque de Royaumont de décembre 1990, dont une première version avait déjà été publiée en 1992 dans le recueil intitulé "l'éthique du don" (Ed Métailié, pages 11 à 108)) (97 pages).

p15 : Les secrets de la responsabilité européenne

p56 : Au-delà : donner à prendre, apprendre à donner - la mort

p79 : A qui donner (savoir ne pas savoir)

p114 : Tout autre est tout autre

 

La littérature au secret - Une filiation impossible (reprise de la quatrième séance du séminaire Le parjure et le pardon (14 janvier 1998))

p163 : L'épreuve du secret : pour l'Un comme pour l'Autre

p173 : Le Père, le Fils et la Littérature

p190 : Plus qu'Un

 

 

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Formulations à partir de ce texte (les têtes de chapitre sont entre crochets) :

 

[Nous sommes tous assignés à l'héritage irrévocable d'Abraham : hospitalité, responsabilité, subjectivité, pardon, secret, silence, mutisme]

La responsabilité, dont la mise en oeuvre est toujours insuffisante par rapport à ce qu'elle doit être, est vouée au secret, à l'hérésie, à la rupture inventive avec la tradition

Il n'est d'alliance que singulière et dissymétrique; il faut qu'elle reste secrète, on ne peut rien en partager, on ne peut partager que le rien

Le dernier mot du don responsable, c'est qu'il doit se retirer, se cacher, se donner la mort; il est secret, le secret même, car s'il se reconnaissait comme tel il s'annulerait aussitôt

La responsabilité étant toujours unique, exceptionnelle, extraordinaire, on ne peut pas en former un concept universel

Pour ouvrir la dimension de la foi ou de la responsabilité, il faut l'invisible absolu, secret au-delà du secret : ça me regarde, par la voix d'un autre, même là où je ne vois rien

Chaque autre est tout autre, absolument autre

Quand la responsabilité s'annonce, c'est dans une langue étrangère à celle que la communauté peut déjà entendre

Dans l'économie chrétienne du sacrifice, cette étrange économie du secret, un calcul infini prend la relève d'un calcul fini

Pour Platon, le moment de la mort est celui de la philosophie même : quand l'âme, ne se rapportant plus qu'à elle-même, se sépare du corps

Quand l'âme se sépare du corps, elle se donne la mort - un don qui, selon Platon, n'entre dans aucun échange, aucun commerce de la vie

Avec le christianisme émerge une nouvelle responsabilité : la bonté même, un don venu de l'autre comme la loi, qui commande au donataire sa propre mort

On peut dire "religieuse" une logique qui, sans dogme institué ni l'événement d'une révélation, pense la possibilité d'un tel événement

Aporie de la responsabilité : il faut qu'une décision se règle sur un savoir (condition de possibilité); mais dans ce cas, elle n'est plus responsable (condition d'impossibilité)

Dès que j'entre en rapport avec l'autre absolu, unique, ma singularité entre en rapport avec la sienne sur le mode de l'obligation inconditionnelle, du devoir

Pour qui assume la responsabilité personnelle, ni le sacrifice d'Isaac, ni la parole de Luc exigeant des disciples la haine de leurs proches, ne peuvent être effacés

Avec la responsabilité, le moi accède à la possibilité d'un "garder-secret" qui abrite en soi un noyau d'irresponsabilité ou d'inconscience absolue

Par la crainte et le tremblement, on dit adieu ou à-Dieu à l'Autre, au tout autre absent, silencieux, séparé, secret, qui, dans la solitude absolue, ordonne d'obéir

L'autre est celui qui garde le silence, celui qui, comme un tout autre ou un Dieu, ne partage pas avec nous son secret

Le démonique appartient à un espace de non-responsabilité où religion et subjectivité, comme injonction de répondre de soi, de l'autre et devant l'autre, n'ont pas encore résonné

La scène secrète où Kafka se pardonne lui-même en écrivant à son père se fait archive, testament, littérature, oeuvre, quand elle devient publique

A l'origine du fonds sans lequel la littérature comme telle n'aurait jamais pu surgir est l'alliance entre Dieu et Abraham : silence, épreuve d'un secret terrible, absolu

"Me voici", moment originaire de la responsabilité, répond à une demande, une imploration qui exige l'amour inconditionnel de l'unique

Ma mort est irréductiblement la mienne : le mourir jamais ne s'échange, ne se porte, ne s'emprunte, ne se transfère, ne se promet ou ne se transmet

Aporie du pardon : on ne peut le demander ou l'accorder sans parler à la place de l'autre, par sa voix, en lui faisant porter le poids de la faute (identification spéculaire)

Dès qu'on dit ou qu'on entend "pardon", le nom de Dieu est déjà murmuré; toujours le pardon est une affaire entre Dieu et Dieu

Le pardon est impossible. On ne peut le demander ni à soi, ni à l'autre (Qui); jamais on ne peut annuler le méfait (Quoi), mais seulement le remplacer

"Pardon de ne pas vouloir dire...", cette phrase qu'on ne peut pas arrêter, c'est l'épreuve d'Abraham et aussi celle de la littérature

Le secret du secret du pardon, c'est qu'il est voué à devenir pardon à soi, privé de sens par cette réflexivité narcissique même

Il faut, pour mettre en oeuvre "responsabilité", "liberté", "décision", savoir ce que ces mots veulent dire, et aussi penser ce qui, en eux, est hétérogène, impensable

En tant qu'économie du sacrifice, la responsabilité chrétienne renvoie à une dissymétrie entre les regards : "Ton père qui te voit dans le secret, te le rendra"

Si "tout autre est tout autre", la responsabilité est privée de fondement, on ne peut plus distinguer entre éthique, politique, droit et religion

La responsabilité commence avec la renonciation à tout échange, tout sens et toute propriété - sans espoir de réponse, de communication, ni de promesse

Il n'y aura un avenir pour l'Europe, et un avenir en général, que si la promesse du "mysterium tremendum" chrétien, cette responsabilité hérétique, est déployée radicalement

Responsabilité et foi vont ensemble : toutes deux doivent répondre d'un rapport à l'autre, dans le risque absolu, au-delà de toute norme et de tout savoir

Le secret de la responsabilité, c'est qu'elle donne la mort à des mystères plus anciens qu'elle refoule, incorpore, subordonne; elle les veille, elle en porte le deuil

Le secret du secret, c'est le respect de l'absolue singularité, la séparation infinie de ce qui me lie à l'unique

La formule "Tout autre est tout autre", c'est (dans le contexte derridien), le secret de tous les secrets

La thématique chrétienne du don - amour infini, bonté, oubli de soi, péché, salut, repentir, sacrifice et don de la mort - se retrouve, en Europe, dans le concept de responsabilité

Le coeur, lieu du "par coeur" au-delà du sens, du savoir et du calcul, est aussi l'emplacement qui donne à penser l'économie

Dieu est le nom de la possibilité pour moi de garder un secret; il témoigne de cette invisible intimité à moi, autre que moi, qu'on appelle la subjectivité

La possibilité de la littérature tient à ce moment chrétien, abrahamique, où l'on croit pouvoir excéder l'économie du sacrifice

Le moment abrahamique, déjà littéraire, est celui de l'oeuvre

Qui prie ou demande pardon s'adresse à un Qui - un autre, un Dieu -, mais celui-ci s'efface et se rétracte en un Quoi indicible, imprononçable, comme le nom de Dieu

Ce qui reste irremplaçable dans le mourir, l'insubstituabilité du soi-même, originaire et indérivable, c'est le lieu où s'entend l'appel de la responsabilité

"Plus de secret, plus de secret" : dès lors qu'il n'y a plus de secret pour Dieu, s'instaure pour le sujet un lieu de retrait où plus de secret encore, en supplément, peut se loger

L'événement chrétien du "devenir-responsable" est lié au don sacrificiel où l'homme, dans sa singularité même, devient personne - vue par le regard d'un autre, d'un Dieu

Personne ne peut mourir à ma place : la mort est le lieu où mon irremplaçabilité m'est donnée, où je fais l'expérience d'une singularité absolue

Si "Tout autre est tout autre", chaque fois que je suis confronté à l'autre, de singularité absolue à singularité absolue, je sacrifie tous les autres

En me prenant sous son regard et dans sa main, dans une relation terriblement dissymétrique, Dieu me donne la mort et m'éveille à la responsabilité

Dès qu'on parle, dès qu'on entre dans le milieu du langage, on perd la singularité et avec elle la liberté, la responsabilité et la possibilité de décider

L'épreuve d'Abraham porte sur sa capacité à garder un secret au moment des pires sacrifices : donner la mort à son fils, renoncer à la promesse d'avenir qui lui a été faite

Axiome absolu : il faut qu'Abraham soit exposé en secret, en silence, à l'expérience du mal radical, du crime impardonnable, pour que soit nouée avec Dieu une alliance singulière

Tous les jours, pour chaque décision de chaque homme ou femme engageant l'éthique et la responsabilité, le sacrifice d'Isaac continue, mettant en jeu le paradoxe d'Abraham

En acceptant le sacrifice d'Isaac, Abraham sacrifie aussi la loi de la maison : au-delà de l'économie et du calcul, il renonce à toute rétribution, récompense, échange et espoir

Il y a dans le sacrifice d'Isaac un appel à un devoir absolu, infini, inouï : la moralité même, inconditionnelle, là où elle met en jeu le don de la mort donnée

Avec l'épreuve d'Abraham, il y va de l'engagement à rester fidèle à une alliance inconditionnellement singulière, sans autre objet, ni contenu, ni sens, que cette alliance

Alliance de Noé : comme s'il regrettait la malédiction du déluge, Dieu se demande pardon à lui-même et bénit tout vivant; mais le signe de cette alliance est furtif, météorique

En graciant Noé, Dieu pardonne pour le mal qu'il a fait advenir dans le désir de l'homme; par ce retrait, cette alliance, il lui laisse la souveraineté terrible au nom de laquelle il l'a créé

Avant tout acte de foi, on devrait pouvoir entendre l'axiome absolu que les textes de la Torah veulent dire : à ce qui est nommé Dieu (Yhvh), il appartient de pouvoir se rétracter

Donner la Mort (Jacques Derrida, 1999) [DLM]

 


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Sources
DerridaBiblio

1999_DLMAAA

YYA.1999.Derrida.Jacques

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