Derrida
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de Jacques Derrida

Un seul mot - ou un syntagme.

         
   
Derrida, le pardon                     Derrida, le pardon
Sources (*) : Derrida, l'aporie               Derrida, l'aporie
Jacques Derrida - "Donner La Mort", Ed : Galilée, 1999, pp182-183

 

Autoportrait (Elfriede Lohse-Wachtler) -

Aporie du pardon : on ne peut le demander ou l'accorder sans parler à la place de l'autre, par sa voix, en lui faisant porter le poids de la faute (identification spéculaire)

   
   
   
               
                       

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Jacques Derrida cite la fin de la Lettre au père que Franz Kafka n'a jamais envoyée à son père Hermann (1919) : "Parvenu à ce point, tu aurais donc, grâce à ta duplicité, obtenu un assez beau résultat, puisque tu as démontré trois choses : premièrement que tu es innocent, deuxièmement que je suis coupable, et troisièmement que, par pure générosité, tu es prêt non seulement à me pardonner, mais encore - ce qui est à la fois plus et moins - à prouver et à croire toi-même, à l'encontre de la vérité d'ailleurs, que je suis également innocent". Hermann n'a jamais connu l'existence de cette lettre, et par conséquent n'y a jamais répondu. On peut dire qu'il a, fût-ce involontairement, gardé le secret sur sa relation à son fils [un silence que Derrida compare à celui d'Abraham qui, lui non plus, ne dit rien à son fils lors du sacrifice d'Isaac]. Cette lettre est une fiction où le fils parle à la place du père, il le ventriloque. Le père lui reproche d'être un parasite, d'être incapable de choisir une épouse, de fuir les droits et devoirs d'un véritable mariage? Franz répond que cette normalité éthique, respectable, le rendrait fou. Après avoir, sur des dizaines de pages, expliqué comment son père avait exploité sa culpabilité, il décide de se substituer à lui pour prendre la décision du pardon. Mais bien que ce père ait reconnu (fictivement) son innocence, la faute ne disparaît pas. Franz pardonne et innocente son père dans le même mouvement, son père le pardonne et l'innocente, mais ce n'est que pour se décharger sur lui de cette faute et de cette responsabilité. Aussi généreux soit-il, le père continue à lui faire des reproches. Le poids de la faute n'arrête pas de circuler, il est renvoyé spéculairement de l'un à l'autre. On ne sait plus qui appelle, qui écrit et qui signe. Au nom du père, le fils se parle, à lui, dans son for intérieur. Il ne peut ni lui pardonner ses fautes, ni lui pardonner de l'avoir pardonné et innocenté.

En définitive, ce fils qui se parle à lui-même, dans une souveraineté apparente, doit reconnaître que la souveraineté revient au père.

 

 

Derrida insiste sur la circularité qu'implique le pardon. Si je demande le pardon, je laisse à l'autre le poids de l'accorder ou pas, c'est-à-dire le poids de la faute. Donc je dois lui demander pardon pour l'avoir ainsi chargé; s'il acquiesce, il me rend ce poids. La spécularité de cette circulation inarrêtable est sans fond. Dans le cas de Kafka, c'est "la loi du père parlant par la bouche du fils parlant par la bouche du père". Pour pardonner, il faut s'identifier au coupable, donc avouer la faute. Mais en demandant pardon pour cette identification, la faute se transmet encore, et en définitive, on n'arrive jamais à "pardonner à l'autre comme tel un mal comme tel" [on ne peut ni faire porter à l'autre le poids du pardon, ni annuler le méfait, on peut seulement le remplacer]. En pardonnant, on ne peut pas innocenter. On aboutit même au résultat inverse : faire du "mal qu'on absout un mal inoubliable et impardonnable" [je te pardonne, mais je n'ai pas le pouvoir de supprimer le mal que tu as fait, donc tu le gardes quand même pour toi : "le pardon accordé est aussi fautif que le pardon demandé, il avoue la faute"]. Quoiqu'on fasse, la faute reste, il faut quelqu'un pour la porter. La circularité bute sur un impossible, une impasse en abyme qui appelle elle-même le pardon "Pardonne-moi de te pardonner", comme l'écrit Derrida.

Au-delà du parasitisme dénoncé par son père, au-delà de son incapacité à se marier, c'est la priorité que Kafka accorde à l'écriture, à la littérature, à son œuvre, qui est pour son père, et aussi pour lui-même, impossible à pardonner.

 


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