Derrida
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Index des termes

de l'oeuvre

de Jacques Derrida

Un seul mot - ou un syntagme.

         
   
Derrida, Freud, la psychanalyse                     Derrida, Freud, la psychanalyse
Sources (*) : La pensée derridienne : ce qui s'en restitue               La pensée derridienne : ce qui s'en restitue
Pierre Delain - "Les mots de Jacques Derrida", Ed : Guilgal, 2004-2017, Page créée le 21 septembre 2005 Sigmund Freud

[Derrida, Freud, la psychanalyse]

Sigmund Freud Autres renvois :
   

A partir de Sigmund Freud

   

Psychanalyse et anasémie

   
                 
                       

1. Le poids de Freud dans l'élaboration des concepts derridiens.

Ce qui importe pour Jacques Derrida dans la découverte freudienne, ce ne sont pas des concepts comme inconscient, représentation verbale, réalité, remémoration, perception, refoulement, sujet, ou beaucoup d'autres. Ces concepts sont issus de la métaphysique et restent englués dans une conception classique de la vérité-dévoilement. Derrida prend ses distances avec eux, il ne les reprend pas à son compte, il les déconstruit. Ce qui compte pour lui, c'est le séisme freudien, la possibilité inouïe ouverte ou inaugurée par Freud (et par nul autre) de fonder une "science" (un autre type de science) non pas sur la vérité du concept, mais sur l'archive. Cette autre science, qui suppose une dislocation du logocentrisme, il l'appelle, il tente même de l'établir sous le nom de grammatologie.

Dans son analyse des textes freudiens, Jacques Derrida cherche d'abord à déployer les concepts ou quasi-concepts qu'il a lui-même nommés ou inventés : différance, archi-écriture, espacement, supplément originaire. A chaque texte qu'il consacre à ces analyses, il trouve chez Freud un frayage, une problématique à partir de laquelle il peut développer son travail théorique sous un nouvel angle. Cela fait-il de lui un penseur freudien? Il proclamait que non, mais rien ne nous empêche de l'analyser, à notre tour, comme tel.

L'articulation déployée par Freud entre un principe de plaisir (PP) supposé dominer la vie psychique, un principe de réalité (subordonné au PP) et une pulsion de mort hypothétique est, selon Derrida, une graphique de la différance. Certes Freud n'interroge pas cette graphique en tant que telle, il l'approche par le biais d'une spéculation ni scientifique (au sens classique), ni philosophique, une problématique qui s'intéresse d'abord aux détours, à des processus qui ne sont pas présents, effectifs. Cette structure difficilement descriptible, qui fait opérer ensemble ces trois principes, que Freud aborde sous l'angle économique, topique, dynamique, est différantielle. Ce n'est pas une loi absolue mais un principe, une tendance, un mouvement inépuisable qui produit le plaisir ou le déplaisir comme hétérogénéité, supplémentarité. D'avance, dans ce mouvement s'inscrit la possibilité du tout autre - même si cette possibilité, comme pulsion de mort, est ininscriptible.

Par sa description de l'appareil psychique comme machine irréductible à l'écriture phonétique et à la parole, par la métaphore qu'il développe du fonctionnement de cet appareil comme texte (le bloc magique), par la production de la trace dans un mouvement de frayage où elle ne se produit que par différence, par son concept de retard originaire (Verspätung), etc., Freud aurait frayé la voie (ou l'une des voies) explorée par la déconstruction.

 

2. Une relation complexe, au moins double.

On peut trouver chez Derrida de nombreux vocables (ou concepts) qui dérivent de concepts freudiens, et aussi de nombreux concepts (parfois les mêmes) qui divergent.

D'un côté :

- l'inquiétante étrangeté (unheimlichkeit) se mue en dissémination.

- la loi de l'hymen est une relecture de la castration,

- les thèmes de l'écriture, du graphe, voire de la responsabilité radicalisent la pensée freudienne de la trace.

- la différance est l'union d'Eros et de Thanatos.

- la stricture derridienne est dérivée du binden freudien (lier) : serrer, bander, maîtriser poser, suppléer.

- le Trieb freudien rapproché du Walten heideggerien.

De l'autre :

- pour Freud, la morale nait du remord (après le meurtre du père), tandis que pour Derrida, il faut que la loi ait déjà été là (par un coup de force), pour qu'il puisse y avoir remords.

- chez Derrida, cette loi qui inaugure l'interdit ne peut pas être racontée, ce n'est pas un événement de type "historique", tandis que Freud ne cesse de vouloir en faire le récit (fictif ou mythologique).

- Freud assume la primauté d'une marque sexuelle masculine (la libido), tandis que, pour Derrida, c'est d'abord la différence féminine qui travaille.

Les vocables de Derrida sont-ils encore freudiens? Peut-être pas [en tous cas, Derrida lui-même le niait]. Il n'empêche que seule la psychanalyse a pu produire une théorie de l'objet qui ait un sens archontique. Pour travailler les traces spectrales, il faut mobiliser la psychanalyse.

 

3. Plus d'une psychanalyse.

On ne prend jamais trop au sérieux la psychanalyse. Si on le faisait, un tremblement de terre inimaginable emporterait la conscience, l'ordre symbolique, la famille, l'autorité et même la culture. Sa marque est impossible à effacer. Même pour ceux qui la repoussent, la signature freudienne laisse une impression inoubliable. Mais l'héritage de Freud n'est pas linéaire. Il est multiple, hétérogène, conflictuel. Il n'y pas "la" psychanalyse, qui serait "la" logique de l'inconscient, mais des discours de la psychanalyse. Parmi ces discours, ont été d'une importance particulière pour Jacques Derrida :

- Abraham et Torok. Dans les années 1960 et au début des années 1970, quand il met en place ses principaux concepts en interaction avec l'oeuvre de Freud, son interlocuteur privilégié est Nicolas Abraham. Avec sa compagne Maria Torok, celui-ci invente une pratique et une théorie analytiques où la langue courante est traduite en une autre langue, anasémique. On peut trouver le modèle de cet autre concept de traduction dans le Verbier de l'Homme aux loups, cette oeuvre de langue et de vie produite par plusieurs générations de psychanalystes et d'écrivains. A partir d'une figure étrange, l'"écorce-et-le-noyau", s'engage une conversion, une mutation radicale, qui déborde la phénoménologie pour s'engager dans un récit mythique, poétique. Il en résulte un ébranlement théorique et des concepts nouveaux : crypte, fantôme, secret, deuil. Le refoulé inconscient est réélaboré à partir d'une théorie du nom.

- et aussi Lacan. Le rapport entre Derrida et Lacan est ambivalent. D'un côté, Derrida se dissocie fermement de la construction lacanienne : à l'indivisibilité de la lettre, il oppose le concept de gramme; à l'ordre symbolique, il oppose la dissémination; à l'interprétation ternaire de la castration, il oppose le quatre. La distinction lacanienne de l'imaginaire et du symbolique (avec son argumentaire autour de l'incapacité de l'animal à feindre ou à effacer ses traces), qui suppose entre l'humain et l'animal une frontière stable, indivisible, renvoie à l'animal-machine de Descartes. Mais d'un autre côté, tout en limitant pour l'essentiel sa lecture à des textes antérieurs à 1960, Derrida reconnaît le "double rôle" du discours de Lacan, avec son potentiel critique et déconstructif.

 

4. Apories freudiennes.

Freud a buté sur des contradictions insurmontables, qui affectent tous ses concepts. Comment ressusciter une trace originelle et unique, une mémoire vive, si la trace, dès l'instant de son impression, est irréductiblement toute autre? Comment concilier la croyance en une archive vivante et la pulsion de mort, qui est porteuse d'une toute autre pensée de l'archive? Comment déconstruire en son fondement le principe archontique tout en s'efforçant de le préserver [en prenant appui sur les structures oedipiennes]? Comment affirmer l'unité de la libido, son caractère masculin (phallocentrisme) tout en restant à l'écoute de la sexualité féminine, ce continent noir?

Pour que ces thèses incompatibles entre elles puissent cohabiter dans le même champ (la psychanalyse), il faut admettre l'impossibilité pour Freud de s'arrêter à une conclusion unique, posée comme théorique ou scientifique (exemple : il a tenté, de lui-même, de penser un Au-delà du principe de plaisir). Sa spéculation ne correspond à aucun genre, aucun concept concevable, aucun modèle préétabli, et souvent ses concepts (par exemple refoulement, pulsion, symptôme, fantasme), entre conscient et inconscient, sont à peine pensables. Sa pensée suspend les critères usuels de la signification. Ce n'est pas une thèse, c'est une "athèse", une spéculation performative où le même principe peut être à la fois confirmé et infirmé. Les hypothèses qu'il lance déstabilisent, elles déconstruisent ses élaborations antérieures. Puis il se retire, laissant les frontières ouvertes et les apories irrésolues. Le lecteur en tirera, éventuellement, ses conclusions.

Pour progresser, il a dû renoncer à sa croyance initiale en une écriture primaire, originelle et faire porter le poids de l'interprétation sur un reste idiomatique, irréductible et intraduisible. Ce reste, inaudible et peut-être ininscriptible, c'est aussi le secret de Freud, son inconscient. Lui aussi est hétérogène : des voix multiples y insistent.

 

5. Le testament de Freud et son héritage.

Freud a toujours souhaité que la discipline qu'il a fondée et nommée, la psychanalyse, soit reconnue comme science; mais parallèlement, il a fait en sorte que cette discipline soit irréductiblement liée à son nom. Aujourd'hui, c'est ce deuxième aspect qui l'emporte. La psychanalyse est l'oeuvre de Sigmund Freud; on ne la transmet pas comme science, on en hérite comme appartenance à la communauté supposée des continuateurs de Freud. Dans la scène d'écriture freudienne, ce ne sont pas les références scientifiques qui comptent, mais la signature, l'inscription de Freud dans le texte, en tant que sujet, et aussi dans son lieu le plus originaire, le plus insaisissable. Son oeuvre est indissociable de son autobiographie. Mais si sa décision, son jugement, son bon plaisir, avaient le dernier mot, la structure testamentaire de la trace serait effacée.

Il n'en est rien. Avec le jeu du fort:da, Freud associe la spéculation pure à une stratégie de pérennité de l'institution. En se posant comme l'héritier de son petit-fils, il lègue cette histoire à ses successeurs. Il fallait que sa famille contribue au pas supplémentaire dans la construction théorique. Cette mise en abyme de la compulsion de répétition était aussi une auto-institution.

 

6. Au-delà de Freud.

Freud recherchait les principes fondateurs : principe de plaisir, principe de réalité, pulsion de mort. Il les inscrivait dans une histoire dont il espérait découvrir l'origine, la trace indélébile. Pour Derrida, cette trace est marquée par un effacement irrémédiable. L'espoir freudien de renouer avec le vécu d'un "trauma primitif" est un fantasme. Cette disparition n'est pas un accident. La trace est hors du temps, sans mémoire possible, marquée elle-même par la pulsion de mort.

Cette pulsion de mort, Derrida rendait hommage à Freud pour l'avoir découverte et surtout pour avoir eu le courage d'évoquer, sans alibi, c'est-à-dire sans chercher aucune justification d'aucune sorte, ni théologique ni spiritualiste, la cruauté psychique. Cette franchise était, à elle seule, un pas en-dehors de la métaphysique. Elle aurait pu conduire Freud à sortir de la logique circulaire de l'économie psychique. Peut-être cette perspective l'a-t-il tenté, mais il s'est arrêté en-deça du bord. Il annonçait une promesse, dont il savait qu'il ne pourrait s'acquitter. En préconisant des moyens indirects (la culture, la dictature de la raison) pour lutter contre la cruauté, il prenait ses distances, mais sans conclure. Peut-être, après la perte de sa fille et de l'un de ses petits-fils, et avec les premières manifestations de son cancer de la bouche voyait-il, devant lui, se clore l'avenir.

Avec ses figures de l'inconditionnalité, Derrida tente de penser un au-delà qui ne poserait pas seulement la question de l'au-delà du principe de plaisir (comme Freud), mais celle de l'au-delà des pulsions de mort et de pouvoir elles-mêmes. Il s'agit d'un basculement, d'un saut inconditionnel dans une dimension hétérogène - plus que la vie. Sans Freud, cette problématique n'aurait jamais pu s'ouvrir.

 

 

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Propositions

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[Freud inaugure la possibilité inouïe d'une science fondée non pas sur la vérité du concept, mais sur l'archive]

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La découverte de Freud, c'est le retard originaire qui est espacement, différence pure, différance

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En tentant de formaliser le mal d'archive qui l'affectait, Freud a développé des concepts qui sont tous fendus, divisés, contradictoires

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La pensée freudienne de l'après-coup, ce supplément originaire, est la seule qui ne s'épuise ni dans la métaphysique, ni dans la science

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Freud spécule sur une "graphique de la différance" qui n'appartient ni à la science, ni à la philosophie, et qu'il ne peut interroger pour elle-même

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On peut interpréter les différences repérées par Freud dans la production de la trace comme moments de la différance

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La structure (ou stricture) principe de plaisir / principe de réalité / pulsion de mort (1, 2, 3 en un) est celle de la différance : si elle s'interrompait, ce serait l'arrêt de mort

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Dès l'origine, la vie est menacée par la mémoire qui la constitue (la trace); elle résiste en différant l'investissement dangereux, en constituant une réserve

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Le principe de plaisir revient toujours à lui-même, mais une hétérogénéité différantielle, une supplémentarité, un tout autre hantent ce retour à soi

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Sans accréditer la métapsychologie freudienne, on peut admettre que le vivant est divisible, constitué d'une multiplicité d'instances en tension, de forces et d'intensités différentes

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Freud démontre à propos du rêve que le mot est toujours travaillé par l'"espacement", qui est le propre de l'écriture et l'étoffe temporelle du travail psychique

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Freud cherche à déchiffrer une "écriture originelle", mais ne trouve qu'un résidu idiomatique, irréductible, intraduisible, qui porte le poids de l'interprétation

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Freud invente une machine d'écriture (graphie métaphorique) qui n'est assujettie ni à l'écriture phonétique, ni à la parole vive

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Dans la crypte, plus d'un nom propre est tenu secret; des mots idiomatiques qui n'appartiennent pas au système de la langue interdisent de signer d'une seule identité

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Le "bloc magique" de Freud est une machine d'écriture, une métaphore du fonctionnement de l'appareil psychique comme texte

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La signature freudienne a laissé sa marque - son impression - sur sa propre archive, et aussi sur le concept d'archive en général

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Nul n'a plus radicalement que Freud éclairé, déconstruit - mais aussi restauré - le principe archontique de l'archive

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Seule la psychanalyse peut produire une théorie de l'objectivité idéale qui ait un sens "archontique", au regard de toute science régionale

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Penser la trace, c'est accepter son effacement, sa disparition irrémédiable, non par accident mais comme l'horizon qui rend l'inconscient possible

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Freud, qui restait attaché au primat de la mémoire vive (anamnèse), a rendu possible une pensée de l'archive comme expérience du support ou de la prothèse (hypomnèse)

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La trace est itinérante : elle se fraye un chemin qu'elle ne reconstitue qu'après-coup, elle produit sa route avec retard

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Par la loi de l'hymen, la théorie derridienne du double prolonge l'inquiétante étrangeté freudienne

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[Dans le prolongement de la psychanalyse, la dissémination résiste indéfiniment à l'effet de subjectivité que Lacan appelle ordre du symbolique]

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On peut, par une logique du quatre, desserrer l'interprétation métaphysique de la castration, qui lui donne valeur de signifié transcendantal

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Comme la psychanalyse freudienne, la signature de Lévinas assume la marque sexuelle (masculine), et abandonne la différence sexuelle à un tout autre déjà marqué de masculinité

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Quoiqu'en dise Freud, la morale ne naît pas du remords, car pour qu'il y ait remords, il faut que la loi morale ait déjà été là

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Pour Freud, la fonction de stricture la plus originelle de l'appareil psychique est le lien (binden) : serrer, bander, maîtriser, poser, suppléer, substituer, envoyer un représentant

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Freud travaille sans cesse à rendre raison de l'anéconomie, à vouloir la réintégrer dans une économie

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Le texte de Freud redouble fictivement celui qu'il explique, en prétendant dévoiler une vérité "nue" qui aurait déjà été en lui

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Freud voudrait ressusciter la trace originelle et unique, à l'instant même de son impression, à même le subjectile

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Il n'y a pas "la" psychanalyse, mais une multiplicité hétérogène de discours prenant en compte la possibilité d'une autre logique de l'inconscient

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Si l'on prenait sérieusement en compte la révolution psychanalytique, un tremblement de terre inimaginable emporterait l'autonomie et l'autorité souveraines de la conscience

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L'impression laissée par Freud est un événement inoubliable, irrécusable et indéniable; pour tous ceux qui parlent de mémoire et d'archive, il est impossible et illégitime de l'effacer

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Le "pas au-delà" de Freud dans "Au-delà du principe de plaisir" tient à l'impossibilité de s'arrêter à une thèse ou une conclusion posée comme théorique ou scientifique

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Un "principe" se manifeste comme une tendance générale qui ne cesse de parler; les obstacles qui l'empêchent de s'accomplir ne font que le confirmer

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L'hypothèse de l'"athèse" chez Freud, c'est que la structure de son texte, sa spéculation, ne correspond à aucun genre, aucun concept concevable, aucun modèle préétabli

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Le refoulement n'est concevable qu'à partir d'un acquis psychanalytique supposé irréductible - qui suspend le contrat minimal de la signification

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Chez Freud, il n'y a jamais "la" répétition, mais une stricture différantielle qui enserre le principe de plaisir, comme un lacet de chaussure, et induit une déconstruction générale

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La scène d'écriture freudienne reste irrésolue, sans bord, sur la ligne de plus haute tension, sans franchir la limite de l'"Au-delà du principe de plaisir"

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Les pulsions, symptômes, fantasmes, entre conscient et inconscient, proviennent d'un "refoulement" indécidable, irréductible et à peine pensable

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Heidegger, Freud ou Levinas, témoins d'un questionnement qui laisse les frontières interminablement ouvertes, restent contaminés par une bio-anthropo-théologie cachée

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Tous les concepts freudiens appartiennent à l'histoire de la métaphysique, c'est-à-dire au système de répression logocentrique qui exclut ou abaisse le corps de la trace écrite

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On ne peut retrouver la trace singulière, originaire, archivante, celle de l'autre en soi, car à l'instant de son impression, elle ne se distingue pas encore du support

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La dissémination est la possibilité de déconstruire l'ordre symbolique dans sa structure générale et dans les formes de la socialité, de la famille et de la culture

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Le discours de Lacan joue un double rôle : aider à penser la multiplicité des logiques de l'inconscient, interdire une telle pensée

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En déconstruisant le fonds textuel auquel Freud a puisé et n'a cessé de se référer, Derrida prend ses distances à l'égard de la psychanalyse

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Mettre entre parenthèses le reste textuel (Hegel) ou l'anatomie (phallocentrisme de Freud ou Lacan), c'est la même dénégation

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Avec Nicolas Abraham arrive, vers 1968, une brisure qui marque un nouveau rapport entre la psychanalyse et la phénoménologie

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Nicolas Abraham traduit la langue de la psychanalyse dans "une autre langue", une nouvelle langue anasémique, incomparable à aucune autre

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En proposant un nouveau concept anasémique de traduction, hors de lui-même, Nicolas Abraham opère une conversion, une transmutation

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La structure anasémique appelle un récit mythique, poétique : celui d'un événement pré-originaire qui, sans avoir été, aurait eu lieu

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On peut comparer le geste de la psychanalyse à une figure étrange, double, abyssale, dissymétrique et anasémique : l'"écorce-et-le-noyau"

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Les analystes de l'"Homme aux loups", connus ou inconnus, ont produit à plusieurs voix une traduction inventive, une oeuvre de langue, une oeuvre de vie, un poème

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A l'origine de la loi, rien n'a lieu, rien de nouveau n'arrive, il est impossible de raconter l'événement qui inaugure l'interdit

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Ce qui est nommé par "Trieb" (pulsion) est, comme le Walten, innommable au sens strict : avant tout étant, tout qui et tout quoi, ça ne peut pas donner lieu à un nom

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[Dans le principe de plaisir qui, selon Freud, domine la vie psychique, est à l'oeuvre, en silence, le "tout autre"]

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Si le principe de plaisir est un principe premier, il faut raconter son histoire, croire en sa souveraineté, son autorité absolue, mettre les pulsions au service de ce maître qui parle haut

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Les pulsions de mort, toujours déjà à l'oeuvre, s'écrivent en silence, elles se laissent entendre comme inaudibles

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Dans la spéculation freudienne sur le principe de plaisir, la possibilité du tout-autre est d'avance inscrite à même ce principe, en tant qu'ininscriptible

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La compulsion de répétition freudienne, cette force démonique, appartient à la structure du testament

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Par le jeu du Fort/Da, Freud s'assure du retour du principe de plaisir dans sa maison (la psychanalyse), sa famille (son petit-fils), il reproduit sa marque dans l'institution

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Le jeu du Fort/Da, c'est aussi celui de l'écriture freudienne qui s'auto-institue en donnant à lire la structure formelle de ce qu'elle fait : une proximité qui s'éloigne en abyme

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"Psychanalyse" serait le nom de ce qui se tourne, sans alibi religieux, métaphysique ou autre, vers ce que la cruauté psychique aurait de plus propre

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Au-delà du principe de plaisir, le "pas au-delà" resté interdit pour Freud, insaisissable par une esthétique du plaisir mais déchaîné, désentravé, délié, "fait-oeuvre"

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Quand arrive l'autre scène, indéchiffrable, elle excède tout énoncé performatif, tout principe de plaisir et de réalité, toute pulsion de pouvoir et peut-être toute pulsion de mort

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Les figures de l'inconditionnalité s'affirment à partir d'un "au-delà de l'au-delà" des pulsions et principes freudiens : de plaisir, de réalité, de mort et aussi de pouvoir souverain

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Dans le champ politique, la prise de conscience ne suffit pas : il faut mobiliser la psychanalyse, lui faire travailler la mémoire collective et les traces spectrales de toutes sortes

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Si la psychanalyse avait été reconnue comme science, Freud l'aurait payé de son nom - mais c'est comme "oeuvre" qu'elle opère, inséparable d'un effet de nom propre

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Avec le Fort/Da, par un contrat étrange qui lui est propre, Freud institue une nouvelle charte pour toute autobiographie possible

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Freud parle depuis une scène d'écriture auto-hétéro-thanato-graphique où son bon plaisir a le dernier mot; en ce non-lieu, il est acquitté de toute dette

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"Au-delà du principe de plaisir", Freud transgresse l'économie même; ne pouvant s'acquitter de ce qu'il promet, devenu insolvable, il choisit de se retirer

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Freud a connu la pire expérience : la mort d'un enfant, la perte irrémédiable d'une filiation, la crainte d'un avenir clos, sans alliance, et alors il a pleuré

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Il faut radicaliser la pensée freudienne de la trace

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Entre Eros et Thanatos, toute la pensée n'est que différance, chemin de détour, retardement, surséance et substitution

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Les concepts d'archi-trace et de différance ne sont ni freudiens ni heideggeriens

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Il y a dans le texte de Freud "Au-delà du principe de plaisir" sept chapitres - comme dans le récit biblique de la création

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Entre la feinte animale et l'aptitude à "feindre la feinte" supposée exclusivement humaine par Lacan, il est impossible d'assigner une limite stable et indivisible

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Il est toujours possible que des traces s'effacent, mais nul ne peut garantir leur destruction définitive

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En limitant son analyse critique du concept lacanien de sujet aux textes antérieurs à 1960, Derrida dénie le potentiel déconstructeur du thème de la "coupure" du sujet

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