Derrida
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TABLE des MATIERES :

                            NIVEAUX DE SENS :

 DERRIDEX

Index des termes

de l'oeuvre

de Jacques Derrida

Un seul mot - ou un syntagme.

         
   
Derrida, l'espacement                     Derrida, l'espacement
Sources (*) : La pensée derridienne : ce qui s'en restitue               La pensée derridienne : ce qui s'en restitue
Pierre Delain - "Les mots de Jacques Derrida", Ed : Guilgal, 2004-2017, Page créée le 2 novembre 2006. Oeuvre, espacement

[Derrida, l'espacement, l'"entre"]

Oeuvre, espacement Autres renvois :
   

Derrida, la différance

   

Derrida, l'hymen

   

Derrida, la trace

                 
                       

1. L'espacement, un concept-gigogne.

Espacement est un mot, un concept, et c'est aussi un quasi-concept, un mouvement indissociable de la différance, dont Derrida a déployé une grande diversité d'aspects et d'approches dans la double série de livres publiés en 1967 et 1972.

Espacer, c'est mettre de l'écart, interposer. Un autre mot de la langue désigne ce processus : entre. Quand il y a de l'entre... - entre le dedans et le dehors, entre l'homme et la femme, entre le continu et le discontinu, entre mimesis et mimique, etc... - un hiatus est creusé, les parties entrouvertes restent distinctes et laissent place à une syntaxe. Il y a de la différence et de la dissémination, même sans sujet, même sans présence. Le mot "entre" n'a aucun sens en lui-même. Il dépend du code dans lequel on le fait travailler. Ouvert, indécidable, inintelligible, il vaut pour tous les signes qui ont une valeur double et sont insensibles à la contradiction. De nombreux concepts développés par Jacques Derrida peuvent être interprétés comme un lexique de l'espacement : inconscient, hymen, supplément, différance etc...

L'espacement introduit dans l'espace une scène d'écriture hétérogène, à la fois extérieure et intérieure au spatial (la double scène). Tout rapport à soi, entre l'apparaissant et l'apparaître, implique cet entre-deux, cette dispersion.

 

2. L'espacement originel.

Rien ne vient commander l'espacement (ni théologie, ni ontologie, ni anthropologie). Il ne se fait depuis aucun centre, aucune place préétablie. Il ne se donne pas comme présence, mais à travers des blancs, des ponctuations, des devenirs-absents ou devenir-inconscients qui ne sont pas seulement spatiaux, mais aussi textuels, temporels, sensibles, etc. Tout ce qui "a lieu", dans tous les sens de l'"avoir lieu", le présuppose.

Et pourtant l'espacement est originel. En des lieux sans âge, désertiques, sans consistance (le subjectile d'Artaud) ou abstraits (la Khôra de Platon), il aura déjà eu lieu. Jean-Luc Nancy le situe, avant toute oralité, dans un lieu ni sensible ni intelligible : la bouche. En ce lieu/non-lieu que Descartes désignait comme celui de la profération, l'âme et le corps se rejoignent sans se toucher. Il suffit d'une extériorité, d'une trace dans le temps, d'un écart entre la voix et le chiffre, et la parole devient espace.

Pour que du nouveau texte puisse être généré, il faut un retrait qui maintienne ouvert l'espacement. Il faut qu'un autre, irréductible, préserve la distance, le secret.

 

3. Freud, frayage.

La notion psychanalytique de frayage s'appuie sur une métaphore spatiale : la trace mnésique fait effraction, elle se perce un chemin contre des résistances. Quand elle fait irruption, par exemple dans le rêve, elle est à la fois visuelle et verbale. Il faut un travail, une violence, pour tracer une route, qui n'est produite qu'avec retard, après-coup. Ce décalage ou retardement supplémentaire, découvert par Freud, est originel, indissociable de l'archi-écriture derridienne. Borné ni par la temporalité linéaire de la parole, ni par la structure phonétique, il expose à l'éloignement, à la distanciation. Un des symboles de ce retard est Oedipe, qui ne deviendra aveugle que dans un temps supplémentaire.

 

4. Œuvrement et espacement.

Bien que l'«entre» n'existe pas comme tel, l'espacement n'opère pas dans le vide. Il lui faut, pour se maintenir ouvert, des artefacts, des outils, des figures ou des schèmes, qui parfois sont visibles et descriptibles comme tels, et d'autres fois ne le sont pas, mais peuvent s'entendre comme archi-artefacts ou archi-figures.

a. Passe-partout.

On rencontre la fonction du passe-partout dans les arts graphiques, peinture, dessin ou arts numériques. Tout ce qui creuse l'écart entre le cadre et l'oeuvre se rattache à cette fonction, qui peut soit figer la spatialité en système (la présentifier), soit encore continuer à l'ouvrir. Pour reprendre le vocabulaire derridien, cette fonction opère comme stricture parergonale qui entame l'espace. Elle est l'index d'un dehors, d'une l'altérité. En tant que force productive, génératrice, l'espacement ouvre une circulation où peut se déployer l'ellipse mimétique, la chose absente et son double. Sans cela, pas d'art.

b. Spacieux.

Il y aurait une certaine mise en oeuvre de l'espacement dont on pourrait dire qu'elle serait spécifiquement contemporaine (bien qu'elle soit apparue depuis plus d'un siècle). Pour la nommer, Jacques Derrida s'est servi d'un mot qu'il a inventé, le spacieux. Mais comme à chaque fois qu'est mise en jeu la notion d'époque, on n'avance cette hypothèse qu'au conditionnel.

cf : Le spacieux institue l'espace par espacement de la lettre.

Le spacieux d'aujourd'hui prend appui sur les télé-technologies, et plus particulièrement le cinéma.

c. Cinéma.

cf : En tant qu'oeuvre, un film "met en oeuvre" la question de l'espacement.

Les forces en oeuvre, dans l'espacement, ne se présentent pas comme telles. Dans l'espace public ou les médias, elles hantent le langage, elles ventriloquent le discours, mais les spectres ne se montrent pas.

d. Surréalisme, musique.

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e. Politique.

Le lieu propre de la démocratie est introuvable. Toujours à venir, elle est comme la khôra du politique : une chose inappropriable, aporétique. Son lieu, qui ne se stabilise jamais dans l'espace-temps, c'est l'espacement.

 

 

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Propositions

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Khôra, lieu abstrait de l'espacement, ne se laisse dominer par aucune instance théologique, ontologique ou anthropologique

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Un retrait (tsimtsoum) maintient à jamais l'espacement qui génère le texte

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A l'origine du sens, une archi-écriture de la trace est à l'oeuvre; elle ouvre un espacement, un intervalle dans le temps comme dans la parole

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L'espacement, comme archi-écriture, est le devenir-absent et le devenir-inconscient du sujet

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La découverte de Freud, c'est le retard originaire qui est espacement, différence pure, différance

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La trace pure, inouïe, est la différance; entre l'apparaissant et l'apparaître, c'est la condition de toutes les autres différences

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En marquant un écart entre la chose absente et son double, l'"ellipse mimétique" procure un plaisir

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Une dissémination originaire appartient à l'être du Dasein : il s'auto-affecte dans un rapport à soi déjà dispersé (espacement, entre-deux)

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La dissémination est la répétition du mot "entre" : une déhiscence qui n'a pas d'autre sens que l'espacement et l'articulation

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Khôra situe le mouvement, elle fait place à l'espacement, elle fait naître sans engendrer

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Le subjectile n'a pas d'autre consistance que celle de l'entre-deux

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Avant toute oralité, s'ouvre l'espacement originaire d'une bouche

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La différance est le devenir-espace de la chaîne parlée

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Le spacieux institue l'espace par espacement de la lettre

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Freud démontre à propos du rêve que le mot est toujours travaillé par l'"espacement", qui est le propre de l'écriture et l'étoffe temporelle du travail psychique

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La trace est itinérante : elle se fraye un chemin qu'elle ne reconstitue qu'après-coup, elle produit sa route avec retard

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Le jeu de la différance fait qu'aucun mot, aucun concept ne vient résumer et commander depuis un centre le mouvement et l'espacement textuel des différences

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L'hymen "a lieu" dans l'entre (antre), dans l'obscurité d'une caverne, entre le dedans et le dehors de la femme

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L'espacement est l'impossibilité pour une identité de se fermer sur elle-même : c'est l'irréductibilité de l'autre

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L'espacement ne désigne rien : c'est l'index d'un dehors, d'une hétérogénéité, d'un mouvement qui indique une altérité irréductible

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La responsabilité est temporelle, de l'ordre de l'écoute, tandis que le respect est visuel, de l'ordre de la distance, du secret, d'un espacement dont la rupture entraînerait le mal radical

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En tant qu'oeuvre, un film "met en oeuvre" la question de l'espacement

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La télé-techno-discursivité, qui détermine l'espacement de l'espace public, est irréductiblement spectrale

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Dans la tradition métaphysique, le point et l'espace sont pensés ensemble, dans la même circularité, à partir de l'espacement du temps

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Pour Heidegger, l'oeuvre d'art, la chose et le produit sont entrelacés dans une structure (stricture) où le produit se place "entre" la chose et l'oeuvre

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La "démocratie à venir" est comme la khôra du politique : un espacement d'avant toute détermination, qui ne peut se dire qu'à travers les apories de la théologie négative

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L'art, c'est espacer, circuler : accoler en décolant plutôt qu'en exhibant la nécessité d'une rhétorique discursive

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Dans le dessin, il y va de l'expérience du trait et de l'espacement : une expérience "autre" de la différence, irréductible à la logique binaire ou à la visibilité diurne

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Pour donner lieu à la vérité en peinture, il faut entamer l'espace : le trait commence par se retirer, il ouvre sans initier

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En espaçant le cadre, le passe-partout laisse paraître l'oeuvre

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Il n'y a aucune commune mesure entre le corps et l'âme; entre ces deux étendues s'ouvre un lieu ni sensible, ni intelligible : la bouche

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En leur offrant une place au présent, l'espace vocal prend en charge les forces d'espacement, il les domestique et les séduit

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La destinée du peuple juif est de s'interposer entre la voix et le chiffre

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Oedipe, poussé par une colonne invisible, hésitant entre deux chemins qui ne cessent de se dédoubler, ne peut que briser la surface à laquelle il se heurte

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