Derrida
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TABLE des MATIERES :

                            NIVEAUX DE SENS :

 DERRIDEX

Index des termes

de l'oeuvre

de Jacques Derrida

Un seul mot - ou un syntagme.

         
   
Derrida, la mère, la matrice                     Derrida, la mère, la matrice
Sources (*) : La pensée derridienne : ce qui s'en restitue               La pensée derridienne : ce qui s'en restitue
Pierre Delain - "Les mots de Jacques Derrida", Ed : Guilgal, 2004-2017, Page créée le 13 juillet 2018 Orlolivre : comment ne pas s'entendre, se sentir?

[Derrida, la mère, la matrice]

Orlolivre : comment ne pas s'entendre, se sentir? Autres renvois :
   

Derrida, la femme, la différence sexuelle

   

Derrida, l'hymen

   

Derrida, père/fils, Oedipe

                 
                       

1. Déjà la mère, toute autre.

La mère, elle est déjà là, elle aura toujours été là, avant. "Déjà" est un lieu terrorisant, en-deçà et au-delà de la différence des sexes, qui n'est même pas féminin, quoiqu'on ait tendance à le représenter par la femme. La mère peut toujours s'éloigner, disparaître, c'est un lieu tout autre jamais éloigné du danger, de la mort. Dans Circonfession, Derrida aura décrit sa mère malade, grabataire, une mère ayant perdu le langage et la capacité de le reconnaître - le pire qui puisse arriver. Depuis ce passé absolu, irreprésentable comme tel, cette scène terrible, excessive, elle, la mère, elle fascine. Elle représente l'extériorité, l'altérité ((m)other), l'irremplaçable qui doit rester intact, indemne, sauf, car sans elle c'est la sollicitude désintéressée, le souci de l'autre, qui disparaîtraient.

 

2. Khôra.

La mère renvoie à un lieu dont on ne peut pas témoigner, un lieu introuvable, en retrait, impliqué dans le corps, la chair, la peau, les tissus, les cicatrices, mais sur lequel on ne peut pas écrire. Ce lieu de la blessure, qui ne se raconte pas, c'est aussi le lieu d'une autobiographie impossible, d'une inconcevable conception de soi. La philosophie à ses débuts (Platon) lui a donné un nom : khôra. Mais plus tard, l'anamnèse s'en est perdue. Dans le cheminement de ses lignées, le parcours de ses traditions, la philosophie n'aura parlé que du père et du fils.

La métaphysique, avec son signifiant transcendantal (phallique), ne réserve aucune place pour la mère - sauf celle de la castration. Elle doit rester à part, hors de toute généalogie et même de toute génération, en un lieu pour lequel Derrida reprend dans Glas un nom traditionnel, l'Immaculée Conception. Il faudrait que ce lieu soit déphallicisé, qu'il ne symbolise rien, qu'il n'ait aucun lien avec la culpabilité ni la castration.

Ce lieu nourricier, cette cavité utérine (colpos) est aussi celui du texte. Il précède tout nom et toute signature, et il lui survit, il l'enterre (logique de l'obséquence). Intact et intangible, il eset chose de la mère, il tient lieu de mère. Jean Genet dit bander devant des fleurs, lieu de l'anthérection qui est aussi celui du tombeau du sens.

 

3. La langue maternelle.

D'un côté, la mère est un lieu unique, irremplaçable, mais d'un autre côté, il n'est pas de fonction maternelle qui ne puisse se substituer. Même la naissance, l'acte supposé le plus naturel et le plus indéniable, pourrait avoir lieu ailleurs, autre porteuse (la gestation pour autrui) ou utérus artificiel. L'unique insuppléable, insubstituable, est souvent fantasmé comme essence de la maternité, mais s'il se transforme en lieu absolu, si rien d'autre ne peut le remplacer, alors il peut devenir un lieu de folie. La règle de vie ou de survie, c'est qu'il ne faut pas de place unique pour la mère.

L'ambiguité de la mère se retrouve dans la langue maternelle. C'est ma langue (insubstituable), mais je la reçois de l'extérieur, ce n'est pas la mienne. Je lui reste fidèle car je n'ai pas d'autre choix, mais elle est incontrôlable, transformable - je dois m'en méfier car elle peut devenir folle. Irremplaçable, elle finit souvent par être remplacée, comme le montrent de nombreux écrivains et penseurs qui ont un rapport problématique à cette langue (y compris Derrida, qui s'inscrit sur ce plan dans une série de penseurs juifs).

En tant que lieu vivant de la langue, la mère vient avant toute inscription, et survit à la mort de ses fils. Elle est le lieu de la métaphore, qui vient toujours comme supplément.

 

4. Généalogie, la fiction dangereuse du père-mère.

La maternité, comme la paternité, est une fiction légale. Pour l'une comme pour l'autre, il faut un témoin pour y croire - et même la preuve scientifique, appuyée par exemple sur l'ADN, suppose un dispositif légal et social qui la rend crédible. Sur cette fiction reposent les institutions du monde présent : systèmes politiques, artistiques et autres, ces institutions qu'Antonin Artaud associait au père-mère dans la même exécration. Il faut entendre la voix d'Artaud, dit Derrida, sans la proférer lui-même.

 

5. La circoncision, alliance maternelle.

Alors que, dans la tradition juive, la circoncision est présentée comme une entrée dans le monde des pères, Jacques Derrida insiste sur la place de la mère. Tenue à l'écart, elle ne peut pas retenir ses larmes. C'est elle qu'il faut consoler plutôt que l'enfant. Et pourtant, comme Tsiporah dans le texte biblique, elle est la gardienne de cette cérémonie. On dit qu'en Algérie, il lui arrivait de manger le prépuce. Le reste, cet anneau d'alliance, revient à la mère. Et comme Derrida ne semble reconnaître aucune place légitime ni au père, ni au mohel (le circonciseur, porteur de la loi), alors il faut bien qu'il imagine, dans son fantasme, une sorte d'auto-circoncision (comme Abraham), ou d'auto-materno-circoncision, dont la jouissance fellatoire redouble l'auto-hétéro-affection de la différance.

 

 

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Propositions

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On peut tout remplacer chez la mère, sauf la sollicitude désintéressée, cette figure irremplaçable de l'hospitalité qui doit rester intacte, indemne, sauve

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La mère fascine depuis l'absolu d'un "déjà" qui produit l'excès, le terrible, la jalousie - depuis un passé absolu pire que la pire scène imaginable

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Le 23 juillet 1989, devant sa mère malade, apparemment guéri d'une paralysie défigurante, Jacques Derrida fait l'aveu en son corps d'une conversion illisible qu'il donne à lire

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Logique de l'obséquence : "Je suis la mère qui survit toujours à ce qu'elle aura engendré"

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Dans la guerre à mort pour la signature, le texte, qui ne reste à personne, bat dans un lieu nourricier, une cavité utérine (colpos)

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En tant que telle, la philosophie ne parle que du père et du fils; il faut que la mère soit à part, avant et hors toute génération (khôra)

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L'autobiographie derridienne, c'est ce qui aura fait qu'elle n'aura pu être faite : un retrait du "biographique", ce lieu introuvable, cette mère, ce réceptacle

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Le phallus, interprété métaphysiquement, est un signifiant transcendantal, le corrélat d'un signifié premier (par exemple la castration ou le désir de la mère)

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[Dans les deux portées des colonnes de Glas, le savoir absolu (Sa) et l'Immaculée Conception (IC) se représentent l'un l'autre]

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Le lieu de l'anthérection, ce lieu clos et gardé qui est aussi celui de l'être (ce qui bande et dans quoi il est bandé) s'habite toujours comme une province détachée de la mère

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Le Musée est chose de la mère, il tient lieu de mère, lieu intact et intangible de l'Immaculée Conception

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La leçon d'hospitalité extrême, intenable, inconditionnelle, que donne Jacques Derrida, c'est à l'égard du tout-autre : le féminin, la mère

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Dans l'exposition "Mémoires d'aveugle", un seul dessin était dépourvu de texte : "La femme au lorgnon", qu'on peut interpréter comme la restance d'un choix d'objet, la (m)other

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La mère, comme lieu de la langue, est l'unique irremplaçable - qu'il faut remplacer car l'insuppléable est la folie même, toujours à l'oeuvre

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[Une langue qui garderait le pouvoir de nommer - langue sacrée ou fantasme de langue maternelle - pourrait précipiter dans l'abîme : folie, catastrophe, apocalypse, mal radical]

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L'essence de la maternité tient à la langue maternelle, tandis que le père occupe la place intenable d'une langue formelle ou d'un métalangage, impossible et monstrueux

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Sauver le génie, métaphore vivante de la mère, de la vie ou de la vie plus que la vie, contre la domination de la culture moyenne, telle est la métaphore en général

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Certains penseurs juifs, ashkénazes ou séfarades, se rejoignent dans leur rapport problématique à une langue maternelle dont ils se détachent, qui leur reste étrangère

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Maternité et paternité sont des fictions légales : nous y croyons car nous en témoignons nous-mêmes

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L'explosion d'Artaud se déchaîne depuis près d'un siècle contre le père-mère du monde présent : musée, Amérique, conscience, démocratie et autres institutions

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La circoncision, cette coupure du pourtour, est instituée par et pour la mère

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"J'ai dû me porter moi-même lors de ma circoncision" : pour qui sait lire, cela s'écrit dans la différance

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Fantasme de Jacques Derrida : "Ma mère, en signe d'alliance, me circoncit de ses lèvres, et j'éjacule dans sa bouche quand elle avale le prépuce"

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