Il n'y a pas, selon Derrida, de religion universelle, mais il y a quand même un schème qui s'impose mondialement, sans médiation, sans représentation, une structure qui opère partout sous différentes formes. Elle se présente le plus couramment comme le respect de la vie. Qu'est-ce qui a droit au respect absolu? Qu'est-ce qui doit toujours rester sain et sauf, intact? D'abord le vivant. Il faut le laisser être, fort et fertile, fécond, intègre. C'est une loi sacrée devant laquelle bien des mouvements et des causes s'arrêtent. Il faut se tenir en retrait devant le secret, à distance du mystère, et s'il fallait traduire le mot latin religio, ce serait : scrupule, respect, pudeur - ou encore inhibition - au prix parfois du sacrifice de soi. Mais cette nécessité, qui s'impose quasi machinalement, est aussi pulsion de mort.

-------

On retrouve une structure analogue devant la loi : Je t'ordonne de ne pas venir jusqu'à moi, dans les Annonciations chrétiennes et plus généralement dans l'art. Ici la Vierge tient ses distances, tout en laissant le Verbe les franchir dans son corps.