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Ce qui se dit d'un film n'est qu'une rémanence : ce qu'il en reste après qu'on l'ait vu.
Extraits de l'article "Rémanence" du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales :
- Fait de se maintenir, de persister; durée, permanence de quelque chose. Synonyme : persistance. Rémanence d'une superstition.
- En physique, persistance partielle d'un phénomène après disparition de la cause qui l'a provoqué.
- Rémanence d'un écran fluorescent : persistance temporaire de l'émission lumineuse d'un écran après cessation de l'excitation.
- Agriculture : propriété d'un produit antiparasitaire dont l'action se fait encore sentir dans le temps bien après son application. La rémanence d'un insecticide, d'un fongicide ou d'un désherbant dans le sol ou dans la récolte peut entraîner des risques de toxicité pour les végétaux cultivés ultérieurement sur ce sol ou pour les consommateurs.
- Propriété de certaines sensations de subsister après la disparition de l'excitation qui leur a donné naissance. Rémanence des images visuelles.
- Parapsychologie : vibrations positives ou négatives qui imprégneraient un lieu précis après un événement du passé. Rémanence d'une maison, d'un mur, d'une pièce, d'une poutre. Dans une maison où il s'est passé quelque chose, des événements intensément vécus comme des souffrances, des meurtres, les murs sont en quelque sorte imprégnés de ces vibrations qui sont créées par la douceur ou par la peur ou par l'amour exagéré.
- Demeure, résidence, fait de rester au même endroit.
- Persistance d'une modification de la matière brute après qu'elle ait été soumise à certaines influences.
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On nomme orloviennes les rémanences qui, parfois sans raison particulière, ont été laissées dans l'Orlœuvre.
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(Par ordre chronologique de sortie des films).
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Propositions
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- Les mystères d'une âme (Georg Wilhelm Pabst, 1926) : un film muet qui, par excès de pédagogie, refoule ce qui, à même le cinéma, mobilise l'inconscient
- Le premier film parlant, "Le Chanteur de Jazz" (Alan Crosland, 1927) a pour thème la dissociation voix/corps/identité; il veut faire croire à leur coïncidence impossible
- Au crépuscule du cinéma muet, "L'Aurore" (film de F. W. Murnau, 1927) marque dans le même mouvement l'apologie de l'amour et l'apogée de la beauté adhérente en art
- La Coquille et le Clergyman (Germaine Dulac, 1928) - Il n'y a rien à attendre de la différence des sexes
- Le Cameraman (Buster Keaton, 1928) - Le cameraman le plus crédible, le plus digne d'amour, c'est celui qui filme pour rien, sans projet ni intention
- Une femme sur la lune (Fritz Lang, 1929) - Dans chaque film opère un compte à rebours : comme une apocalypse, le temps du cinéma est toujours sur le seuil de sa fin
- Dans "Le bled" (1929-30), Jean Renoir détourne le contexte colonial pour glorifier le sentiment amoureux
- Dans l'"Homme à la caméra" (1929), Dziga Vertov met le leurre cinématographique en œuvre tout en le tenant à distance, le démontant et le déconstruisant
- Liliom (Frank Borzage, 1930) - Pour qui aime sans calcul ni condition, sans exiger aucune réponse, un coup peut être ressenti comme un baiser
- Les nazis sont arrivés au pouvoir car le vieux monde s'était déjà effondré (L'ange bleu, film de Josef von Sternberg, 1929-30)
- Le testament du docteur Mabuse (Fritz Lang, 1933) : Ce qui nous relie à un film ressemble au cordon ombilical : un flux sonore continu qu'il ne faut surtout pas couper avant la fin
- Il Caso Valdemar (Gianni Hoepli & Ubaldo Magnaghi, 1936) - Le "mourir" de Valdemar, suspendu pendant 7 mois, est encadré par deux énonciations impossibles : "Je suis mort"
- Dans "La règle du jeu", film sur l'égalité, Jean Renoir montre un bouc émissaire qui pourrait être n'importe quel homme
- A la création du monde, la lettre du mot créateur est allée en haut, tandis que le son demeurait en bas (Rosebud dans "Citizen Kane", d'Orson Welles, 1941)
- To be or not to be (Ernst Lubitsch, 1942) - Allemands et Polonais se combattent, se font la guerre, échangent leurs rôles, et finalement, c'est le Juif qui est sacrifié
- Une mélodie obsédante porte une structure d'aveu : elle ouvre le mouvement d'une confession qui n'a pas encore de contenu ("L'ombre d'un doute", film d'A. Hitchcock, 1943)
- La maison du Dr Edwardes (Alfred Hitchcock, 1945), ou comment fabriquer l'homme qu'on aime
- The Ghost and Mrs Muir (Joseph L. Mankiewicz, 1947) - Et le spectre déclara à Mrs Muir : "Il faut que je te porte"
- Les parents terribles (Jean Cocteau, 1948) : par un cadrage épousant le rythme pur de l'attention, faire éprouver le sentiment d'une présence totale à l'événement
- Les Chaussons rouges (Powell/Pressburger, 1948) - Il n'est d'art pur que régi par une puissance souveraine ayant tous les droits, y compris de détruire les conditions de sa survie
- Mon père est si complaisant à l'égard du nazisme que je ne peux faire autrement que de me tuer moi-même ("Allemagne année zéro", film de Roberto Rossellini, 1948)
- Traité de bave et d'éternité (Isidore Isou, 1951) : Le cinéma est un art discrépant, où sons, images, significations, etc., quoique simultanés, ne parviennent pas à s'accorder
- Un tramway nommé désir (Elia Kazan, 1951) - Un monde s'en est allé, il n'en reste rien d'autre que cette femme, la folle, l'exclue, qui ébranle à jamais "notre" monde
- Pandora (Albert Lewin, 1951) - Aporie de l'amour inconditionnel : en exigeant le sacrifice de tout autre intérêt, il se soumet à une condition irréalisable, mortifère
- On murmure dans la ville (Joseph L. Mankiewicz, 1951) - Une pure amitié qui ne repose sur aucune justification, sur aucun intérêt commun
- Un été avec Monika (film d'Ingmar Bergman, 1953) - Un regard dans le film en appelle au-delà du film à un autre regard qui témoigne d'une alliance oto-biographique
- Rêves de femmes (Ingmar Bergman, 1955) - Ce dont je rêve, cela ne peut pas m'appartenir
- "Written on the wind" (Douglas Sirk, 1956), ou comment écrire ce qui ne peut se dire ni en paroles, ni en images, mais seulement sur du vent, dans l'évanescence d'un film
- Vertigo (Alfred Hitchcock, 1957) - Tu es morte, ton monde a disparu, il faut que je te porte
- N.Y. N.Y. (Francis Thompson, 1957) - La figuration la plus artificielle possible de la différance
- Pickpocket (Robert Bresson, 1959) - Jouir d'un vol, dans un désintéressement absolu, pour affirmer simultanément, sans les dissocier, son innocence et sa culpabilité
- Le mirage de la vie (Douglas Sirk, 1959) - Il faut soit sacrifier les mères pour laisser vivre les filles, soit sacrifier les filles pour que les mères puissent vivre selon leur désir
- L'Avventura (Michelangelo Antonioni, 1960) - Une aventure vécue en bordure parergonale du monde, dans le manque creusé par une disparition
- La dolce Vita (Federico Fellini, 1960) - Dans un monde qui se déconstruit, il est tentant de se ruer sur les plaisirs, au risque d'aggraver le mal
- Tirez sur le pianiste (François Truffaut, 1960) - En racontant la vie d'un autre, je transgresse l'impossibilité de raconter ma propre mort
- La Notte (Michelangelo Antonioni, 1961) - La nostalgie d'une extériorité impossible, dont il faut faire son deuil
- Viridiana (film de Luis Bunuel, 1961) - Pour faire la charité, il faudrait déjà être chez soi, et pour offrir l'hospitalité, il faudrait déjà accepter la loi de l'autre
- L'éclipse (Michelangelo Antonioni, 1962) - Un parcours dans les marges où la vie courante, sentimentalo-économique, se dissout, s'efface, s'éclipse
- Cléo de 5 à 7 (Agnès Varda, 1962) - Il aura fallu, pour commencer à vivre, un événement qui s'ajoute à l'implacable écoulement du temps
- Le silence (Bergman, 1963) - Ce qui reste silencieux ne peut s'écrire que dans une langue étrangère, intraduisible
- Huit et demi (Federico Fellini, 1963) - La paralyse - ce temps de fermentation ou de bouillonnement qui est aussi la khôra du réalisateur
- La Jetée (Chris Marker 1963) - L'instant pour moi le plus décisif, celui dont je désire le retour avec le plus d'intensité, c'est celui de "ma mort", que je n'ai pas vécue
- Le désert rouge (Michelangelo Antonioni, 1964) - Dans les marges périphériques où le monde se perd, il n'y a personne pour me porter
- Six femmes pour l'assassin (Mario Bava, 1964) - La grande triade de l'art moderne, c'est sexe, sang et mort
- Pas de printemps pour Marnie (Alfred Hitchcock, 1964), ou comment s'emparer d'une femme, la posséder par son secret, la garder par sa guérison - et surtout dérober son monde
- L'homme au crâne rasé (André Delvaux, 1965) - Pour déchirer la crypte, il faut se sacrifier soi-même, se retirer
- Pierrot le fou (Jean-Luc Godard, 1965) - Un collage de phrases mortes qui ne promet rien, n'engage à rien, mais appelle l'adhésion
- Persona (Ingmar Bergman, 1966) - Ce film qui se termine par "rien" déclare, au-delà de tous les simulacres, rôles ou jeux sociaux, la valeur incommensurable de ce "rien"
- Masculin Féminin (Jean-Luc Godard, 1966) : Comment mettre en scène la non-réponse de l'autre ?
- Nul ne dispose d'un héritage, pas même son propriétaire ni son spectre ("Guêpier pour trois abeilles", film de Joseph Mankiewicz, 1969)
- Fahrenheit 451 (François Truffaut, 1966) - Il faut, pour sauver les livres, sacrifier et sa mort et sa vie, mourir pour que vive l'à-venir des livres
- Deux ou trois choses que je sais d'elle (Jean-Luc Godard, 1967) - S'approprier le corps et la voix des femmes par le proxénétisme du texte et du montage
- Un soir, un train (André Delvaux, 1968) - "Je suis mort.e" ne peut se dire que dans une langue toute autre
- Rosemary's Baby (Roman Polanski, 1968) - On exhibe les preuves d'angoisse, de crainte qu'il n'y ait plus de sujet pour l'éprouver
- Notre époque ne peut imaginer d'autre salut que le plaisir comme bien public (Barbarella, film de Roger Vadim, 1968)
- La fiancée du pirate (Nelly Kaplan, 1969) - Porter à l'excès la logique de l'échange pour faire un pas au-delà, le dernier pas, indifférent à l'échange
- L'Arrangement (Elia Kazan 1969) - Plutôt que ce qu'on m'impose, je préfère être ce que je respecte vraiment, moi-même, rien
- "Invasión" (Hugo Santiago, 1969) - Où la liberté la plus absolue et l'inconditionnalité la plus pure rejoignent la clôture la plus close
- Les Damnés (Luchino Visconti, 1969) - Avec les nazis, ces bouchers de la filiation, Gewalt (violence) et Geschlecht (génération) sont indissociables
- M.A.S.H. (Robert Altman, 1970) - Au coeur de la plus phallogo-polémo-centrique des comédies, un homme impuissant ressuscite, en paix avec lui-même, après la Cène
- Valérie et la semaine des miracles (Jaromil Jireš, 1970) - Une virginité toute autre, d'avant toute virginité
- Dans le film de Barbara Loden (1970), Wanda, déliée de toute dette, reste paralysée au bord de l'inconditionnel
- The last Picture Show (Peter Bogdanovich, 1971) - Le sexe, un pharmakon qui, prétendant compenser ou remédier à la vacuité, creuse un vide encore plus profond
- Les Diables (Ken Russel, 1971) - Il s'agit, sous l'apparence de la transgression, de sauver la distinction tranchée qui oppose le bien au mal
- Une femme sous influence (John Cassavetes, 1972) - Un film-marge, un film-limite, un film-border-line comme Mabel
- Les larmes amères de Petra Von Kant (Rainer W. Fassbinder, 1972) - On peut renoncer à la perversion par excès d'amour, demander pardon, mais alors on n'est plus soi-même
- "Tout va bien" (Jean-Luc Godard, 1972) : le cinéma est l'envers de l'argent, mais il ne peut y avoir de cinéma que s'il l'excède
- Aguirre, la colère de Dieu (Werner Herzog, 1972) - L'auto-affirmation d'un fantasme de souveraineté solitaire sans monde, ni légitimité, ni crédibilité
- L'utopiste, qui veut tout prévoir, n'attend plus rien de l'avenir (L'An 01, film de Jacques Doillon, Alain Resnais et Jean Rouch,1972)
- Solaris (Andreï Tarkovski, 1972) : une allégorie de la traduction du monde en film ou du film en monde
- Belle (André Delvaux, 1973) - Je dois, pour sur-vivre, me dépouiller de tout ce qui m'appartenait : identité, culture, personnalité, profession, croyances, etc.
- Soleil vert (Richard Fleischer, 1973) - Là où des cadavres se nourrissent de cadavres, ça ne fait plus monde, c'est sans monde
- The Wicker man (Robin Hardy, 1973) - En-deçà du christianisme, le sacrifice humain fait retour
- American Graffiti (Georges Lucas, 1973) - Entre montée du droit au plaisir et épuisement d'un certain humanisme
- Phantom of the Paradise (Brian de Palma, 1974) - Il n'y a pas qu'une puissance souveraine de l'art, mais deux, qui ne peuvent que naître et mourir en même temps
- Amarcord (Federico Fellini, 1974) - Où une fiction circulaire scelle l'alliance autobiographique du cinéma avec un "je"
- Mariken van Nieumeghen (Jos Stelling, 1974) - Plus la transgression est excessive, et plus elle reconduit le cycle de la dette
- L'Horloger de Saint Paul (Bertrand Tavernier, 1974) - quand la mise en acte d'une justice inconditionnelle, non négociable, appelle une solidarité sans réserve
- L'hypersensibilité tragique d'Edvard Munch est l'écho de notre époque (La Danse de la vie, film de Peter Watkins, 1974)
- Pour un homme, faire jouir une femme est un plaisir sans limite; on peut tout donner pour cela, y compris son sexe, sa vie ("L'Empire des Sens", film de Nagisha Oshima, 1976)
- Le locataire (Roman Polanski, 1976) - Le défaut absolu d'hospitalité conduit à la folie, au suicide
- Trás-as-Montes (Antonio Reis & Margarida Cordeiro, 1976) - "Il faut que je te porte", dit la terre - et tu répéteras le cycle
- Trois femmes (Robert Altman, 1977) : En laissant à la femme silencieuse son lieu, son pouvoir, on peut se dégager des rôles, des stéréotypes sexuels et sociaux
- Rencontres du troisième type (Steven Spielberg, 1977) - D'où reviennent les morts, au-delà de l'être, c'est là qu'il faut aller
- Halloween (John Carpenter, 1978) - Insensible, muette, masquée, sans cause ni raison, la figure du mal s'en prend prioritairement à sa propre famille
- La chambre verte (François Truffaut, 1978) - Perpétuer le deuil comme tel, en jouir, c'est le nier : en s'appropriant les morts, on exerce sur eux pouvoir et souveraineté
- Passe-montagne (Jean-François Stévenin, 1979) - Dire oui à l'amitié - jusqu'à bâtir l'oiseau de bois, au confluent de la combe magique
- Stalker (Andreï Tarkovski, 1979) - "Viens!" dit le lieu sans vérité, sans contenu, qui en appelle aux croyances sans les déterminer
- Stardust Memories (Woody Allen, 1980) - Là où je signe, j'accepte de mourir, mais là où je ne signe pas, pour longtemps, je suis encore vivant
- Que le spectacle commence! (Bob Fosse, 1980) - On ne peut pas se préparer à la mort, tout ce qu'on peut faire, c'est en exiger toujours plus, plus encore que la vie
- Le marchand de Venise, de Shakespeare (Jack Gold, 1980) - En se soustrayant à la logique de l'échange, le Juif perd tout, il est absolument exproprié, y compris de sa propre identité
- La mort en direct (Bertrand Tavernier, 1980) ou l'œil-caméra comme système d'aveuglement, qui ne fonctionne que pour mettre à mort ce qu'il filme
- Dans "Blow Out" (Brian de Palma, 1981) est à l'oeuvre une déconstruction de la greffe audio-visuelle : démontée, mise en scène dans son impossibilité, elle est réinscrite dans le fantasme
- My dinner with Andre (Louis Malle, 1981) - Je voudrais apprendre à vivre, enfin
- Passion (Jean-Luc Godard, 1982) - Faire film de l'aporie, c'est-à-dire du désert
- Fitzcarraldo (Werner Herzog, 1982) - Où l'économique et l'anéconomique se brouillent et se confondent dans la même démesure, la même circularité fantasmagorique
- Zelig (Woody Allen, 1983) - L'identité de celui dont l'identité est de ne pas en avoir est aussi une identité, celle qui oblige à vivre dans l'aporie
- Mémoires d'un Juif tropical (Joseph Morder, 1984) - Il aura fallu dire "Je suis mort" pour que commence la vie en plus, la vie supplémentée par l'oeuvre, plus que la vie
- Shoah, le film de Claude Lanzmann (1985) témoigne de l'impossibilité du deuil
- Manhunter (Michael Mann, 1986) (Le sixième sens) - Pour jouir du regard, il faut tuer
- Le rayon vert (Eric Rohmer, 1986) - Pour qu'advienne le "oui", il faut se laisser aller à un cheminement vide, vacant, et implorer
- Bagdad Café (Percy Adlon, 1987) - Le salut par l'initiative, la compétence et le savoir, venus de l'étranger
- Hôtel de France (Patrice Chéreau, 1987) - Les pères s'effacent, plus rien ne soutient les fils, il n'y a plus ni sujets, ni amis, ni amants
- "Gens de Dublin" ou "The Dead" (John Huston, 1987) - le film qui fait entendre la phrase : "Je suis mort"
- L'arbre mort (Joseph Morder, 1987) - Pour faire un couple comme pour faire un film, il faut multiplier les deuils
- L'homme d'aujourd'hui, ce fantôme, ne sert d'appui que si sa présence s'évanouit (La vengeance d'une femme, film de Jacques Doillon, 1989)
- "Az én XX. századom" (Ildiko Enyedi, 1989) "Mon vingtième siècle" est double - et je peux jouer, dans le plaisir et la douleur, sur cette duplicité
- The Unbelievable Truth (Hal Hartley, 1989) (L'incroyable vérité) - Une rupture dans la chaîne d'endettement, ça rend libre, il est incroyable que ça puisse arriver
- Il arrive qu'une famille divisée s'unisse - mais pour le malheur (Family Business, film de Sidney Lumet, 1989)
- On ne me propose plus qu'un seul chemin, celui du bavardage vide (Palombella Rossa, film de Nanni Moretti, 1989)
- Le Graal est une autre identité, une identité d'ailleurs (Indiana Jones et la dernière croisade, film de Steven Spielberg, 1989)
- S'en fout la mort (Claire Denis, 1990) - il faut, pour excéder la cruauté, recueillir sa force, la transformer sans rien qui puisse la compenser : ni argent, ni amour, ni gain, ni perte
- Le syndrome asthénique (Kira Mouratova, 1990) - Affirmer son soi par destruction du propre
- "La belle Noiseuse" (film de Jacques Rivette, 1991) démontre l'impossibilité de l'art, et creuse son tombeau
- City of Hope (John Sayles, 1991) - Jamais les excuses ni les regrets ne sont à la hauteur du mal fait
- Je sauve mon fils pour qu'il me reconnaisse
- L'"aimance" tient à cela qu'il vaut mieux aimer, même dans la dissymétrie entre l'aimé et l'être-aimé, et même en aimant un mort - Poison Ivy (film de Katt Shea, 1992)
- La position du père étant devenue intenable, on ne peut faire semblant de la tenir qu'au prix d'une permutation avec le fils ("Hook", La revanche du capitaine Crochet, Spielberg, 1992)
- Trop rouge le sang des meurtres, trop politique la douleur du viol, trop beau le film sur la violence ("La reine Margot", film de Patrice Chéreau, 1994)
- La violence politique est pire qu'un viol (La Reine Margot, Patrice Chéreau, 1994)
- Il y a de la violence dans tout geste de filmer, et de la cruauté dans tout cinéma documentaire ("Délits flagrants", film de Raymond Depardon, 1994)
- En répétant deux fois son nom dans le titre "JLG/JLG", Jean-Luc Godard redouble l'écho de sa propre voix ("Autoportrait de décembre", film de 1994)
- Vanya on 42nd Street (Louis Malle, 1994) - Ni fiction, ni documentaire, ni théâtre, ni cinéma, ni genre déterminé - aporétique comme la mort
- Passions (Kira Mouratova, 1994) - Il faut des femmes imprévisibles, illogiques, irrécupérables, pour créer entre les mondes d'autres liens
- Sur la route de Madison (Clint Eastwood, 1995) - Je m'adresse à mes enfants pour leur dire : même si ce n'est qu'un rêve, un fantasme, il faut acquiescer
- Showgirls (Paul Verhoeven, 1995) - Sexe et pouvoir, à l'état nu, se montrent indissociables
- Voyage au début du monde (Manoel de Olivera, 1996-97) - Le monde ancien se vide
- Généalogies d'un crime (Raoul Ruiz, 1996) : monstrueux le fils obligé d'assassiner une mère déjà morte, un père déjà suicidé, au prix de sa vie
- Lone Star (John Sayles, 1996) - Où l'inceste, étranger à la chaîne des dettes et des corruptions, peut sembler réparateur
- Au cinéma, la voix pure, séparée du corps, est porteuse de sainteté ("Breaking the Waves", film de Lars Von Trier, 1996)
- Pas de plaisir sans timidité, et sans éradication de la timidité [Le plaisir (et ses petits tracas), film de Nicolas Boukhrief, 1997]
- Dans "Lost Highway" (film de David Lynch, 1997), une figure de défilement routier fait le lien entre les éléments d'un récit dont la diffraction est irréductible
- Ce que j'ai de plus singulier a déjà été dit par la voix la plus courante : celle de la chanson ("On connait la chanson", film d'Alain Resnais, 1997)
- "Il faut œuvrer", à condition que l'œuvrance reste suspendue à l'indécision ("Good Will Hunting", film de Gus Van Sant, 1997)
- Il faut préserver le rapport sexuel, car c'est le seul rempart contre un ennui mortel ("L'ennui", film de Cédric Kahn, 1998)
- Festen (Thomas Vinterberg, 1998) - S'agissant d'inceste, la confession passe par l'autre
- Aujourd'hui les pères sont des losers, il est temps qu'ils disparaissent pour laisser la place au père idéal - c'est-à-dire mort (American Beauty, film de Sam Mendes, 1999)
- "Nous sommes sortis de l'ère de l'abandon, espérons que nous rentrons dans l'ère de l'hospitalité" (Les Noces de Dieu, film de Joao Cesar Monteiro, 1999)
- La captive (Chantal Akerman, 2000) - Dans une vacuité absolue, il cherche en elle un secret inavouable
- Memento (Christopher Nolan, 2000) : "Il faut que tu te souviennes, même si, dans la pure présence, tu ne peux te souvenir que de rien"
- Pour être juif et laïc, il faut s'adresser à l'étranger qui est en soi (Dieu est grand, je suis toute petite, film de Pascale Bailly, 2001)
- Blue Velvet (David Lynch, 2001) - En rêve ou en fantasme, je reste engagé, inconditionnellement, envers l'autre : son monde est anéanti, il faut que je la porte
- La ciénaga (Lucrecia Martel, 2001) - Une désagrégation où l'humain, dans son opposition chimérique à l'animal, se déconstruit lui-même
- "L'homme sans passé" (Aki Kaurismäki, 2002) - Par la grâce d'une amnésie purificatrice qui annule les fautes, innocente, immunise du passé - on peut recevoir le pardon
- Huit Femmes (François Ozon, 2002)
- L'Arche russe (Alexandre Sokourov, 2002) - L'oeil invisible qui, en voix off, scrute l'histoire de la Russie
- Memories of Murder (Bong Joon-ho, 2003) : "Trouver le coupable, c'est impossible, mais ne pas trouver de coupable, c'est intenable, insupportable"
- Adieu (Arnaud des Pallières, 2003) - Sans hospitalité, il n'y a ni promesse, ni altérité, ni avenir
- Rengeteg (Benedik Fliegauf, 2003) - [Forest] - Il faut raconter la singularité excessive de l'autre pour faire sentir son altérité infinie
- Vous n'y pouvez rien, vos fils vous sont étrangers, même s'ils sacrifient leur coeur pour vous (L'intrus, film de Claire Denis, 2004)
- Par sa voix, la chanteuse baroque réunit la vie (l'autre vivant) et la mort (sa propre mort) (Pont des Arts, film d'Eugène Green, 2004)
- Le nazisme ordonne aux fils d'assassiner leurs pères et condamne les enfants à suivre leurs pères dans la mort (La Chute, Oliver Hirschbiegel, 2004)
- Après tout, malgré tout ce qu'on prétend, il n'est pas impossible d'être père! (Broken flowers, film de Jim Jarmusch, 2004)
- La Sainte Fille (Lucrecia Martel, 2004) - Il ne s'agit pas d'infliger au fautif une punition, mais de pardonner pour sauver - en se sauvant soi-même
- Nous sommes protégés par une immunité quasi-miraculeuse, qui tombe du ciel (La guerre des mondes, film de Steven Spielberg, 2004)
- L'immoralité paie, si elle est soutenue par le hasard (Match point, film de Woody Allen, 2005)
- En parasitant notre perception, la trace d'un film se projette sur d'autres surfaces (En suivant la main droite de Kim Novak in "Kiss me stupid", Pierre Bismuth, 2005)
- "Mon père, pour moi, était mort dès le départ" (Les lois de la famille, film de Daniel Burman, 2005)
- On peut jouir d'un seul coup, en une seule fois, la jouissance de toute une vie ("Gabrielle", film de Patrice Chéreau, 2005)
- Goya, artiste, personnifie les paradoxes et contradictions insurmontables de la modernité (Le fantôme de Goya, film de Milos Forman, 2005)
- Entre tous les passés et les futurs possibles, il est impossible de trancher (L'immeuble Yakoubian, film de Marwan Hamed, 2005)
- Si la mémoire de la guerre d'Algérie se transmet, c'est par des traumas qui restent secrets, inavoués (Caché, film de Michael Haneke, 2005)
- Truman Capote prétendait sauver les tueurs; il n'a même pas réussi à se sauver lui-même (film de Bennett Miller, 2005)
- "Zidane" (le film de Philippe Parreno et Douglas Gordon, 2006), a pour thème l'omniprésence du corps et de la voix
- Rien ne peut arrêter une femme qui veut démontrer l'impuissance masculine (Boarding Gate, film de Olivier Assayas, 2006)
- On ne peut se venger que par un fantasme parfait (La tourneuse de pages, film de Denis Dercourt, 2006)
- Dans ce monde de médusation générale, nous flottons ("Les Méduses", film de Etgar Keret et Shira Geffen, 2006)
- Nul n'est indifférent à sa filiation (Le voyage en Arménie, film de Robert Guédiguian, 2006)
- One night stand (Emilie Jouvet, 2006) - Les deux mots hymen et lesbienne riment, ils s'aiment
- Avec la Shoah, la vie s'est arrêtée : il ne reste plus que des survivants (Etre sans destin, film de Lajos Koltai, 2006)
- On peut mettre en film le pur plaisir d'être une femme ("Caramel", de Nadine Labaki, 2006)
- Le seul homme qui vaut la peine - "il faut qu'il meure" (La fille coupée en deux, film de Claude Chabrol, 2007)
- Complaisamment j'exhibe toutes les facettes de mon image, afin de protéger mon secret ("I'm not there", film de Todd Haynes, 2007)
- Le pharmakon s'exhibe ("Bleu Remix", de Yann Marussich, 2007)
- Un frère mort, disparu, peut gouverner une vie et peut aussi induire une philosophie ("Un secret", film de Claude Miller, 2007)
- Pour montrer la figure de l'horreur, il faut prendre ses distances, dynamiter les genres ("Valse avec Bachir", film d'Ari Folman, 2008)
- L'idiot (Pierre Léon, 2008) - La souveraine innocence de l'amour inconditionnel face à la femme bafouée, envoûtante, souveraine elle aussi, qui calcule son plaisir
- La structure de l'image filmique est testamentaire : pour témoigner d'une date unique, singulière, elle la répète, la cite, la réduit en cendres (Cloverfield, Matt Reeves, 2008)
- Cloverfield (Matt Reeves, 2008) - Un film présuppose un archi-décalage impossible à montrer : l'écart filmique comme tel
- La collision de mondes clos n'ouvre ni avenir, ni survie (Ajami, film de Scandar Copti et Yaron Shani, 2010)
- Après tout, ce n'est pas un crime de vouloir rester jeune (La Comtesse, Julie Delpy, 2010)
- L'étrange affaire Angélica (Manoel de Oliveira, 2010) : l'ange vivant de la mort appelle le photographe, il lui donne accès à un monde sans deuil, ni devoir, ni dette
- Hospitalité (Koji Fukada, 2010) - Une expérience d'hospitalité, même forcée, ça peut faire du bien
- Winter's Bone (Debra Granik, 2010) - Malgré les échecs, les refus, les démentis, persiste une confiance mystérieuse en l'autre
- I wish I Knew, histoires de Shangaï (Jia Zhang-Ke, 2010) - Il n'y a pas une histoire de Shangaï, mais des histoires divergentes, dont aucune ne conduit au présent d'aujourd'hui
- My Joy (Sergueï Loznitsa, 2010) - Un pouvoir qui oblige à décliner son identité jusqu'à la perte totale du nom - c'est le mal radical
- Inception (Christopher Nolan, 2010) - Il faut, pour surmonter sa culpabilité, faire l'expérience de l'impossible
- "Hatufim" (série israëlienne de Guideon Raff, 2010-2012) - Par sa perte absolue d'identité, la situation du prisonnier de guerre radicalise celle du soldat
- Oncle Boonmee (Apichatpong Weerasethakul, 2010) - Il s'est souvenu d'autres vies et d'autres mondes qu'il a portés; un autre vivant surviendra, peut-être, pour les porter à nouveau
- Belle Epine (Rebecca Zlotowski, 2010) - Se faire orpheline, exposée au danger, pour que s'invente une autre alliance
- Il est "minuit à Paris" et la différance, insistante, fait craquer les couples (Minuit à Paris, Woody Allen, 2011)
- The Strange Thing About the Johnsons (Ari Aster, 2011) - Pour échapper au jugement, il ne suffit pas que l'autre prenne sur lui tout le poids de la faute
- Dans le "Hors-Satan" de Bruno Dumont (2011), rien ne permet de prendre ses distances à l'égard des clichés les plus conventionnels
- Dans "Le cheval de Turin", film de Béla Tarr (2011), le monde qui s'efface ouvre sur un néant inconnu, absolument indéterminé
- Dans le film "Melancholia" de Lars von Trier (2011), il y a quelque chose de nazi : l'entrée en scène d'un monde absolument dépourvu d'avenir
- En échange de notre survie, nous honorons les rendez-vous qui nous sont donnés - jusqu'à épuisement (Holy Motors, film de Leos Carax, 2012)
- No more money, no more sex, no more power, no more future" (Cosmopolis, film de David Cronenberg, 2012)
- Dans "Camille Claudel 1915" (film de Bruno Dumont, 2012), rien ne transpire du secret de Camille; c'est ce qui fait la beauté irremplaçable du film, et aussi sa faille
- Le "Grand Soir" (film de Kervern et Delépine, 2012) est un jour vide, désespéré, point d'aboutissement d'un monde (et d'un cinéma) sans contenu psychologique ni filiation
- On ne paie jamais pour ses propres fautes, mais pour celles d'un autre (Shozukai, film de Kiyoshi Kurosawa, 2012)
- Dans "Oslo, 31 août" (film de 2012), Joachim Trier montre qu'une vie sans filiation reste entre deux morts
- Le film d'Abdellatif Kechiche, "La vie d'Adèle" (2013), montre une bouche-hymen qui mange, lèche, suce, jouit, parle, enseigne et pleure - sans réussir à vivre
- Pour chaque jeune fille, se pose pour la première fois, à nouveaux frais et singulièrement, l'énigme de la sexualité ("Jeune et jolie", film de François Ozon, 2013)
- Même en l'absence de deuil, je porte en moi le monde de l'autre : "C'est l'éthique même" (Une belle fin, film de Uberto Pasolini, 2013)
- Le film "Effets secondaires" de Steven Soderbergh (2013) est construit pour qu'on ne puisse en tirer aucune conclusion définitive : un thriller aporétique
- Dans "Bird People" (film de Pascale Ferran, 2014), le moineau est la figure médiatrice qui invite à se transformer - en-deça de toute décision et au-delà de toute souveraineté
- Birdman, ou La surprenante Vertu de l'Ignorance (film d'Alejandro González Iñárritu, 2014) : "Je suis le pharmakon qui me hante"
- Boyhood (Richard Linklater, 2014) - Entre une vie, un récit, une fiction, les bordures sont vivantes : incertaines, changeantes, imprévisibles
- L'étreinte du serpent (Ciro Guerra, 2015) - Les traces des civilisations disparues appellent un deuil inarrêtable, une hantise infinie, qu'aucun savoir ne peut effacer
- Senses 1 & 2 (Ryusuke Hamaguchi, 2015) - Il reste aux femmes qui se retirent de la domination masculine à vivre dans l'incertitude
- Vers l'autre rive (Kiyoshi Kurosawa, 2015) - Il faut, pour un deuil, partager la mémoire, la parole, le corps et les secrets du mort
- Dans le film "Manifesto", de Julian Rosefeldt (2015), c'est l'art en personne qui déclare, à travers ses manifestes : "Sauf l'art, rien ne peut être sauvé"
- "Le ciel du Centaure" (Hugo Santiago, 2015) : un film qui, pour se faire Œuvre de cinéma, doit être lu, entendu, expliqué, transmis, interprété, admiré
- Everything will be fine (Wim Wenders, 2015) - Vivre avec la contre-signature de l'autre
- Personal Shopper (Olivier Assayas, 2016) - Un cumul de dédoublements, d'incertitudes, de flottements, pour un film sans colonne vertébrale qui circule entre les genres
- La La Land (Damien Chazelle, 2016) - Une rencontre fatale et impossible entre deux gardiens de l'inconditionnel
- Délivrée du phallique, la sexualité féminine peut se saisir de la chair (Grave, film de Julia Ducournau, 2016)
- Il faut, quand le phallocentrisme se désagrège, "rester vertical" sans la prothèse d'une érection, sans le prétexte d'un ordre social (film d'Alain Guiraudie, 2016)
- Paterson (Jim Jarmusch, 2016) - La poésie qui reste, c'est le don d'une page vierge où écrire son secret
- Le secret de la chambre noire (Kiyoshi Kurosawa, 2016) - En photographiant ceux qu'on aime, on les tue, et ce meurtre déclenche une cascade de culpabilité, de folie et de mort
- Il aura fallu, pour entendre le témoignage de l'autre, donner la mort au Christ muet ("L'ornithologue", film de João Pedro Rodrigues, 2016)
- La mort de Louis XIV (Albert Serra, 2016) - Seul un autre peut dire, à la place du "je" souverain : "Moi, je suis mort"
- Rebecca Zlotowski montre dans son film "Planétarium" (2016) qu'au cinéma, la surenchère du "Je suis mort" ne s'arrête jamais
- Barbara (Mathieu Amalric, 2017) - Une hétérobiographie où, autour du secret préservé de l'autre, prolifèrent les autobiographies
- Phantom Thread (Paul Thomas Anderson, 2017) - Le fil invisible, ou la caméra comme hymen
- Mother! (Darren Aronovski, 2017) - Un Christ déjà mort, sacrifié avant même sa naissance, anéantit l'avenir
- Tesnota, une vie à l'étroit (Kantemir Balagov, 2017) - Par les brèches de la famille, les fissures de la communauté, s'insinue une extériorité irréductible
- 120 battements par minute (film de Robin Campillo, 2017), une tragédie hétéro-thanato-graphique : "Tu es en deuil de toi-même, il faut que je te porte"
- "Une vie violente", film de Thierry de Peretti (2017) - ou le militantisme comme tragédie sacrificielle
- (Se) laisser dire "Je suis morte" n'est pas sans risque! Et si l'on vous croyait (Les fantômes d'Ismaël, film d'Arnaud Desplechin, 2017)
- "Corps et âme" (Ildiko Enyedi, 2017) : Il faut choisir librement ce qui, déjà, en secret, habite nos rêves
- Le goût du ciment (Ziad Kalthoum, 2017) - Du vacarme de la guerre, on ne peut rien dire : elle ne répond pas
- The Third Murder (Hirokazu Kore-Eda, 2017) - Le jugement final, c'est que nul ne peut témoigner de la vérité
- Demain et tous les autres jours (film de Noémie Lvovsky, 2017) : "Dans sa folie, ma mère m'a fait le plus beau des dons : l'exigence d'une responsabilité infinie"
- Le destin de Laura Palmer ne diffère pas de celui des autres personnages : morts, mais toujours présents (Twin Peaks, série de David Lynch, 1989-90)
- Ayer maravilla fui (Gabriel Mariño, 2017) - Chaque jour ton corps change, tu es la même personne sans l'être et tu peux te réveiller tout.e autre
- Milla (Valérie Massadian, 2017) : une alliance réitérée : "La vie le mort" / "le mort la vie"
- L'Éloge du rien (Boris Mitić, 2017) - Une voix parle au nom du Rien (comme si tous les riens, la multiplicité des riens, ne pouvaient se rapporter qu'à ce Rien unique, en ruine)
- L'amant double (François Ozon, 2017), ou : "Je suis double mais l'autre en moi, mon jumeau, est déjà mort" - un dédoublement qui ne franchit pas la limite du "deux"
- Mariana (Marcela Said, 2017) "Vous êtes tous des criminels, je veux bien vivre parmi vous, mais je ne vous ferai pas d'enfants"
- Le Vénérable W. (Barbet Schroeder, 2017) - à la jonction, incalculable, du mal et du politique
- Menashe (film de Joshua Z. Weinstein) : "Dès que je m'efforce de la respecter, la loi défaille"
- Les Heures sombres (Joe Wright, 2017) - Les décisions majeures s'imposent d'elles-mêmes; aucun calcul, raisonnement ni intérêt ne suffit à les justifier
- "Puisque je suis déjà mort, je n'ai pas d'autre solution que de disparaître", se dit le petit Aliocha dans "Faute d'amour", film d'Andreï Zviaguintsev (2017)
- Doubles Vies (Olivier Assayas, 2018) - Dans l'univers vide des lieux communs, le littéraire et le politique font exception, mais sur le mode de la comédie
- Hérédité (Ari Aster, 2018) - Il aura fallu, pour que le fils prenne la place de l'antéchrist, carboniser le père, décapiter les femmes, réduire le logos en cendres
- Mes Provinciales (Jean-Paul Civeyrac, 2018) - Les seuls amis qui me restent sont ceux qui ne répondent pas
- L'Homme qui tua Don Quichotte (Terry Gilliam, 2018) - ce qui, en plus d'un film, reste d'un tournage : le destin bouleversé des acteurs d'occasion
- Leave no trace (Debra Granik, 2018) - Un commandement impératif, absolu, mais qui ne vaut que pour le père, pas pour la fille
- Les Oiseaux de passage (Ciro Guerra, Cristina Gallego, 2018) - Où le cycle de la dette est corrompu, ruiné, asservi aux commerces de la drogue et du cinéma
- Asako I et II (Ryūsuke Hamaguchi, 2018) : quand l'amour se décide, la trace se retire, elle s'efface - il faut plonger dans l'incertitude
- Voyage à Yoshino (Naomi Kawase, 2018) (Vision) - Qu'il est beau ce pharmakon! Qu'elle est belle cette apocalypse!
- In my room (Ulrich Köhler, 2018) - Ne regrettons pas ce monde disparu, et ne le reproduisons pas
- Capharnaüm (Nadine Labaki, 2018) - On ne peut répondre à la cruauté, inexplicable et injustifiable, que par un au-delà de la cruauté, tout aussi inexplicable et injustifiable
- Paul Sanchez est revenu! (Patricia Mazuy, 2018) - On ne peut ni s'approprier une signature, ni usurper un nom innocemment
- "Sleep well" (Jean-Luc Nancy, 2018) - Seul un vivant peut dire : "Je suis mort"
- Climax (Gaspar Noé, 2018) : la version hip hop du Geschlecht, sa corruption et sa dislocation
- Trois visages (Jafar Panahi, 2018) - Tout commence par un appel, "Je suis morte" : pour que le visage qui précède introduise à celui qui, déjà passé, reste à venir
- Heureux comme Lazzaro (Alice Rohrwacher, 2018) - Tu répondras à l'autre, dans l'irresponsabilité la plus absolue
- En liberté (Pierre Salvadori, 2018) - L'innocence exige une réparation aussi grandiose ou monstrueuse que la faute - et aussi le retour à l'ordre et à la loi
- Leto (Kirill Serebrennikov, 2018) - Dans leur bulle, inutiles et irrécupérables, les héros de la scène rock sont plus moraux encore que la moralité
- Ready Player One (Steven Spielberg, 2018) - Un film ne peut se présenter comme réel, virtuel, fantastique ou autre que parce qu'il est indiciel, indicatif
- Le lion est mort ce soir (Nobuhiro Suwa, 2018) - Au cinéma, l'impossible, c'est jouer sa propre mort
- Les étendues imaginaires (Siew Hua Yeo, 2018) - Un monde clos dont les bords ne s'étendent qu'au prix d'une étrange et incontrôlable transformation
- Subject to Review (Theo Anthony, 2019) - où la décision juste, crédible, ne repose plus sur le témoignage mais sur la trace calculable
- Marriage Story (Noah Baumbach, 2019) : les pleurs de l'homme déchu, en deuil de New York, sa culture, sa sophistication, son théâtre, son épouse et son fils
- Ne croyez surtout pas que je hurle (Frank Beauvais, 2019) - Il faut, pour se débarrasser d'une addiction aux écrans, faire un film
- Parasite (Bong Joon-Ho, 2019) - Il n'y a pas de limite légitime au parasitage, pas de ligne qui ne puisse être franchie
- The Lighthouse (Robert Eggers, 2019) - Une force excessive, inquiétante, souveraine, s'impose sans considération ni pour la vie, ni pour la mort, ni pour la crédibilité du récit
- Séjour dans les monts Fuchun (Gu Xiaogang, 2019) : Lier par de longs travelings les lieux fragmentés de la dette, de l'économie et de l'échange - une autre éthique qui vient
- The Souvenir Part I et II (Joanna Hogg, 2019-2021) - Il est impossible d'arrêter le mouvement de la mimesis
- First Cow (Kelly Reichardt, 2019) - Au-delà de tout calcul, une promesse d'amitié peut enjamber deux siècles
- Camille (Boris Lojkine, 2019) - "Il faut mourir vivant", dit la photoreporter - il en résulte, pour l'autre, un film et d'autres traces
- Les Misérables (Ladj Ly, 2019) - Le souverain de banlieue, ce jeune (lionceau) incontrôlable, introduit l'imprévisible, l'incalculable, dans le lieu clos de la cité
- Papicha (Mounia Meddour, 2019) - Pour résister aux pulsions de mort, de cruauté, il faut la pure gratuité de l'ornement féminin
- Mother, I Am Suffocating. This Is My Last Film About You (Lemohang Jeremiah Mosese, 2019) - J'ai une patrie, mais ce n'est pas la mienne
- Hors Normes (Eric Toledano et Olivier Nakache, 2019) - Au vivant étranger au monde commun de la biopolitique, on ne peut répondre que par l'exception : "Je dois te porter"
- Lux Æterna (Gaspar Noé, 2019) - Où l'on laisse à voir et entendre que tout film est fondé sur le sacrifice de la femme par des morts-vivant
- Joker (Todd Phillips, 2019) - A la puissance démesurée des financiers et des médias, l'exclu ne peut répondre que par une autre force exceptionnelle : le rire du clown
- Uncut gems (Benny and Josh Safdie, 2019) - L'argent-voyou, qui semble exonéré et exonérer de toute dette, appelle la chance et porte la malédiction
- Dieu existe, son nom est Petrunya (Teonia Strugar-Mitevska, 2019) (God Exists, Her Name Is Petrunija) - Tragi-comique, scandaleux, inéluctable, l'événement qui fait de Dieu une femme
- "It must be heaven" (Elia Suleiman, 2019) - Puisque le monde ne répond plus, je ne peux l'interroger qu'en parfait étranger, par le langage pur du cinéma
- Adam (Maryam Touzani, 2019) - Le regard d'une petite fille sur une hospitalité qui oblige, dans un monde où le nouveau-né doit être abandonné
- Douze mille (Nadège Trebal, 2019) - Sans une autre économie, un autre type d'alliance et d'altérité, il ne peut pas y avoir de compte juste
- Sans signe particulier (Fernanda Valadez, 2019) - Quand le mal radical répond, c'est dans la langue intraduisible d'un sacrifice irréversible
- Possessor (Brandon Cronenberg, 2020) - Qui parasite l'autre prend le risque d'être parasité par l'autre
- "Suis-moi, je te fuis" et "Fuis-moi, je te suis" (Koji Fukada, 2020) - Archi-amour : ce sont tes dettes que j'acquitte, sans condition ni justification, au bénéfice d'un tiers
- Onoda (Arthur Harari, 2020) - Où la folie souveraine se réalise comme fantasme d'invincibilité
- Je veux juste en finir (Charlie Kaufman, 2020) - À tout ce qu'on voulait faire de moi, j'ai acquiescé, mais on ne peut pas m'empêcher de dire "je"
- Le genou d'Ahed (Nadav Lapid, 2020) - Quand le consentement meurtrier, banalisé, ne dérange plus personne, la responsabilité devient un danger mortel
- Tenet (Christopher Nolan, 2020) - Là où ça décide, dans l'avenir, bénédiction et malédiction se confondent
- Last Words (Jonathan Nossiter, 2020) - Au final, c'est le cinéma qui détient le dernier mot, car au-delà de toutes les destructions, il porte encore la promesse
- Le diable n'existe pas (Mohammad Rasoulof, 2020) - Refuser la peine de mort exige un engagement démesuré, illimité, incompatible avec quelque transaction que ce soit
- Let them All Talk (Steven Soderbergh, 2020) [La grande traversée] - Entre l'œuvre, la vie, la mort, la frontière reste indécise
- Un soupçon d'amour (Paul Vecchiali, 2020) - "Il faut que je te porte" - à l'adresse d'un mort, cette phrase est mortifère
- Drunk (Thomas Vinterberg, 2020) - L'alcool peut aussi, parfois et sans prévenir, se faire pharmakon
- Licorice Pizza (Paul Thomas Anderson, 2021) - Un film où l'acquiescement à l'autre déclenche le mouvement gratuit, imprévisible, de l'"aimance"
- Tromperie (Arnaud Desplechin, 2021) - Une séduction verbale, oblique, indirecte, instaure une liaison trompeuse, décevante, déprimante - mais jouissive
- Amira (Mohamed Diab, 2021) - Il suffit d'une goutte de sperme pour que s'efface la fiction d'une appartenance pure, indéniable
- France (Bruno Dumont, 2021) - Derrière le regard circulaire du système des médias, il y a des pleurs - impossibles à cacher, étouffer, réprimer, arrêter, surmonter
- Tres (Juanjo Giménez Peña, 2021) - Pour que du nouveau émerge, il faut une désynchronisation, un décalage, qui relance la dialectique entre l'Autrefois et le Maintenant
- The Lost Daughter (Maggie Gyllenhaal, 2021) - S'auto-punir en s'emparant, par un geste de cruauté impardonnable, de la poupée perdue d'une petite fille abandonnées
- Earwig (Lucile Hadzihalilovic, 2021) - Dans un film-cauchemar, la petite fille se retire après avoir payé le prix des blessures, cicatrices et souffrances que les autres se sont infligées
- Bad Luck Banging Or Loony Porn (Radu Jude, 2021) - Se débarrasser de l'obscène, le cacher, éviter de le rendre public, telle est la morale dont il faut prendre le contre-pied
- Compartiment N°6 (Juho Kuosmanen, 2021) - Un désir unique, singulier, déclenché par la rencontre improbable, indécise, de deux solitudes
- Vortex (Gaspar Noé, 2021) - Mourir déjà mort (ou presque), sans laisser de trace, altère la possibilité du deuil
- The Card Counter (Paul Schrader, 2021) - Pour un crime sans borne ni mesure, il n'y a pas d'expiation ni de compensation possible
- Julie (en 12 chapitres) (Joaquim Trier, 2021) - Il faut garder l’avenir ouvert, sans préjuger de ses conséquences ni s’enfermer dans une définition préalable du bien et du mal
- Trouble-fête (Alina Yklymova, 2021) - On ne peut défendre un "chez soi" contre la puissance phallique qu'en participant de cette puissance
- Burning Days (Emin Alper, 2022) - Nul n'est innocent, il y a toujours un gouffre dans lequel chuter
- Alma viva (Cristèle Alves Meira, 2022) - "Il faut que je te porte", pour que tu m'ouvres les yeux
- White Noise (Noah Baumbach, 2022) - La déconstruction ordinaire, sans réponse, ça peut se consommer sans déplaisir, mais pas sans angoisse
- Esterno notte (Marco Bellocchio, 2022) - À l'acmé de la violence, du calcul politique qui voue Aldo Moro au sacrifice, se pose la question de l'au-delà du pouvoir, du politique
- Coma (Bertrand Bonello, 2022) - En espérant que d'une pure intériorité, dans les limbes réticulaires de l'apocalypse, quelque chose pourra surgir
- Les Amandiers (Valeria Bruni-Tedeschi, 2022) - Une série de mises en abyme se recouvrent, s'étendent, s'excèdent, s'imposent comme sources de lecture et d'autorité
- Retour à Séoul (Davy Chou, 2022) - Du seul moment qui compte, la naissance, on ne peut rien dire ni rien se remémorer
- Avec amour et acharnement (Claire Denis, 2022) - Vivre sous la contrainte d'un devoir d'amour, un archi-amour indéterminé, insaisissable
- Tout le monde aime Jeanne (Céline Devaux, 2022) - Il vaut mieux, pour se dégager du deuil, choisir le pas de côté qui éloigne du réel
- Saint Omer (Alice Diop, 2022) - À une exigence de fidélité venue d'ailleurs, des ascendants ou d'Afrique, on ne peut répondre que par un sacrifice, ou à défaut en pleurant
- Blonde (Andrew Dominik, 2022) - S'appuyer sur le mythe le plus courant (Marilyn Monroe) pour inventer un autre référent (Norma Jean Baker), tout aussi mythique
- Tár (Todd Field, 2022) - Un pouvoir uniquement fondé sur l'affirmation charismatique de soi-même se met dans la dépendance absolue d'autrui
- Il Buco (Michelangelo Frammartino, 2022) - On peut pallier, par l'oeuvre, à la perte d'un regard unique, irremplaçable
- Athena (Romain Gavras, 2022) - Entre des fraternités inconciliables, il faut choisir; qui tente de les concilier les paralyse, les ignore, détruit la fraternité même
- The Banshees of Inisherin (Martin McDonagh, 2022) - Faire payer à l'autre l'écart entre vie courante et œuvre, entre survie et sur-vie
- R.M.N. (Cristian Mungiu, 2022) - Accueillir l'étranger, c'est ce qui peut déclencher la haine la plus insensée, le rejet le plus délirant
- Godland (Hlynur Palmason, 2022) - Quand s'effondrent les limites, les parerga, rien ne peut arrêter la violence originelle, inouïe
- Aucun ours (Jafar Panahi, 2022) - En jouant son propre effacement, le réalisateur revendique et assume sa responsabilité
- Decision to Leave (Park Chan-wook, 2022) - Un fantasme de flic où les fautes, les crimes et les trahisons se déplacent, se croisent et se neutralisent, sans jamais s'annuler
- Leonor will never die (Martika Ramirez Escobar, 2022) - Une grand-mère pour toujours sur le point de mourir, sans franchir le pas
- Showing Up (Kelly Reichardt, 2022) - Un cinéma brut pour un art horizontal, au plus proche de la terre et des tracas quotidiens
- Feu Follet (Joao Pedro Rodrigues, 2022) - L'amour homosexuel, tenant-lieu de République fraternelle
- La Montagne (Thomas Salvador, 2022) - Laisser venir l'hybride à même le corps, hors discours
- Désordre (Cyril Schäublin, 2022) - La double exigence du balancier, entre incalculabilité du travail et calculabilité universelle
- La femme de Tchaïkovsky (Kirill Serebrennikov, 2022) - Un film sur l'amour : pas l'amour fou, mais l'amour en tant que fantasme, folie
- Pacifiction : Tourment sur les îles (Albert Serra, 2022) - Un pouvoir/impouvoir transactionnel, dérisoire, exposé à la dangerosité imprévisible de pouvoirs souverains
- Alcarràs aka Nos Soleils (Carla Simon, 2022) - Notre monde s'effondre, il n'y a personne pour nous porter et nous ne savons pas nous porter nous-même
- The Fabelmans (Steven Spielberg, 2022) - Un film, dans le film, révèle une vérité dont il témoigne par le montage
- Le Bleu du Caftan (Maryam Touzani, 2022) - Nettoyer, dans un pur linceul, la crainte et la culpabilité
- Venez voir (Jonas Trueba, 2022) - "Tu dois changer ta vie!" - mais attention à la fausse couche...
- Aftersun (Charlotte Wells, 2022) - Le fantasme autobiographique de la présence du père
- X (Ti West, 2022) - Un film de genre(s) où la réduction du désir à un pur objet filmique présuppose la mort du réalisateur
- Revoir Paris (Alice Winocour, 2022) - Mourir une deuxième fois, vivante, pour une autre alliance, plus porteuse d'avenir
- Sur l'Adamant (Nicolas Philibert, 2023) - Brouiller les frontières de la folie : une tentation nécessaire, souhaitable, utopique et irréalisable
- L'écranophile (Ozzy Gorgo, 1988-2019) [Ecrano]
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- Ozzy : Un film est fait pour le grand nombre. En tant que produit industriel, il doit pouvoir être montré à un public entier, collectivement - voire à plusieurs publics, il doit pouvoir fonctionner dans la durée, et en même temps il faut qu'il soit destiné à chaque spectateur individuellement, il faut que chaque regardeur se sente convoqué dans ses questionnements, ses difficultés, ses crises ou ses conflits, qu'il le reçoive comme un message qui lui soit adressé à lui, ce jour-là, personnellement, et à nul autre. Ces deux contraintes semblent contradictoires, et pourtant elles se complètent. Il n'y aurait pas de cinéma sans l'une et l'autre. Il en va pour un film comme pour une chanson : en lui se nouent l'interchangeable et l'incomparable, le banal et le singulier. Quand j'analyse un film, quand j'en parle, c'est toujours vers ce nouage que je me dirige.
(Antoinette : Il s'agit, devant tous ces films, ces objets filmiques, de dire "je". On peut toujours discourir, donner un avis, mais se poser vraiment comme un "je", c'est la chose la plus difficile).
- Ozzy : Il y a des films dont on a envie de parler, sur lesquels on a envie d'écrire, et d'autres non. Ça ne se commande pas. Il y a ceux sur lequels on a envie de mettre trois mots ou trois lignes et d'autres un livre entier (ce qui n'implique aucune hiérarchie, pas même du goût). Ce qui arrive dans la discussion orlovienne n'est ni de la critique, ni de la mise en relation (que ce soit entre personnes, mots, phrases ou idées). Il y a d'autres lieux. Dans cette recension où les films sont bêtement rangés par ordre chronologique (classement absurde), on ne fait rien d'autre que d'ajouter des traces aux traces. Si les films n'étaient que des réserves de formulations, de phrases, d'images, de mouvements, d'affects, de proférations et de propositions, cela ne servirait à rien. Mais ils sont aussi des trouées dans le temps (si ce n'est dans la pensée). A l'autre bout du tunnel, il y a toujours encore quelque chose.
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