Derrida
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TABLE des MATIERES :

                            NIVEAUX DE SENS :

 
   
La faille humaine se montre nue                     La faille humaine se montre nue
Sources (*) :              
Mahalia Heph - "Le bord de l'humain", Ed : Galgal, 2007, Page créée le 26 mars 2009

L'aventure humaine - pourvu qu'elle dure!

   
   
   
                 
                       

 

- BENDITO : Quand on parle d'aventure humaine, on veut dire que pour être un humain, il ne suffit pas d'appartenir à une espèce. Il faut participer à une aventure.

- GAËTAN : Oui, une aventure, mais humaine, comme son nom l'indique. Si nous complétons le nom commun aventure par l'adjectif humain, c'est parce que nous pensons que cette aventure ne se dirige pas dans n'importe quelle direction. Elle a une orientation, un but, que nous appelons humanisme.

- MAHALIA : Voilà un mot superbe, agréable à entendre! L'humanisme! C'est un mot rassurant, sympathique, qu'on ne se lasse jamais de répéter. Mais quel est son contenu?

- SÉBILLE : L'humanisme, c'est mettre en valeur la dignité de l'homme, son épanouissement spirituel et matériel. Un grand philosophe a démontré que L'homme est l'être qui existe comme fin en soi, et non pas seulement comme moyen.

- MAHALIA : C'est une formulation magnifique, et je suis tout à fait d'accord pour la considérer comme un des tous premiers principes sur lesquels baser notre action. Mais est-ce que le propre de l'homme, ce par quoi il se distingue de tout autre être, peut être ramené à une formule de ce genre? Parfois nous sommes des fins, parfois des moyens, ça change tout le temps et ça ne démontre pas grand-chose.

- MARKUS : On n'a pas à le démontrer, c'est un axiome. La dignité de l'homme s'élève au-dessus de toute économie, de toute valeur comparée. Elle est inconditionnelle, absolue. Elle nous engage à l'égard de nos contemporains, de nos ancêtres et de nos descendants. Ceux qui prétendent le contraire ne méritent même pas la discussion, il faut les combattre.

- MADJIGUÈNE : Bon, admettons. Cet axiome que tu appliques aux hommes, est-ce que tu l'appliques aussi aux animaux?

- GAËTAN : Euh... non, je ne pense pas. Un animal n'est pas un être raisonnable. Il n'est pas doué de liberté. L'axiome dont je parle ne vaut que pour l'homme, dans sa singularité.

- MATRICIA : Pourtant, nous sommes des animaux n'est-ce pas? Darwin, dont nous fêtons ces temps-ci le bicentenaire, n'a-t-il pas prouvé que tous les êtres vivants se prolongeaient les uns dans les autres? Si nous pouvons nous greffer des organes de porc ou de la moëlle de souris, si nous devenons des hybrides, où passera la frontière entre nous et les animaux?

- LAURENT : Ce n'est pas une frontière naturelle, c'est une décision. Les savants doivent nous donner des éléments pour distinguer l'homme de l'animal. S'ils sont capables de fournir des critères acceptables, on en tient compte, et sinon, c'est au parlement de légiférer.

- LÉO : Je vois mal pourquoi les parlementaires en sauraient plus que les scientifiques sur une question de ce genre.

- LAURENT : Parce que c'est une question politique. Le jour où l'on ne saura plus distinguer l'homme de l'animal, il n'y aura plus d'humanisme.

- YOLANDE : Le problème, c’est que, comme toutes les choses de la nature, l’homme est entièrement déterminé par des lois qui lui sont extérieures. C’est incontournable.

- MADJIGUÈNE : Oui, mais nous sommes des êtres vivants, et je crois que ça fait une différence.

- YOLANDE : Laquelle ? De quoi sommes-nous composés, si ce n'est d'atomes, de molécules et de processus chimiques? Si demain des nano-médicaments ou des nano-puces se balladent dans notre sang ou notre cerveau pour nous faire vivre plus vieux ou nous guérir de quelques maladies, ils ne différeront en rien du reste de l’organisme.

- MARKUS : Je te vois venir, bientôt tu vas vouloir renoncer à l’idée même de l’humain, en prétendant qu’elle n’a pas de sens. Mais je ne suis pas d’accord avec toi. Il faut tenir bon. Tant que notre aventure est humaine, nous restons digne. Le jour où nous serons ravalés à des formules chimiques, il n'y aura plus de droits de l'homme ni de respect mutuel possible.

- MAHALIA : Il n’empêche que l’enjeu auquel notre génération est confrontée est justement celui-là, marier l'humanisme et la science.

- HERBERT : Et aussi les machines ! Nous serons bientôt tous des cyborgs, des hybrides d'humain et d'automatismes!

- YOLANDE : C'est un double mouvement. L'humain tend à englober le non-humain, et le non-humain tend à englober l'humain.

- PASCUAL : A moins que justement cette distinction-là ne soit fausse, que l'erreur réside dans vos prémisses. Chaque langue et chaque peuple ont une autre conception de l'homme, et même à l'intérieur d'une civilisation, il y a toutes sortes d'opinions. La notion de l'humain n'a jamais été stable, mais évolutive, plastique. On ne peut pas opposer l’homme à des catégories statiques comme l’animal ou le minéral. Ce qui le caractérise est sa capacité de changement, son aptitude à ajouter toujours plus de fonctions à sa propre nature. L'humain est et a toujours été une puissance d'élargissement et d'expansion.

- CALIXTHE : L'homme n'est pas naturel. C'est un artefact, une combinaison variable de facultés et de qualités. Allons de l'avant!

- MATRICIA : Nous n’avons pas le choix. Est-ce qu'un homme a choisi d'être humain? Est-ce que même s'il en avait envie, il aurait le droit ou la possibilité d'échapper à sa condition?

- AUGUSTE : Je ne crois pas. Nous avons tous l'obligation de rester hommes, que nous le voulions ou non.

- LÉO : Vous avez certainement raison, mais vous vous heurtez à une contrainte insoluble : c’est que l’homme ne peut avoir des droits que si le monde entier en a aussi, du plus minuscule corpuscule à la plus vaste galaxie. Il a exactement autant de droits que toutes les formes de vie connues et inconnues.

- SÉBILLE : Réaffirmer l’humanisme de manière incantatoire présente un grand inconvénient, qui est de nous empêcher de réfléchir. Il faut partir d’un constat beaucoup moins rassurant : c’est justement quand la technologie atteint des sommets, quand l'homme apprend à modifier son propre génome, que les pires crimes contre l’humanité sont commis. Tout se passe comme si, depuis le 20ème siècle, nous en sachions encore beaucoup moins que par le passé, comme si l’énigme de l’homme était encore plus obscure. Il faut à présent ramasser les miettes et reconstruire, et pour cela le paradigme humaniste n’est peut-être pas le bon.

- ATHANASIA : Supposons que l'être humain n'ait rien de spécifique, que tout ce qu'on lui croyait propre soit partagé par d'autres créatures: le langage, le rire, les pleurs, la morale, la primauté du sexe, la conscience de la mort, l'obligation de travailler, la dignité, les droits, etc... Supposons que la carte d'identité de l'humain soit complètement blanche et vide. Supposons qu’il n’ait plus ni nom, ni prénom, ni date de naissance, ni traits particuliers, comme s’il était un étranger arrivant sur terre. Qu'est-ce qui pourrait se passer?

- HERBERT : Les forces de la nature reprendraient le dessus.

- CALIXTHE : Supposons qu’il n’ait plus que deux certitudes : 1. Que personne ne viendra à son secours. 2. Que rien ne lui garantit qu’il subsistera en tant qu'homme. Sur quoi pourrait-il s'appuyer?

- MARKUS : Rien d'acquis, rien de certain, il faudra qu'il réapprenne à penser, qu'il s'adapte, qu'il se réinvente.

- PASCUAL : Si ni le passé, ni le présent ne peuvent fournir aucune leçon, la solution ne peut surgir que de l'avenir. Il s’agit d’être modeste et d’être en attente de cet avenir inconnu, presque vide. Ne le remplissons pas de clichés et de certitudes. Mettons-nous à l'écoute, et faisons en sorte que, de cet avenir inconnu, surgisse du nouveau.

- HERBERT : Et si rien de convaincant n'émerge ?

- ATHANASIA : Changeons de problématique. Il ne s’agit plus de dominer le monde, mais de faire alliance avec lui.

- AUGUSTE : Il ne s’agit plus d'imposer au monde une conception de l'humanisme, mais de travailler à la construction d'un lieu où vivre ensemble, c’est-à-dire d’un temple.

- DANEL : Bref, toute une aventure, à laquelle maintenant nous cédons la place.

 

 

 

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