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TABLE des MATIERES :

                            NIVEAUX DE SENS :

 
   
Nicolas Abraham                     Nicolas Abraham
Sources (*) :                
Nicolas Abraham - "L'écorce et le noyau", texte écrit avec Maria Torok"", Ed : Flammarion, 1987,

"L'écorce et le noyau" (Nicolas Abraham et Maria Torok, texte de 1978 réédité en 1987) [LELN]

   
   
   
                 
                       

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Table

Cet ouvrage contient des essais rédigés entre 1959 et 1975 et a été publié après la mort de Nicolas Abraham.

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La psychanalyse bute sur une difficulté de principe : elle tente d'accéder à un champ (les pulsions, l'affect, l'inconscient) inaccessible par la langue courante, un champ dont les processus n'ont aucun sens (anasémie) dans cette langue. Tant qu'on en reste à une phénoménologie de type husserlien, qui ignore l'inconscient, on laisse la psychanalyse impensée. Que faire alors? Imaginer une transphénoménologie capable de produire des concepts anasémiques, c'est-à-dire des concepts qui assurent la médiation entre l'expérience et ce champ inconnu. Dans cette perspective, Abraham et Torok redéfinissent la théorie analytique et les concepts freudiens (inconscient, pulsion, libido) [anasémiques depuis Freud, même s'il ne l'a pas conceptualisé] et en définissent d'autres : symbole, crypte, fantôme, hantise, introjection, maladie du deuil, trace. Cela suppose une clinique où l'analyste réussit, par le transfert, à faire résonner sa structure imaginale avec celle du patient.

Dans la métapsychologie d'Abraham et Torok, pour que se mettent en place le langage et la culpabilité, il faut une introjection primordiale des objets et de la libido inconsciente. Si cette introjection réussit, les affects, désirs, contre-désirs et fantasmes peuvent se déployer. Le langage supplée à l'expérience de l'absence. En figurant l'autre en lui, l'archi-ego surmonte l'angoisse originelle. Une symbolique se met en place en relation dynamique avec les désirs.

Mais si, à cause d'un trauma du patient ou d'un trauma qu'un autre aura tenu secret et qui lui aura été transmis par des voies inconscientes (par exemple dans la généalogie familiale), l'introjection échoue, alors ce qui se met en place est une incorporation. Certains mots du désir deviennent innommables, impossibles à dire. La bouche ne peut plus les articuler. Le sujet, devenu cryptophore, se place dans la dépendance d'une Imago fantasmatique et interdictrice. Tout ce qui est refusé, masqué, dénié, se transforme en une réalité inavouable, se pétrifie en une sorte de tombeau ou monument intérieur. Le vide originel, qui ne peut plus être mis en mots, revient sous forme de mélancolie (maladie du deuil). Les symboles qui reflètent ses conflits intérieurs deviennent ininterprétables.

Les processus découverts par Abraham et Torok dans la mélancolie peuvent être généralisés. Chaque parole est double : d'une part elle réveille un fantôme anasémique, et d'autre part elle fait en sorte que ce fantôme soit exorcisé - c'est-à-dire qu'il reste inaccessible. Le savoir qu'il transmet doit rester insu, refoulé, inavouable, enfoui dans une crypte. Il en résulte un clivage du moi - une partie dissimulée et une autre qui cherche à continuer à vivre. Les mots ne sont pas seulement porteurs d'une signification, mais aussi d'un drame mémoriel qui ne s'efface pas. Le fantôme se manifeste par une hantise, ce qui peut événtuellement conduire à des comportements névrotiques ou pathologiques, des maladies psychosomatiques et aussi à la création d'oeuvres exceptionnelles - des oeuvres qui demeurent muettes, illisibles, mais qui résolvent de manière originale et exemplaire un conflit inconscient.

On trouve aussi chez Abraham et Torok une théorie de l'auto-affection. Au départ, l'enfant trouve dans la conjonction du Je et du Me (touchant-touché), plus particulièrement dans le couple ouïe/phonation ("Je m'entends") une source de certitude. En se percevant lui-même, il donne consistance à son ego. Mais le décalage entre désir conscient et voeu inconscient (qui est à l'origine de la temporalité) trouble cette certitude. Autre chose arrive que ce qui était attendu.

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pI : Préface, par Nicholas Rand

 

p13 : I. Psychanalyse science des sciences

- p15 : 1. Présentation de Thalassa (Nicolas Abraham, octobre 1962, introduction à la publication en français d'un ouvrage de Sandor Ferenczy)

- p25 : 2. Le symbole ou l'au-delà du phénomène (Nicolas Abraham, manuscrit d'avril-septembre 1961, publication posthume).

- p77 : 3. Réflexions phénoménologiques sur les implications structurelles et génétiques de la psychanalyse (Nicolas Abraham, exposé fait à Cerisy-la-Salle en 1959, paru in Entretien sur les notions de genèse et de structure, Paris, Mouton, 1968)

- p88 : 4. Le temps, le rythme et l'inconscient. Réflexions pour une esthétique psychanalytique (Nicolas Abraham, texte de septembre 1962 paru dans la Revue Française de Psychanalyse, juillet 1972)

 

p121 : II. Le "Je-Me" du touchant-touché introjectif

- p123 : 1. Le "Crime" de l'introjection (Causerie) (Nicolas Abraham, manuscrit indédit de 1963)

- p132 : 2. La signification de l'"envie du pénis" chez la femme (Maria Torok, paru en 1964 in La sexualité féminine, Nouvelles recherches psychanalytiques)

- p172 : 3. A propos de... (brèves interventions) (Nicolas Abraham et Maria Torok, soirée de "Confrontation" du 18 juin 1975)

- p184 : 4. Qui est Mélanie Klein? (Nicolas Abraham et Maria Torok, octobre 1966, présentation de l'édition française des Essais de psychanalyse de Mélanie Klein)

 

p201 : III. La majuscule anasémique, vers une réélaboration de la conceptualité psychanalytique

- p203 : L'écorce et le noyau (Nicolas Abraham, paru dans Critique, février 1968)

 

p227 : IV. La crypte au sein du moi, nouvelles perspectives métapsychologiques

- p229 : 1. Maladie du deuil et fantasme de cadavre exquis (Maria Torok, paru dans la Revue Française de Psychanalyse, 1968, n°4)

- p252 : 2. La topique réalitaire, notations sur une métapsychologie du secret (Nicolas Abraham et Maria Torok, paru dans la Revue Française de Psychanalyse, 1971, n°5-6)

- p259 : 3. Deuil ou mélancolie, Introjecter-incorporer (Nicolas Abraham et Maria Torok, paru dans la Nouvelle Revue de Psychanalyse, n°VI, 1972)

- p276 : 4. Psychoanalysis lithographica (Nicolas Abraham, paru dans Critique, décembre 1973)

- p295 : 5. "L'objet perdu - moi". Notations sur l'identification endocryptique (Nicolas Abraham et Maria Torok, conférence faite à la socité psychanalytique de Paris, le 20 mars 1973).

- p318 : 6. La maladie de soi-à-soi (note) (Nicolas Abraham et Maria Torok, été 1973)

 

p323 : V. L'Enfant majuscule et l'unité duelle.

- p325 : L'Enfant majuscule ou l'origine de la genèse (Nicolas Abraham, manuscrit inédit de 1967)

- p334 : Pour introduire l'"instinct filial" (Nicolas Abraham, mars 1972)

- p384 : La source de signifiance du langage : communion dans le monsonge, sur le désir anasémique de cramponnement (Nicolas Abraham, manuscrit inédit, été 1973)

 

p389 : VI. Le travail du fantôme dans l'inconscient et la loi de nescience.

- p393 : Notes du séminaire sur l'unité duelle et le fantôme (Nicolas Abraham, séminaire de 1974-75 à l'Institut de Psychanalyse, manuscrit inédit).

- p426 : Notules sur le fantôme (Nicolas Abraham, Etudes freudiennes 1975 n°9-10)

- p434 : Histoire de peur, Le symptôme phobique : retour du refoulé ou retour du fantôme? (Maria Torok, Etudes freudiennes, 1975, n°9-10)

- p447 : Le fantôme d'Hamlet ou le VIè acte, précédé par L'entr'acte de la "vérité" (Nicolas Abraham, avril 1974 et mars-juillet 1975)

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Formulations à partir de ce texte (les têtes de chapitre sont entre crochets) :

 

[La psychanalyse tente l'impossible : saisir, par des concepts anasémiques, la source même dont le langage émane]

[Depuis l'inconscient, un fantôme inconnu exerce sa hantise : souvenir enfoui dans une crypte, secret inavouable, il transmet un savoir insu, refoulé, une nescience]

[Avec l'introjection primordiale de l'objet, qui s'auto-affecte à l'intérieur de soi, adviennent la duplicité, le langage et la culpabilité]

[Dans sa forme originaire, un symbole - comme une oeuvre - résulte des conflits inconscients, singuliers, d'un sujet]

[Tandis que l'introjection des pulsions met fin à la dépendance objectale, l'incorporation de l'objet entretient cette dépendance, sous la garde de l'Imago interdictrice]

L'affect est une tension anticipatrice qui se regénère sans cesse, par identification à l'autre introjecté

Pour surmonter l'angoisse originaire - cette impossibilité d'être -, l'Archi-ego figure en lui ce qu'il n'est pas (l'autre); le symbole maintient ce clivage et réitère indéfiniment l'altérité

Quand la bouche ne peut pas articuler certains mots, alors y vient l'innommable, la chose même ou l'Imago fantasmatique qui en est dépositaire

Pour le sujet cryptophore, la Réalité est ce qui est refusé, masqué, dénié; c'est le lieu où, dans l'appareil psychique, le secret est enfoui

Le fantasme est d'essence narcissique : il tend à maintenir, en secret, le statu quo topique

Un fantôme objective le travail produit, dans l'inconscient, par les lacunes que laissent en nous les secrets des autres

Une Imago fonctionne toujours comme interdictrice d'un désir sexuel; elle porte témoignage d'une tentative ratée d'introjection, vécue dans la volupté

L'incorporation est une prise de possession magique de l'objet, un fantasme qui l'installe en secret à l'intérieur de soi et rappelle par un monument le refoulement du désir

Les fantasmes d'incorporation de la mélancolie sont antimétaphoriques : ils détruisent la figuration et annulent l'acte même de mettre en mots le vide originel

Devant l'impossibilité d'énoncer le mot du désir, le sujet crée un symbole - voire une oeuvre d'exception - qu'occultent ses actes, rêves et symptômes

En introduisant dans le moi la libido inconsciente, l'introjection des pulsions les transforme en désirs et fantasmes de désirs

L'introjection commence par l'expérience du vide dans la bouche : le langage supplée à l'absence, aux cris et aux pleurs se substituent des mots

A l'origine, les mots ne sont pas porteurs d'une signification, mais d'un drame mémoriel qui exige impérieusement d'eux qu'ils opèrent une distinction, qu'ils instituent une différence

Une oeuvre authentique est la solution exemplaire, symboliquement originale, d'un conflit fictif; elle articule un affect inconscient dans un langage approprié

Une oeuvre est vouée à demeurer muette, illisible - sauf si une oreille, par auto-témoignage, entend l'archi-poème qu'elle sait à l'avance

A l'origine, la seule source de certitude pour l'Enfant est la conjonction du Je et du Me, du touchant et du touché - qui est toujours déçue par l'abîme qui les sépare

Parler, c'est communier avec un mensonge : réveiller un fantôme anasémique, tout en exigeant qu'il ne prenne pas corps (le présentifier en l'exorcisant)

La psychanalyse a pour domaine l'impensé de la phénoménologie - laquelle ignore l'inconscient, noyau de l'être

Entre le "je" et le "me" surgissent des auto-affections qui ne signifient rien : distance qui sépare le sujet d'avec soi, non-présence qui s'entend dans la présence

Un symbole n'est pas symbole par lui-même, mais seulement en tant qu'opération d'un sujet, en relation dynamique avec ses désirs, ses contre-désirs et ses objets

La signification d'un symbole, conçu comme fusion entre refoulant et refoulé, n'est donnée que dans la relation de transfert, par résonance entre structures imaginales

Au fondement de la création du temps est le décalage entre désir conscient et voeu inconscient : ce qui arrive au présent est toujours "autre chose" que ce qui était attendu

Dans sa duplicité, la trace agit sur les deux pôles anasémiques : le noyau (inconscient) et la périphérie (enveloppe préconscient-conscient)

La théorie psychanalytique, qui révèle en nous la non-présence d'où jaillit tout sens, ne peut s'énoncer que comme discours anasémique

Les symptômes psychosomatiques sont des maladies de soi à soi, où le sujet ne parle qu'à lui-même et non pas aux autres

"L'écorce et le noyau" (Nicolas Abraham et Maria Torok, texte de 1978 réédité en 1987) [LELN]

 


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AbrahamNicoParcours

B1.987

YYA.1987.Abraham.NicolasGenre = -