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Le Shema Israel                     Le Shema Israel
Sources (*) : Orlolivre : comment ne pas babéliser?               Orlolivre : comment ne pas babéliser?
Pierre Delain - "Miqra, plus d'une lecture", Ed : Guilgal, 2016-2020, Page créée le 2 octobre 2011 Essai sur le salut à adresser au rien

[Le Shema Israel est l'acte de parole par lequel la fragile alliance entre chaque Juif, le peuple d'Israël et le Dieu unique, est réitérée]

Essai sur le salut à adresser au rien
   
   
   
                 
                       

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Le Shema Israel est le noyau central de la prière que le Juif adulte doit lire matin et soir. C'est un texte d'environ deux pages, composé de trois extraits distincts de la torah (Dt 6:4-9, Dt 11:13-21, Nb 15:37-41) plus une phrase. La tradition recommande de le prononcer entièrement à haute voix, à l'exception du second verset (celui qui n'est pas issu de la torah). Elle recommande aussi de se couvrir les yeux de la main quand on prononce les deux premiers versets (en aveuglant le regard, on est supposé mieux se concentrer sur les mots). Dans les prières du matin et du soir, le Shema Israel est encadré par des bénédictions : deux avant et une après le matin, plus la lecture silencieuse de la Amidah; deux après le soir. On prononce le Shema Israel lors de nombreuses cérémonies (dont Yom Kippour), et aussi sur son lit de mort. En outre, les deux premiers versets sont calligraphiés dans les mezouzot (petite boîte apposée aux montants des portes) et dans les tefilin (boîtiers portés à la tête et aux bras).

 

La fonction du Shema ne se limite pas à l'invocation de Dieu. On peut y repérer deux types de complexité :

a) Il combine plusieurs sortes d'actes de langage (speech act ou énonciation performative, selon la définition de J.L. Austin dans Quand dire, c'est faire). En voici une liste possible (non limitative) : témoignage, acquiescement, serment, promesse, engagement, commandement, alliance, signature, auxquels s'ajoute la bénédiction du second verset. On peut considérer, en s'appuyant sur la tradition, que ces actes sont hiérarchisés. Par l'élargissement des deux lettres ע et ד du premier verset, l'un d'entre eux est mis en avant : le témoignage.

b) sur l'ensemble de ses trois parties, le locuteur est variable. Qui est celui qui témoigne, acquiesce, jure, promet, s'engage, commande, s'allie, signe et bénit? Il y a trois possibilités : l'individu qui prie, le peuple d'Israël (pris dans son ensemble), ou le Dieu unique. Aucun ne monopolise la parole, mais tous trois disent "je", tout en restant séparés les uns des autres. Il y a donc plusieurs types de témoignage, d'acquiescement, de promesse, etc...

 

En général, selon J.L. Austin, un acte de langage est une phrase à la première personne du singulier de l'indicatif présent, voix active, du genre : Je vous déclare unis par les liens du mariage. Devant ce type de phrase, la question qu'on est conduit à se poser n'est pas, Est-elle vraie ou fausse?, mais : A-t-elle réussi ou non? En se demandant si, après que cette phrase ait été prononcée, les époux sont mariés ou non, on s'interroge sur l'efficacité de cette phrase et non sur sa valeur de vérité.

Compte tenu de la multiplicité des locuteurs et de la complexité des énonciations, cela conduit à poser non une seule question mais plusieurs. Ce serait par exemple : Le témoignage du fidèle est-il-valide? Peut-on croire en son acquiescement? Un serment fait par un individu au nom de tout un peuple est-il acceptable? Les trois locuteurs virtuels (le fidèle, le peuple ou Dieu) sont-ils authentiquement engagés? Puisque Dieu ne parle pas par sa propre bouche, mais par la bouche du fidèle, son commandement a-t-il une valeur? Un engagement conditionnel peut-il donner lieu à un performatif réussi? Dans la perspective d'Austin, qui ne considère comme performatifs que les actes qui peuvent réussir, on est conduit à émettre quelques doutes. Pour que l'un au moins des actes de langage réussisse, il faudrait s'assurer que la prière est prononcée sérieusement, et non pas de mauvaise foi; qu'elle a été dite à l'heure prescrite, dans les conditions admises par les décisionnaires - ces conditions devant être respectées non seulement pour celui qui parle, mais aussi pour celui ou ceux qui écoute(nt); que les mots prononcés sont bien été effectivement ceux de la prière, et non pas d'autres; qu'aucune défectuosité ne s'est introduite dans le rite. La liste est loin d'être close, et il suffit de commencer à l'établir pour se rendre compte à quel point l'efficacité du Shema est invérifiable. On sait qu'un performatif peut toujours être rejeté par celui auquel il adresse; il peut toujours être considéré comme abusif ou vide, il est toujours exposé à l'échec. L'importance du Shema ne tient donc pas à sa réussite, mais au simple fait qu'il ait été proféré.

C'est là qu'on rencontre une autre particularité du Shema Israel. C'est que cette fragilité, ce caractère aléatoire, est inscrit dans son texte même. Si le Shema engage, malgré toutes ces questions et incertitudes formelles, c'est aussi parce qu'il est écrit au conditionnel. "Si vous êtes dociles aux lois que Je vous impose...", "Prenez garde que votre coeur ne cède à la tentation...", "Que vous ne vous égariez pas à la suite de votre coeur et de vos yeux, qui vous entraînent à l'infidélité...". La possibilité d'échec n'est pas extérieure au contenu, elle fait partie du contenu. L'échec ne dévalorise pas le Shema. Il ne fait que le confirmer.

 

Ecoute, Israël, l'Eternel est notre Dieu, l'Eternel est Un.

 

On peut lire ci-dessus le premier et principal verset du Shema. La prière dans son ensemble est traditionnellement découpée en trois parties, désignées par le premier mot (Chema, Yhvh, Veimra). On trouvera ici la traduction complète de la première partie, ici le texte du Deutéronome cité dans la seconde partie, et le texte des Nombres cité dans la troisième partie.

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Sur cette transcription reprise d'un rouleau traditionnel, les deux lettres agrandies ע et ד, formant עד (ed, qui signifie témoin), sont nettement visibles.

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Propositions

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Par le Shema Israel, le fidèle juif se fait témoin du Dieu unique, devant la communauté et devant lui-même

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En prononçant le Shema Israel à haute voix, le Juif fait serment de témoigner du Dieu unique

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Prononcer le Shema Israel, c'est s'engager à respecter tous les commandements positifs

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En prononçant le Shema Israel, le fidèle se rappelle que la promesse divine ne perdurera qu'à condition de mettre en oeuvre les commandements rituels

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Par la bénédiction du nom de Dieu, le Shema Israel célèbre un événement indéchiffrable et annonce des temps inconnus

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La formule biblique "Ani Yhvh", qui clôt de nombreux versets bibliques - dont le Shema Israel - est une signature, une marque qui atteste d'un "Je" absolument singulier

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Par le Shema Israel, le fidèle dit "oui" à une parole qui parle par sa bouche

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Le Shema Israel n'est pas une profession de foi individuelle, c'est l'affirmation d'une alliance entre un peuple et Dieu

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Le Shema Israel est l'acte de parole, chaque fois unique, qui suspend l'alliance à un événement incalculable

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Le Shema Israel atteste de la possibilité même du témoignage, sans laquelle le lien fiduciaire qui unit le peuple serait rompu

 


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