Une archive graphique (dessin ou écriture) est observante, sous réserve de prendre le verbe "observer" dans son double sens : par perception ou par vision (l'observation courante); et aussi par observance d'une loi, d'un commandement.

"Dans la descendance graphique, du livre au dessin, il s'agit moins de dire ce qui est tel qu'il est, de décrire ou de constater ce que l'on voit (perception ou vision) que d'observer la loi au-delà de la vue, d'ordonner la vérité à la dette" (Mémoires d'aveugle p35).

L'écriture et le dessin supposent un invisible dont elles rendent compte, autant que du visible. Dans le Livre de Tobie, après avoir rendu la vue à Tobit, l'ange Raphaël invite ce dernier à écrire. En échange de son acte, il ne demande qu'un autre acte : laisser une archive de ce qui fut fait. En écrivant, en dessinant, je m'acquitte d'une dette. Je rends grâce d'un événement dont j'inscris la mémoire, je transmets l'archive d'un récit. En respectant le commandement de l'ange, j'écris sous une dictée qui déborde la simple vision. Je rends compte de la surabondance du visible et aussi de sa défaillance, du trop et du trop peu, de l'excès et de la faillite (Mémoires d'aveugle, p35), du naturel et du sauvage.

Dans le moment propre de l'écriture et du dessin, la foi est aveugle. Sa fidélité ne va pas à la représentation, mais au devoir : il faut rendre aussi adéquatement que possible. [On dit d'un dessin qu'il "rend bien" (ou mal)].