On ne peut pas séparer la déconstruction de son contexte. Il y a un héritage chrétien, juif, judéo-chrétien, judéo-islamo-chrétien, abrahamique. Comme le dit Jean-Luc Nancy, dans cet héritage, le christianisme déjà se déconstruit, il est déjà engagé dans un mouvement d'auto-déconstruction. La déconstruction, on la trouve déjà chez Luther (destruuntur) ou Heidegger (Destruktion). Il est possible que le christianisme soit plus plastique, plus ouvert, mieux préparé à la transformation que d'autres religions, et que le symptôme de cette plasticité soit aujourd'hui la globalisation, que Derrida nomme mondialatinisation. Dans la déconstruction d'aujourd'hui (celle de Jacques Derrida), il y aurait une mémoire du christianisme, mais il n'y a pas que cela, car il y a aussi de la déconstruction ailleurs, dans d'autres filiations comme le bouddhisme et les religions d'extrême-orient (ce n'est pas Derrida qui l'a remarqué, ce sont des gens dont la pensée s'inscrit dans ces traditions).

En retour, la déconstruction [sous tous ces modes et pas seulement la déconstruction derridienne] affecte l'héritage chrétien. La mutation qui lui arrive aujourd'hui est un bouleversement sans précédent, un séisme.