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de Jacques Derrida

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Derrida, l'art, l'oeuvre                     Derrida, l'art, l'oeuvre
Sources (*) : L'oeuvre, l'auteur               L'oeuvre, l'auteur
Jacques Derrida - "L'écriture et la différence", Ed : Seuil, 1967, p335 - Freud ou la scène de l'écriture

 

Tentation de St Antoine - detail (Jerome Bosch, 1505-06) -

Il n'y a pas d'écrivain solitaire : sur la scène de l'écriture, l'oeuvre est l'enjeu d'un drame ou d'une guerre, entre le premier lecteur [qui la dicte] et l'auteur [le premier à la lire]

   
   
   
               
                       

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1.

Dans le texte intitulé Freud et la scène de l'écriture, Jacques Derrida met en relation l'écrivain en général, et plus particulièrement cet écrivain singulier qu'est Freud, avec le frayage "originel", cette inscription psychique primordiale qu'il qualifie de trace ou d'archi-trace. Pourquoi utilise-t-il, dans ces deux gestes d'écriture mis en parallèle et en abyme, le mot scène? Pourquoi l'écriture aurait-elle lieu sur une scène? Pour répondre à cette question, il faut en passer par un autre mot, l'oeuvre.

"L'apparente extériorité de la censure politique renvoie à une censure essentielle qui lie l'écrivain à sa propre écriture. S'il n'y avait que perception, perméabilité pure aux frayages, il n'y aurait pas de frayage. Nous serions écrits mais rien ne serait consigné, aucune écriture ne se produirait, ne se retiendrait, ne se répéterait comme lisibilité. Mais la perception pure n'existe pas : nous ne sommes écrits qu'en écrivant, par l'instance en nous qui toujours déjà surveille la perception, qu'elle soit interne ou externe. Le "sujet" de l'écriture n'existe pas si l'on entend par là quelque solitude souveraine de l'écrivain. Le sujet de l'écriture est un système de rapports entre les couches : du bloc magique, du psychique, de la société, du monde. A l'intérieur de cette scène, la simplicité ponctuelle du sujet classique est introuvable. Pour décrire cette structure, il ne suffit pas de rappeler qu'on écrit toujours pour quelqu'un; et les oppositions émetteur-récepteur, code-message, etc., restent de forts grossiers instruments. On chercherait en vain dans le "public" le premier lecteur, c'est-à-dire le premier auteur de l'oeuvre. Et la "sociologie de la littérature" ne perçoit rien de la guerre et des ruses dont l'origine de l'oeuvre est ainsi l'enjeu, entre l'auteur qui lit et le premier lecteur qui dicte. La socialité de l'écriture comme drame requiert une tout autre discipline" (Derrida, L'écriture et la différence, p335).

Le décalage de l'archi-écriture (après-coup) se retrouve dans la machinerie de l'oeuvre. Pour écrire, un écrivain doit commencer par se lire; il est donc son premier lecteur. Il écrit pour ce premier lecteur, premier interprète. Celui qui écrit écrit donc sous la dictée de ce lecteur, qui est le véritable auteur. Ce processus d'auto-affection, sans lequel il ne pourrait pas y avoir d'écrivain, est aussi, selon Derrida, celui de la mise en route ou mise en oeuvre de l'appareil psychique. Cette comparaison n'est pas externe. Ce n'est ni un exemple, ni une métaphore : c'est un rapport de structure.

2.

Quand Freud renonce à toute description anatomique ou neurologique de l'appareil psychique, l'écriture entre en scène (p305). C'est comme une scène de théâtre, le rideau s'ouvre. Freud change de vocabulaire, il parle de signe, d'inscription, de transcription (Lettre 52 à Fliess, 1896). Cette entrée en scène est différenciée : il y a les métaphores du texte, et celles de la machine (dont le bloc magique). Dans la Traumdeutung, le rêve est une mise en scène construite comme une écriture. Pour Derrida, il s'agit bien d'une scène, qu'il compare à la scène de la cruauté chez Artaud (p312). Les signifiants et signifiés ne sont pas donnés à l'avance; ils sont créés sur la scène, par l'expression du corps verbal qui est aussi un travail d'écriture. Il en est ainsi du déchiffrement freudien : il ne traduit pas un sens, il le produit. Pour suggérer l'étrangeté des relations logico-temporelles dans le rêve, Freud fait appel au rébus, au hiéroglyphe, à l'écriture non phonétique. Ces éléments visuels ne sont pas des tableaux : ce sont des mises en scène synoptiques, des résumés condensés, déplacés, synthétiques, qui font cohabiter des éléments discordants. Une mise en scène n'est pas une image; c'est une écriture figurée, un montage de représentations, une "chaîne signifiante de forme scénique", le lieu hétérogène, discontinu, d'une multiplicité d'instances, d'un espacement.

"Donc Freud nous fait la scène de l'écriture. Comme tous ceux qui écrivent. Et comme tous ceux qui savent écrire, il a laissé la scène se dédoubler, se répéter et se dénoncer elle-même dans la scène" (Derrida, L'écriture et la différence, p338).

 

 

3.

Jacques Derrida fait remarquer, à propos du bloc magique de Freud, qu'il faut être plusieurs pour écrire. L'écriture est un rapport à l'autre. De même qu'il n'y a pas de simplicité originelle de la perception (car ce premier rapport de la vie à son autre suppose un frayage [qui lui-même est une réponse à une menace], des effacements différentiels), la "manuscripture" simple est un mythe. L'écriture est conditionnée par une censure et un échec de la censure, une inscription et un refoulement de cette inscription. Si l'écrivain n'est jamais solitaire, c'est parce que la scène où il écrit est psychique, sociale, mondaine : il est en guerre [avec lui-même, comme avec ces autres] dans un drame où les choix qu'il fait peuvent être comparés aux frayages de Freud.

Freud montre que pour qu'il y ait mémoire - c'est-à-dire écriture au sens de Derrida, consignation, il faut qu'une autre instance nous surveille. Nous sommes écrits. Le premier lecteur n'est pas dans le public, mais dans une de ces instances.

 


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