Comment faire pour que la certitude de la paix domine l'évidence de la guerre? On ne peut pas s'appuyer sur la paix des empires, qui repose elle-même sur la guerre et son prolongement, la politique. Une morale inconditionnelle et universelle s'oppose à celle de la politique. Une telle morale ne peut pas se déduire de la raison ni de l'évidence philosophique. Sa véritable portée tient en une mise en relation avec l'être, au-delà de la pensée occidentale de la totalité. Cet au-delà transcendant exige un autre concept : celui d'un infini non englobable dans la totalité. L'infini est un surplus toujours extérieur à la totalité. Il donne la vraie mesure de l'être.

De la paix, il ne peut y avoir qu'eschatologie, c'est-à-dire en-dehors de la représentation et de l'objectivité (p9). Elle ne prend pas place comme fin de la guerre, fin de l'histoire, mais dans un déchirement profond, dans une situation où la totalité se brise, dans l'éclat de l'extériorité ou de la transcendance dans le visage d'autrui.