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Sources (*) : CinéAnalyse : fantasme, arrêt du temps               CinéAnalyse : fantasme, arrêt du temps
Georges Didi-Huberman - "Ouvrir Vénus - Nudité, rêve, cruauté", Ed : Gallimard, 1999, p82

 

Histoire de Nastagio degli Onesti (Sandro Botticelli, 1483) -

Didi - Huberman, l'image dialectique

En ouvrant le monde, en mettant l'être en mouvement, la nudité ouvre aussi, non sans cruauté, le corps à la blessure et au désir

Didi - Huberman, l'image dialectique
   
   
   
                 
                       

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Il est étrange de penser que les quatre tableaux ci-contre ont servi de cadeau de mariage (comme La Naissance de Vénus, peint l'année suivante par le même Botticelli), afin d'être installés dans la chambre nuptiale de Giannozzo Pucci et de sa seconde épouse, Lucrezia Bini. En effet si l'histoire racontée se termine bien, comme en témoigne le banquet de mariage final, elle commence plutôt mal. Dans les trois premiers panneaux, la jeune femme est poursuivie par un chevalier en armes qui la donne régulièrement à dévorer à ses deux chiens. Un tel spectacle est-il de nature à favoriser le devoir conjugal? Peut-être. Mais on peut avoir quelques doutes à la lecture de l'histoire racontée pendant la 5è journée du Décaméron de Boccace, dont voici un court résumé :

1. Nastagio (très riche mais pas très noble) est amoureux de la fille de Paolo Traversari, encore plus noble. (Curieusement, le prénom de cette fille n'est pas donné dans l'histoire, comme si elle était quelque chose comme "une fille en général").

2. Elle le rejette, se montrant dure et cruelle avec lui.

3. Plutôt déprimé, Nastagio fait dresser un camp en pleine forêt où il invite ses nombreux amis à faire la fête. Il commence à dépenser tous ses sous.

4. Un beau jour, il voit une scène très étrange : un chevalier pourchasse une jeune femme nue et la fait dévorer par ses chiens. La scène se reproduit tous les jours au même endroit. Rien ne peut l'arrêter (panneaux 1 et 2).

5. Nastagio a une idée de génie. Il invite beaucoup de monde, y compris la belle, à un festin champêtre qui se situe justement à cet endroit. Les invités assistent avec horreur à la scène, et ne peuvent pas empêcher la dévoration.

6. Craignant de subir le même sort, la jeune fille accepte de se marier avec Nastagio. Elle va même jusqu'à tomber amoureuse de lui (ce qui semble quand même un peu étrange).

7. En outre, avantage annexe : "toutes les ravignanaises en devinrent si craintives, que, depuis, elles ont toujours été beaucoup plus complaisantes aux désirs des hommes qu'elles ne l'avaient été auparavant". Ouf!

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A propos de ce récit soigneusement représenté par Botticelli, Georges Didi-Huberman pose la question fondamentale : pourquoi la jeune femme pourchassée est-elle nue? Boccace insiste sur ce point. Il faut que cette belle fille aux longs cheveux roux (comme la Vénus), qui trône au centre de chaque scène, soit nue. Pourquoi? Pour attirer le regard, susciter l'empathie, et aussi montrer l'horreur, ce qui se dérobe au regard.

Même les plus mauvais rêves visent l'accomplissement d'un désir. Ici le désir est clairement et directement sexuel. Pour représenter la scène, il faut la séparer de tout affect. Dans le deuxième panneau, au corps blessé de la femme répond une brisure entre les arbres. Dans le même espace clivé, menacé par l'informe, il faut que la pulsion de mort puisse se dérouler implacablement. On nous raconte que les deux revenants ont été damnés car ils n'ont pas pû se réconcilier de leur vivant. Contre sa volonté, le jeune homme est éternellement voué à châtier la jeune fille. Les vivants (Nastagio et sa petite amie) sont invités à casser cette répétition éternelle. C'est la fonction du mariage. Mais qui nous assure que ce sado-masochisme ne se poursuivra pas, sur d'autres terrains, après le mariage?

Panneaux 1 à 4 de L'Histoire de Nastagio degli Onesti, ensemble peint par Sandro Botticelli vers 1483 et parfois surnommé La chasse infernale.

 

 

La nudité, interdite, est aussi porteuse d'un plaisir (plaisir exhibitionniste pour la personne concernée, voyeurisme pour le spectateur), une contradiction qui n'est pas sans générer angoisse et paralysie. Dans la succession des quatre panneaux, le mouvement des figures semble ralenti, presque arrêté, comme s'il fallait un effort pour refouler la violence et atténuer la cruauté. Le regard que nous portons sur l'oeuvre surgit dans cet entre-deux.

A plat ventre, blessée dans le dos, perdant ses viscères, la jeune femme est encore plus nue. Elle pousse le mouvement de dénudation jusqu'à s'ouvrir au-delà de la peau, vers un lieu secret encore plus nu, au-delà de la nudité.

 


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