Si l'art, en tant que tel, est politique, c'est parce qu'indépendamment de tout contenu particulier, le droit de créer librement est, selon Paul Audi, imprescriptible. Un artiste peut tout faire, sauf porter atteinte à la possibilité même de la création. S'il niait cette possibilité, il serait irresponsable. Son engagement politique n'est pas lié à un parti pris idéologique ou partisan, mais à la place de la création dans la société. Ce ne doit pas être un résidu, une tolérance liée au besoin de fête ou de distraction, mais une condition même de la culture.

Dans toute société, l'oeuvre de création est suspecte. Elle irrite, elle perturbe, elle n'apporte rien aux institutions dont le premier objectif est de se reproduire sans aucun changement. Tout ce qui arrive sans prévenir est dangereux, menaçant.

L'artiste n'est pas un fournisseur de produits de consommation courante. Sa fonction n'est pas non plus de donner un sens à l'ordre existant. Il a pour responsabilité de faire en sorte que l'avenir reste ouvert, que la vie survive. Alors, et alors seulement, la défense de son statut trouve une justification.