La promesse est reconnue dans notre culture depuis Abraham et son alliance avec Dieu, ou depuis les Romains, qui reconnaissaient l'inviolabilité des accords et des traités. Dans des affaires humaines par nature imprévisibles, elle ménage des ilôts de prévisibilité, quelques jalons de certitude relative, qui protègent dans une certaine mesure contre l'océan d'incertitude où nous vivons.

Lorsque les hommes se rassemblent, dans un espace public, pour agir de concert, la promesse mutuelle opère comme une force assurant leur cohésion. Cette cohésion est moins puissante que si des gens entièrement libres étaient liés par une volonté identique, mais elle permet de disposer d'un avenir calculable [relativement], qui aurait les mêmes qualités que le présent. Il y a là une supériorité qui provient directement de la volonté de vivre avec autrui, dans la parole et l'action.

Les générations futures devront subir les conséquences de nos actions, qui sont impossibles à connaître et à contrôler. Par la faculté de faire et de tenir des promesses, l'incertitude est limitée. Des ilôts de sécurité rendent possibles une certaine continuité et l'expérience de la durée dans les relations des hommes entre eux. Les identités peuvent être conservées.