Au moment où de nombreuses voix constatent la disparition de l'homme (thème du post-humain), il nous manque une image du corps sur laquelle nous pourrions nous mettre d'accord. On ne peut plus faire coïncider l'identité avec des trait corporels (photographie du visage ou empreintes digitales), comme l'exigent les régimes totalitaires. Les nouvelles explorations corporelles (radioscopie, RMN, etc...) passent par l'image, mais ces images sont désertées par le moi. Cela ne nous empêche pas de nous photographier et de nous filmer du berceau jusqu'à la tombe. Nous avons besoin de ces apparitions pour nous incarner comme humains. Il nous faut des corps apparents, des corps en scène, des images corporelles produites par la culture, des idéaux corporels véhiculés par le sport et la publicité, des auto-représentations dans lesquelles entrent en jeu les trois dimensions homme/corps/image, à la fois indissociables et incompatibles.

Devant cette contradiction insoluble [entre les télétechnologies qui déconstruisent l'humain et le besoin de se reconnaître comme humain], le corps se fait inconnu. Les artistes l'évoquent par périphrase : en le mettant à distance, par dérision ou par allusion, en le morcelant, en le dégradant, en le transformant en machine, etc... D'autres engagent leur propre corps comme médium artistique pour lutter contre le monopole exercé par les médias.

Nous continuons à vivre dans notre corps, mais nous ne le mettons plus au service d'une anthropométrie ou d'une image idéale.