Après 1995, Kiefer consacre une série d'oeuvres à Lilith, dans la suite du travail qu'il a fait sur la Cabale juive. Lilith est présentée par ses vêtements vides. Ses figures se détachent sur un fond, photographique ou peint, de métropole urbaine. Le thème de Lilith absorbe celui de la Brisure des vases (Chevirat hakelim date de 1990).

Lilith est une créature démoniaque, révoltée et mélancolique. Evoquée une seule fois dans la bible (Is 34.14), elle condense des traditions diverses. Dans le talmud, c'est un démon femelle qui séduit les hommes et s'attaque aux femmes enceintes et aux nouveaux-nés. Identifiée à la première Eve qui demande à être son égale, elle est nommée par le Zohar prostituée, perverse, perfide, noire. C'est la reine des forces du mal, l'épouse de Sammaël. Ceux qui ont un comportement mélancolique sont appelés les fils de Lilith.

Chez Kiefer, c'est une figure féminine nue qui semble accueillir l'émanation divine. Le fait de l'associer à un paysage urbain évoque le châtiment divin des villes orgueilleuses. Lilith est la mère du peuple profane, la déesse tutélaire d'un monde d'où le sacré s'est retiré.