Dans son intention première, le surréalisme se définit comme "le procès de tout" : révolte absolue, insoumission totale, humour, culte de l'absurde, refus de toutes les déterminations du monde présent, évangile du désordre. Avec son non-conformisme de parade, il est l'héritier du romantisme comme du dandysme. C'est un cri de l'esprit, une inquiétude sans repos, une exaltation de l'innocence humaine, une revendication de liberté absolue de l'individu et de son désir (conscient et inconscient). Avec la théorie de l'acte gratuit, les entraves sont niées et l'irrationnel triomphe. Seul le désir d'être et de vivre est légitime. Tout le reste doit être détruit, y compris l'institution et la société. C'est cette volonté de destruction qui les a amenés un temps à une alliance avec la révolution et le matérialisme. Mais on ne peut être fidèle en même temps au marxisme et à la destruction du langage. La révolution n'était pour eux qu'un mythe pessimiste, un culte du génie et de l'individu héroïque, une apologie du merveilleux. Il ne s'agissait pas de donner aux hommes le bonheur, mais de défendre l'irrationnel, d'entretenir la révolte contre la révolution par une ascèse spirituelle. Breton a fini par rompre avec les communistes tout en continuant, dans la chiennerie de son temps, à exalter l'amour.