Ecouter de la musique comme musique implique qu'on ait la conscience vive d'une prescription : il faut être tout ouïe, entendre, déchiffrer. Mais pourquoi le faut-il? En quoi cette écoute est-elle spécifique, personnelle, identifiable comme une écoute déterminée, celle de tel auditeur? Et si elle l'est, que fait-elle à l'oeuvre? Peter Szendy explique qu'il ressent son écoute comme singulière, si singulière qu'il pourrait la signer, l'adresser à un autre, la transmettre. Son écoute, il voudrait qu'un autre l'entende - mais c'est impossible.

Peut-être un arrangeur peut-il, lui, faire entendre son écoute, la faire partager à un public. Mais alors il ne peut contourner les questions juridiques : il doit obtenir l'accord de l'auteur, rester fidèle à l'original, éviter le plagiat ou le pastiche, etc... Ici le droit de l'auditeur (s'il en est un), qui rejoint le droit d'auteur, est inséparable des devoirs de l'auditeur. Il lui faut respecter l'oeuvre, reconnaître les voies par lesquelles elle configure elle-même sa réception, accepter un droit du nom et, vis-à-vis d'elle, un devoir de vérité.