Rosalind Krauss compare le tableau ci-contre, achevé en 1869, avec Femmes au jardin, fini deux ans auparavant. Alors que le tableau de 1867, uniquement composé de triangles d'ombre et de lumière, manque d'unité, La Grenouillère bénéficie d'une composition extrêmement solide. Toutes les masses sombres (bateaux, ponton, baigneurs) sont fixées au bord du tableau, et se distinguent nettement du miroitement lumineux de l'eau. Les contrastes entre blancs et noirs influencés par la photographie (des nébuleuses de formes, irrégulières et disposées au hasard, équivalentes à ce que la nature donne l'impression de percevoir d'elle-même dans des techniques comme le calotype ou le daguérréotype) ne sont intelligibles que si leur flottement est limité par cette structure clairement reconnaissable. Entre d'une part le phénomène dépeint (l'unité du paysage, l'agencement intrinsèque de la nature), et d'autre part la composition et les coups de pinceau (l'unité imposée par le peintre [premier chapitre du texte moderniste]), une distinction nette est établie. Ainsi les "vérités" issues de la photographie peuvent-elles être intégrées sans donner une impression de brouillage ou d'indétermination.

On trouvera ici un tableau du même titre et fort ressemblant, peint par Renoir la même année 1869.