Benjamin oppose la méthode usuelle de l'historien, qu'il qualifie d'"historiciste", à la sienne, qu'il qualifie d'"historiographie matérialiste" [sans doute ne faut-il pas s'arrêter à ces mots, plutôt démodés aujourd'hui].

- l'historiciste manque d'armature théorique. Il procède par addition de la foule innombrables des choses qui se sont passées, alignées les unes après les autres dans un temps continu, homogène, celui de l'histoire universelle.

- l'historien matérialiste s'appuie sur "un principe constructif". L'objet historique est pour lui un objet théorique "à construire". Comment? Citation : "La pensée n'est pas seulement faite du mouvement des idées, mais aussi de leur blocage. Lorsque la pensée s'immobilise soudain dans une constellation saturée de tension, elle communique à cette dernière un choc qui se cristallise en monade". Ici la pensée de Benjamin est si condensée, elle-même si cristallisée, si construite, qu'on a toujours le sentiment de la trahir quand on l'analyse.

Voici à quoi l'on peut aboutir (en combinant les deux versions de cette thèse XVII) : (1) Tu arraches au temps qui passe un objet historique (2) en cet objet, les idées ou les pensées se sont bloquées, cristallisées (3) il n'y a pas que le passé qui soit bloqué et immobilisé en cet objet mais aussi le futur messianique qu'il porte (4) cet objet reste saturé de tensions, il est toujours actif (5) cet objet-image s'organise, il se constitue en monade (6) de cette constellation part un choc en retour qui est pour toi une chance car elle fait éclater la continuité historique (7) ainsi se dégage une vie individuelle, une oeuvre, une vie, une époque (6) tu t'appuies sur la monade dans le combat pour la libération du passé opprimé.