L'image dialectique, telle que Georges Didi-Huberman la définit à partir des thèses de Walter Benjamin, se passe de tout horizon. Elle reste proche de nous, simplement locale, fragmentaire. Les quelques lueurs qui survivent en elle n'ouvrent sur l'avenir que le temps d'un appel, d'une échappée fragile, d'un accident. Elles nous effleurent, sans nous inviter à aucune attente ni promettre aucune lumière, aucune totalité cachée, aucun progrès. L'image ne fait que passer, elle est intermittente, comme la luciole de Pasolini. C'est une apparition unique qui ne cite qu'un instant, une seconde investie par la pensée - et qui tombe ensuite telle une boule de feu. Plus tard, elle sera peut-être aperçue par un autre; elle survivra d'une autre façon. Elle décline peut-être, mais ne disparaît pas.

Elargir sa vision à un horizon, c'est renoncer à voir l'image comme une chose ouverte, inachevée, mobile. C'est privilégier l'au-delà, le lointain, l'immobile, le définitif, les temps arrêtés ou terminés du totalitarisme ou du Jugement dernier. Au contraire l'image franchit l'horizon. C'est un opérateur de crise qui démonte, analyse, conteste.