C'est ce qu'avance Derrida avant de critiquer Lacan de de manière assez dure. Lacan n'hésite-t-il pas à le piller sans le citer, presque à chacun de ses écrits? L'appareil théorique de Lacan n'est-il pas marqué par le logocentrisme le plus systématique? Lacan ne fabrique-t-il pas, comme d'autres psychanalystes, un appareil conceptuel qui résiste particulièrement à la déconstruction? N'abuse-t-il pas de la valeur de vérité sans la questionner ni la critiquer? Ne recourt-il pas massivement à Hegel et Heidegger sans aucune explication théorique ni systématique quant au statut de ces importations?

Pourquoi alors afficher cette proximité? A cause des effets critiques du discours lacanien, dont Derrida reconnaît l'importance et dont il ne tient pas à limiter la propagation, et aussi à cause de certaines proximités. Par exemple lorsque Lacan choisit La lettre volée d'Edgar Poe pour développer sa théorie de l'ordre symbolique et de la lettre indivisible, Derrida reprend le même texte pour développer sa théorie de la dissémination et de la structure restante de la lettre.

Dans cette longue note de 1971, Derrida ne donne finalement aucune justification précise de la proximité qu'il affirme avec Lacan. Il procèdera de manière analogue quelques pages plus loin (p127) à propos du sujet. Les points communs restent à découvrir : c'est la tâche de ceux qui héritent et de Lacan, et de Derrida.