Derrida
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de l'oeuvre

de Jacques Derrida

Un seul mot - ou un syntagme.

         
   
Derrida, plaisir, jouissance                     Derrida, plaisir, jouissance
Sources (*) : Plaisir présent, nostalgie d'une date               Plaisir présent, nostalgie d'une date
Jacques Derrida - "Séminaire "La bête et le souverain" Volume II (2002-2003)", Ed : Galilée, 2010, p89

 

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Derrida, le deuil

Déjà, depuis le commencement, je suis en deuil de moi-même; tous mes plaisirs sont d'hier, déjà passés d'avance, teintés de nostalgie

Derrida, le deuil
   
   
   
               
                       

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sur le livre

 

Holy Sonnet (John Donne (1572-1631), publié en1633)

 

Thou hast made me, and shall Thy work decay?

Repair me now, for now mine end doth haste;

I run to death, and Death meets me as fast,

And all my pleasures are like yesterday.

I dare not move my dim eyes any way;

Despair behind, and Death before doth cast

Such terror, and my feeble flesh doth waste

By sin in it, which it towards hell doth weigh.

Only Thou art above, and when towards Thee

By Thy leave I can look, I rise again;

But our old subtle foe so tempteth me,

That not one hour myself I can sustain.

Thy grace may wing me to prevent his art

And thou like adamant draw mine iron heart.

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On trouve dans la séance du 18 décembre 2002 du séminaire La bête et le souverain un passage très dense, qui semble presque interpolé, où Derrida articule ce qu'on pourrait appeler une théorie du plaisir. La justification de ce passage, l'occasion qui lui donne lieu, est l'analyse de ce moment où Robinson Crusoé découvre une trace de pied nu sur le sable (v. citation et photo ci-contre). A cette découverte qui pourrait le réjouir, il réagit par la terreur. Cette trace de pied humain, après toutes ces années, fait venir à son esprit les idées les plus extravagantes, les bizarreries les plus absurdes (p185 de l'édition Feedbooks). Il envisage toutes les hypothèses, y compris que Satan ait laissé une trace en ce lieu, dans le seul but de l'épouvanter. Mais il y a pire encore que le diable : des sauvages venus de le terre ferme qui pourraient revenir et le dévorer (p187). Contre ces sauvages, il ne trouve pas d'autre moyen de protection que d'ouvrir sa bible et de prier (p189). C'est cet effroi devant le risque de dévoration, qui conduit Robinson à la prière et à la religion, qui intéresse Derrida. Robinson ressentirait la trace du pied comme une archive qui déclencherait en lui une course à la mort, une course de vitesse que seule la religion peut atténuer. Cette course à la mort, c'est celle qui est décrite dans le sonnet de John Donne reproduit ci-dessus, publié en 1633 (le livre de Daniel Defoe, Robinson Crusoé, est daté de 1719) et qui, lui aussi, reconduit à la religion.

Citation de Jacques Derrida : "Dans ce livre-bestiaire qui forme une île entre le paradis et l'enfer, il y a un moment, et c'est celui qui suit immédiatement la découverte de la trace de pied nu qui pourrait être le sien ou celui de l'autre, sur ce chemin qu'il peut avoir déjà emprunté ou qui reste le chemin de l'autre, il y a un moment où Robinson bat en retraite. Il se replie dans ce qu'il appelle son Château, il se sauve, il se sent suivi par une trace, en somme, chassé ou traqué par une trace. Voire par sa propre trace. Peut-être persécuté par lui-même et par sa propre revenance. Comme s'il vivait tout au passé de son propre passé comme avenir terrifiant. Il croit qu'il va bientôt mourir, qu'il court après sa mort ou que la mort lui court après, que la vie aura été si courte, et donc, comme s'il était déjà mort, à cause de cette course de vitesse avec sa revenance, tout ce qui lui arrive lui arrive non pas comme nouveau, neuf ou à venir, mais comme (peut-être, il n'en sait trop rien) déjà passé, déjà vu, à venir comme hier et non comme demain. Vous connaissez ce vers sublime et infini de John Donne, qui revient de je ne sais plus où à ma mémoire : I run to Death and Death meets me as fast / And all my Pleasures are like Yesterday. (Séminaire La bête et le souverain, tome 2, pp85-86).

 

 

Robinson Crusoé mesurant son pied et constatant que cette trace n'est pas la sienne (Film de Luis Bunuel, Robinson Crusoé, 1954).

C'est le moment où Robinson comprend qu'il y a d'autres traces possibles que celle de son propre pied. Cette île ne lui appartient pas, pas à lui seul. Il a tout fait pour la transformer, la rendre habitable, l'ajuster à sa personnalité, son mode de vie, mais voici qu'il trouve sur le sable une empreinte qui vient d'un autre. Ses tentatives de restaurer sa vie passée en ce lieu lointain risquent d'échouer. C'est une menace sur sa nostalgie, sur la circularité qu'il voudrait instaurer. La trace de l'autre l'oblige à un deuil qu'il aurait voulu éviter à tout prix, celui de soi-même.

 


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