Pour concilier une morale rationnelle fondée sur la liberté et la dignité de la personne humaine avec les lois de la nature, Kant espérait pouvoir prendre appui sur la biologie vitaliste de son temps. Mais cette belle métaphysique ne résiste pas aux succès récents de la biologie. Plus on explique la vie par des déterminismes cellulaires, physico-chimiques, impersonnels, et plus la notion de personne, avec son libre-arbitre, tend à disparaître. Comme l'avait soutenu Spinoza, la volonté libre apparaît comme une illusion produite par l'ignorance des causes affectant les corps. On ne peut plus imaginer fonder la notion de personne humaine sur la biologie ou la science, mais seulement sur le droit. D'ailleurs, la source de la notion de persona est le droit romain - on ne la trouve ni dans d'autres cultures, ni dans la tradition hébraïque. Le respect des personnes, enraciné dans la généalogie des morales caractéristique de l'espèce humaine, passe par le respect des lois de la société.

Les hommes ne sont différents des choses et des animaux que par leur statut juridique. S'ils ont une responsabilité, c'est en raison de leurs obligations légales et de leurs drois.