C'est Judith Butler elle-même qui parle de "postféminisme", sans reprendre explicitement à son compte cette catégorie. Eric Fassin, dans sa préface (p8), fait remarquer que le livre Trouble dans le genre essaie de penser ensemble le féminisme et la subversion de l'identité. En tant que féministe elle-même, homosexuelle et militante queer, Butler refuse de hiérarchiser les identifications. Elle exige de soumettre à la question l'identité "femme", et aussi l'identité "lesbienne". Qu'on définisse l'une ou l'autre par le genre ou par les pratiques sexuelles (p12), on est confronté à des normes. Lorsque les normes de genre et celles de la sexualité s'entrechoquent, alors commence le "trouble" du genre. Prendre ses distances à l'égard de la norme (toute norme) implique de penser en des termes radicalement nouveaux ces "plaques tectoniques" [de la normativité].

Selon Butler, on ne peut construire une catégorie "femmes"cohérente que dans le cadre d'une matrice hétérosexuelle. Si l'on se donne pour but politique d'abandonner cette prémisse et pour tâche critique d'établir une généalogie de la catégorie "femmes" (analyser les conditions de possibilité et d'émergence du sujet de droit du féminisme), alors le fondement de la politique féministe ne doit plus être l'identité du sujet-femme.