Le terme "pop" a été inventé par le critique d'art Lawrence Alloway au début des années 1960. Il désigne une pratique où les arts populaires sont traités comme des arts sérieux. Il ne s'agit pas d'utiliser la culture populaire, il s'agit de la transfigurer. La boîte de soupe Campbell n'est plus une boîte de soupe, et Marilyn Monroe n'est plus une starlette de cinéma. Elle est transformée en icône, adorée comme un Dieu - à la façon dont le Christ est adoré dans la religion catholique. C'est cette transfiguration qui explique la popularité immense du Pop Art.

Ce n'est pas un hasard si le Pop Art apparaît au début des années 1960. Au même moment, la "philosophie du langage ordinaire" de Wittgenstein ou d'Austin, qui dénonce ce qu'elle appelle la métaphysique [de la philosophie traditionnelle], se répand parmi les philosophes. Il faut refonder la philosophie à partir de l'expérience, de l'observation et des mots de la langue commune. En art, on commence à rejeter l'expressionnisme abstrait pour célébrer les objets les plus ordinaires de la vie courante : boîtes de lessive, cornflakes ou morceaux de fromage. Non seulement on les réhabilite, mais on en fait de l'art. Au moment où se développent les mouvements pour les droits civiques, pour les droits des femmes ou contre la guerre du Vietnam, on se désintéresse de la transcendance, on exige des résultats immédiats.

Comme Brigitte Bardot de l'autre côté de l'Atlantique, Marilyn Monroe, transformée en icône, porte est porteuse d'une exigence de libération ou de bonheur immédiat qui la dépasse. Elle le paiera cher. Quant à BB, elle ne survivra qu'au prix d'un reniement qui continue à attrister tous ses admirateurs.