Je reçois un ordre. Je ne sais pas d'où, j'ignore ce dont il s'agit, mais il me parle.

Dans sa méditation à propos du contrat, de la promesse ou des performatifs juridiques ou politiques, Paul de Man n'a cessé de méditer sur cet ordre de la loi sans lequel on ne peut pas nommer. Jacques Derrida reprend cette méditation à propos de la mémoire, dont l'essence intrigue, entre l'être et la loi. La mémoire a la forme d'un anneau qui engage en-deça et au-delà de tout. Un Oui se répète. Oui, oui, je suis lié à la mémoire pour la mémoire. Je la garde, en secret.

Mais l'être et la loi ne peuvent pas se rassembler. Telle est la loi de la loi : la mémoire qui vient comme relais, comme supplément, n'est pas totale. La loi est inaccessible, on ne peut pas y toucher, et pourtant il faut l'intérioriser. C'est une nécessité incontrôlable, non subjectivable, que nous l'aimions ou non. C'est ainsi que l'autre se manifeste. Il a déjà parlé. Il n'est plus rien, mais il s'affirme irréductiblement, et nous ne pouvons pas en faire le deuil.