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Le nazisme s'oppose frontalement aux valeurs européennes : violence contre droit, mépris de l'éthique contre loi morale, racisme contre égalité, guerre contre paix, dictature contre démocratie, rejet de l'altérite contre respect d'autrui, etc. Cette opposition n'est pas contestable, mais elle laisse ouverte une interrogation. Pourquoi le nazisme est-il justement apparu au cœur de l'Europe, dans le pays le plus développé, où la philosophie et l'histoire de l'art semblaient les mieux implantés ? Pourquoi son argumentaire reprenait-il, de façon certes caricaturale mais crédible, de nombreux thèmes de la culture humaniste européenne ? Et pourquoi retrouve-t-on ce paradoxe dans les populismes d'aujourd'hui ? Il faut croire que la tradition européenne contient en elle-même ses paradoxes, et que des auteurs très ambigus comme Friedrich Nietzsche, Martin Heidegger ou Carl Schmitt sont porteurs de valeurs reconnues dans les deux camps (exemples : la souveraineté, la spiritualité). Les nazis ont voulu, avec la Shoah, mettre à mort l'éthique, mais c'était, de leur point de vue, au nom de ce qu'ils croyaient être une éthique supérieure. On sait qu'une large partie de la société, y compris la plus cultivée, partageait ce point de vue. Ils ont voulu détruire l'art moderne en le remplaçant par une esthétique qu'il croyaient supérieure, et qui était effectivement plus proche des canons classiques de la culture européenne que la littérature ou la peinture de leur temps.
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Propositions
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- Avec la Shoah, c'est toute la philosophie, la métaphysique et la rationalité occidentales et européennes qui sont radicalement soumises à la question
- Il faut tenter de penser le nazisme depuis son autre : la possibilité de la singularité, de la signature et du nom
- Le nazisme a montré que la langue pouvait devenir folle - et entraîner avec elle la loi et l'origine du sens
- [L'État nazi, comme le téléphone, se destine à la jouissance de l'oreille]
- Le totalitarisme subordonne les institutions légitimées par l'idée de liberté à la légitimation par le mythe d'une chaîne de transmission fondée sur des noms propres
- Il faut lire Heidegger, car toute la culture européenne partage sa pensée de l'esprit, son spiritualisme à l'œuvre dans le discours nazi
- Axiome schmittien : la politique surgit avec la figure de l'ennemi; si cette marque différentielle s'efface, alors c'est la différence même qui s'efface
- Nous ne savons pas encore penser le nazisme, car la machine à produire les énoncés nazis peut aussi produire des énoncés anti-nazis
- On ne peut raconter la Shoah que sans remuer les lèvres
- Le nazisme est le pire moment dans l'histoire de la technologie
- A l'esthétisation de la vie politique résultant de la technique et de la montée du fascisme, le communisme doit répondre par la politisation de l'art
- Au racisme, il ne faut pas opposer une fraternité générique des hommes, mais la dis-location de nos races et de nos traits
- L'invention du film parlant est concomitante du fascisme; les deux sont liés à la crise économique
- [(CinéAnalyse) : En scrutant les émanations, émissions et déjections nazies de notre propre culture]
- La Shoah est unique car, en exterminant les Juifs, les nazis ont voulu détruire la Loi du Sinaï et les Commandements, en tant qu'ils témoignent du trésor éthique commun à l'humanité
- On peut analyser la Shoah, qui vise la destruction du peuple de l'alliance, comme crime contre la Loi (la Torah du Sinaï), mise à mort de l'éthique
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