Descartes se demande s'il peut connaître, de manière claire et distincte, les objets les plus familiers, ceux qu'il peut voir et toucher. Par exemple ce morceau de cire qui vient d'être tiré de la ruche. [Ici, on ne peut pas renoncer au plaisir de le citer textuellement]. "Il n'a pas encore perdu la douceur du miel qu'il contenait, il retient encore quelque chose de l'odeur des fleurs dont il a été recueilli; sa couleur, sa figure, sa grandeur, sont apparentes; il est dur, il est froid, on le touche, et si vous le frappez, il rendra quelque son" [N'est-ce pas magnifique?].

Mais que se passe-t-il si l'on approche la cire du feu [Vade retro, Satanas!]? "ce qui y restait de saveur s'exhale, l'odeur s'évanouit, sa couleur se change, sa figure se perd, sa grandeur augmente, il devient liquide, il s'échauffe, à peine le peut-on toucher, et quoiqu'on le frappe, il ne rendra plus aucun son".

Mais alors, s'agit-il de la même cire? Bien sûr! [car l'idée de la cire, qui est dans l'esprit, ne doit pas être confondue avec ce petit tas "étendu, flexible et muable", qui est un corps]. La cire, on ne peut pas la concevoir par l'imagination, mais seulement par l'entendement ou l'esprit, et alors [merveille des merveille], elle est claire et distincte [CQFD].

Ces morceaux de cire ne sortent pas directement de la ruche. Ils ont été peints en rouge et projetés contre un mur... (ne me demandez pas pourquoi, et ne demandez pas non plus à Descartes...)