Le tableau de Petrus Christus cité par Panofsky est la Madone, et celui de Dirk Bouts, la Cène, reproduite ci-contre. Jan Van Eyck ne faisait pas converger ses lignes en un point unique, mais plutôt en une zone de fuite assez vague (autour du miroir et de la signature dans le cas du Portrait des époux Arnolfini). Ses plans sont distincts, comme ceux de Lorenzetti. Dirk Bouts était plus précis, comme le montre ce schéma. Pour que le point de fuite s'unifie complètement, l'Allemagne a attendu Dürer, qui a emprunté le procédé aux italiens.

Les peintres du Nord sont arrivés à ce résultat par la voie empirique, tandis que les italiens ont inventé la costruzione legittima aux alentours de 1420 par la voie conceptuelle, en utilisant la théorie et la pratique mathématique. La fresque de la Trinité de Masaccio présente déjà une construction exacte et unifiée.

A noter que le point de fuite de cette Cène n'est pas dans la bouche du Christ, comme on pourrait l'imaginer, mais sur le linteau au-dessus de la porte. La bénédiction du Christ ne concentre pas toute l'attention des apôtres (deux d'entre eux bavardent sur sa droite). Contrairement à celle de Léonard de Vinci. Néammoins cette scène n'est pas mouvante, elle est en arrêt sous l'autorité.