Y a-t-il une tradition hébraïque, pluriséculaire, liée au peuple juif qui l'a transmise jusqu'à aujourd'hui sous son armure rituelle, mais qui ne serait ni religieuse, ni spécifiquement attachée au peuple juif, une tradition qu'on pourrait recueillir aujourd'hui, dans ce monde sécularisé, et dire dans d'autres mots, traduire dans les mots de chaque langue? Si cette tradition existe, elle est complexe, cachée, secrète, imprononçable comme un schibboleth, inséparable de la langue hébraïque [redevenue miraculeusement vivante], mais descriptible et formulable dans toutes les langues courantes - sans exception - et dans tous les idiomes de ce temps.

De même qu'il est impossible de définir positivement un être juif?, car toute définition est débordée par d'autres définitions, on ne peut réduire cette tradition à aucune idéologie positive. Elle est passage, rupture et aussi création. Elle a produit le monothéisme et aussi la Cabale. Elle trouve dans les concepts et les rituels hébraïques l'occasion de remettre en question les évidences de la modernité. Il ne s'agit pas de revenir à ces pratiques, mais au contraire de franchir le fleuve, encore une fois, une nouvelle fois, pour aller avec crainte dans une direction inconnue. Des mots bibliques sont évoqués, comme manne, ou des lettres comme aleph, ou des rites comme circoncision, ou des institutions comme le temple, ils sont pris au sérieux mais ne sont plus mis en pratique. On les interprète comme on interprètait les sacrifices animaux abandonnés lors de la destruction du second temple. La communauté qu'ils inscrivent dans l'espace n'est plus un peuple - et d'ailleurs, ce n'est même plus une communauté. C'est peut-être une voix, à moins que ce ne soit la forme sous laquelle, nous modernes, nous gardons sous notre carapace quelques relents d'espoir messianique.

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Propositions

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