Derrida lisant Nietzsche, après plusieurs pages sur le rapport entre femme, castration et vérité, fait appel à Heidegger. Pourquoi? Lui-même se sent probablement un peu mal à l'aise, car il se sent obligé, en deux pages, d'expliquer. Il aura fallu, dans ce texte, qu'il donne une raison de son recours à Heidegger, par ailleurs très fréquent dans son œuvre. Alors qu'il y a entre eux des divergences majeures, alors que souvent (et même presque toujours) ce recours se traduit par une prise de distance, il en assume la nécessité. Voici le texte de la troisième mise en garde qu'il nous propose : "Nécessité de lire Nietzsche en interrogeant sans cesse l'histoire de l'Occident, faute de quoi, surtout quand on prétend en finir avec de séculaires illusions, on ne fait que ruminer des idées reçues et l'on est "sans appel", "frappé par la sentence de l'histoire" (Derrida cite le Nietzsche de Heidegger, tome 1 pages 117 et 184).

Heidegger, pour Derrida, brise une certaine circularité logocentrique. Il faut le suivre sur ce terrain, mais une fois entamée la brisure, il faut le suivre autrement.

Portrait d'Aristote d'après un original en bronze de Lysippe.