L'absurde est essentiellement un divorce. Il naît d'une comparaison, d'un écart entre une action et un monde qui la dépasse. Exemples donnés par Camus : un homme qui attaque à l'arme blanche un groupe de mitrailleuses, un verdict contraire à ce que les faits commandent. Chaque fois, il y a contradiction entre une situation et une certaine réalité. L'absurde n'est ni dans l'un, ni dans l'autre, mais dans leur confrontation. En-dehors d'un esprit humain et en-dehors de ce monde, il ne peut y avoir d'absurde. Y mettre fin par le suicide serait y consentir, ce à quoi Camus ne se résoud pas. Que faire alors? Faut-il renoncer à tout espoir, ne plus appartenir à l'avenir? Faut-il choisir l'évasion? Cela impliquerait de diviniser ce qui écrase, de trouver une issue dans la mystique, la religion, l'irrationnel ou la transcendance - ce qui reviendrait à renoncer à la lutte. Faut-il chercher des explications rationnelles? Ce serait une autre façon de prétendre à l'éternel.

Cet état de l'absurde, il s'agit d'y vivre, dit Camus. Ne se résigner ni à l'illusion, ni au mensonge, s'arranger du déraisonnable comme du désespoir, rester fidèle à l'évidence de l'absurde, se maintenir avec honnêteté, sans subterfuge, sur son arête vertigineuse. Par quelle règle de vie?