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TABLE des MATIERES : |
NIVEAUX DE SENS : | |||||||||||||||||
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L'écranophile en voix off | L'écranophile en voix off |
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Sources (*) : |
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CinéAnalyse : il faut que je te porte, dans l'être | CinéAnalyse : il faut que je te porte, dans l'être |
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Ozzy Gorgo - "L'écranophile", Ed : Guilgal, 1988-2019, Page créée le 4 février 2023 - |
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CinéAnalyse : le deuil impossible | Un soupçon d'amour (Paul Vecchiali, 2020) - "Il faut que je te porte" - à l'adresse d'un mort, cette phrase est mortifère |
CinéAnalyse : le deuil impossible |
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CinéAnalyse : autobiographies | CinéAnalyse : autobiographies |
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C'est un film qui prend son sens à partir des dernières minutes, quand on comprend que le fils de Geneviève1, Jérôme, est mort depuis 20 ans à l’âge de 12 ans. Pendant deux décennies, Geneviève a vécu avec ce mort, sans se détacher de lui, dans une sorte d’illusion qu’il habitait toujours auprès d’elle – une illusion qui n’était ni une folie ni une hallucination, mais plutôt une posture d’actrice2. Son mari André s’interdisait, lui aussi, de prononcer la phrase : Jérôme est mort, il lui disait de temps en temps : Tu ne devrais pas vivre avec lui, mais lui, pour son compte, avait, comme on dit, fait son deuil. Toujours amoureux de Geneviève, il ne pouvait ni la suivre dans sa dénégation, ni lui rendre Jérôme, alors il a fait le choix de continuer à vivre, il a pris pour amante la meilleure amie de sa femme, Isabelle. Isabelle ne vaut pas Geneviève, et elle le sait. Moins bonne actrice3, elle est aussi moins belle, moins émouvante et moins aimée, et dans son rôle de tenant-lieu, elle se sent mal à l’aise. Tant bien que mal, le trio peut fonctionner, jusqu’au moment où Geneviève décide de revenir dans sa Provence natale4, en compagnie de ce Jérôme dont elle ne peut pas se séparer. Dans le lieu de sa jeunesse, elle retrouve une amie d’enfance et un ex-amoureux devenu prêtre5. C’est elle qui décide de se rendre au cimetière. N’est-ce pas le seul endroit où elle puisse, vraiment, se rapprocher de son fils ? Et aussi le seul endroit où elle sera confrontée à sa tombe. De loin, Isabelle devine que c’est le moment de faire revenir Geneviève à Paris, chez elle. Il aura fallu ce périple pour qu’André, enfin, prononce la phrase interdite : Jérôme est mort. C’est le moment de leurs retrouvailles. |
Geneviève et son fils Jérôme en position d'acteurs, se donnant la réplique l'un à l'autre.
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Geneviève ne pouvait pas supporter le deuil conventionnel, celui qui implique de se débarrasser du mort, de ne conserver de lui que quelques traces dans un océan d’oubli. Elle ne pouvait pas laisser Jérôme rejoindre le destin usuel des défunts. L’absence définitive, irrémédiable de son fils, était insupportable. Pour que le mort revienne à la présence, il fallait accepter que cette présence soit étouffante, cadavérique6. En parcourant le cimetière, elle a compris qu’il était temps de s’engager dans une autre direction, la spectralisation du mort. Un cadavre est lourd, impossible à porter, tandis qu’un spectre n’a pas de poids (il n’est ni léger, ni lourd). On peut l’appeler, le convoquer, le transformer, le repousser, l’éviter, etc., et de son côté, lui, il peut résister, insister, croître ou diminuer, il peut se retirer, s’absenter ou se répéter, il a tous les droits, comme nous. Un spectre, ça bouge et on peut bouger devant lui. Il s’inscrit dans une dynamique, un mouvement. On peut s’adresser à lui, lui dire Je t’aime ou Je te hais, on peut choisir l’indifférence, la distanciation ou au contraire lui proposer de le soutenir, de l’aider. Il fait ce qu’un cadavre est incapable de faire : répondre. Qu’importe la façon dont il répond (silence, acquiescement ou refus), la liberté de l’un et de l’autre est préservée. Geneviève a voulu porter dans ses bras son fils mort, elle s’est épuisée. Au lieu de coexister avec son fantôme, elle a croulé sous son poids, et dans la même chute, elle a fait vaciller son couple. Mais le fils disparu n’est pas la seule présence incongrue du film : il y a aussi Paul Vecchiali lui-même. C’est lui qui a réalisé ce film à l’économie, sans fioritures, dans un style simple voire simpliste que certains ont qualifié de sénile. Il ne s’agissait pas seulement pour cet homme de 90 ans de faire revivre sa sœur7 et de se positionner lui-même8 à la limite de la vie. Il s’agissait de faire, par anticipation, son propre deuil. Dans une scène centrale, il danse avec Isabelle, unique vieillard dans un groupe d’adolescents. C’est une façon d’affirmer sa liberté, une liberté au-delà de la liberté, une liberté spectrale. Avant de partir9, il revient. En disant à ses compagnons et aux spectateurs Je suis mort, il les délivre par avance de son cadavre. |
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Création
: Guilgal |
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Idixa
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Films CinemaChrono 2020.VE.CCH EthiqueEparCQ.KDD CineDeuilDH.OLK AutoBioQS.KDD zm.Vecchiali.2020 Rang = YVecchialiSoupconAmourGenre = MH - NP |
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