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TABLE des MATIERES : |
NIVEAUX DE SENS : | |||||||||||||||||
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L'écranophile en voix off | L'écranophile en voix off |
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Sources (*) : |
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CinéAnalyse : archi - amour, l'amour d'avant l'amour | CinéAnalyse : archi - amour, l'amour d'avant l'amour |
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Ozzy Gorgo - "L'écranophile", Ed : Guilgal, 1988-2019, Page créée le 30 sept 2022 - |
Avec amour et acharnement (Claire Denis, 2022) - Vivre sous la contrainte d'un devoir d'amour, un archi-amour indéterminé, insaisissable |
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On peut s'interroger sur ce qui pousse Sara1 à se maintenir dans la dépendance psychologique de deux hommes dont on devine qu'au fond d'elle-même, ils ne méritent pas vraiment son respect. Alors qu'elle est dévouée, encore séduisante malgré les années, alors qu'elle vit dans un bel appartement donnant sur les toits de Paris, alors que son travail régulier à la radio lui ménage probablement (ou pourrait lui ménager) des rencontres aussi variées que stimulantes, elle choisit de vivre successivement avec deux amateurs de rugby, d'abord François2 qu'elle quitte à cause de son indifférence et ensuite Jean3 sur lequel elle se rabat à cause de sa fidélité. Depuis un séjour en prison dont, semble-t-il, François partage la responsabilité, Jean ne travaille pas et s'occupe assez peu du fils qu'il a eu d'un précédent mariage (Marcus4). Il dépend financièrement de Sara5, comme Marcus dépend financièrement de sa grand-mère6. Le cœur du film est l'incapacité de Sara à se dégager de sa relation à ces deux hommes aussi toxiques l'un que l'autre, quoique de façon différente. François est pervers, on ne peut pas lui faire confiance. Il affirme son amour, et ensuite trahit Sara en racontant tout à Jean, en lui montrant les textos qu'elle lui a écrits. Sa perversion s'exerce contre Sara, mais aussi contre Jean, ce garçon sincère. Il se sert de lui, comme il s'en est servi pour la prison. Jean ne raconte presque rien à Sara, elle ne sait pas exactement en quoi consiste son travail avec François. Elle a de la nostalgie pour sa vie avec François, c’est lui qu’elle préfère7, mais au moment de choisir, de trancher, c’est comme si elle était au bord du gouffre, elle n’y arrive pas. Ce gouffre est l’énigme du film. Où craint-elle de tomber ? |
Sara retombe amoureuse, et c'est une chute.
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Sara n’arrête pas de parler d’amour, on a l’impression qu’elle ne vit que par rapport à ça, l’amour8. Un jour où elle croise François par hasard9, elle peut à peine contrôler son émotion. Que lui arrive-t-il ? Il se pourrait qu’il ne s’agisse pas de l’amour pour l’un ou pour l’autre, pour une personne déterminée, mais d’autre chose, un amour qui la saisit en-deçà de tout contrôle, un archi-amour. Il y aurait une passion plus ancienne qu’ancienne à laquelle son existence serait vouée. Sans qu’elle sache pourquoi, sans qu’elle puisse y résister, il faut qu’elle y acquiesce. Avant toute relation à autrui, une exigence s’impose à elle : il faut aimer. Sans le préalable inaccessible d’un amour sans objet, elle ne peut pas vivre. Pour réduire sa souffrance, pour donner corps à cette obligation, elle n’a pas d’autre choix que de faire porter l’amour sur quelqu’un. Il faut un François, un Jean, un personnage concret, vivant. Elle n’ignore pas qu’elle se ment à elle-même, elle n’est pas dupe de la mascarade qu’elle se joue, mais elle ne peut pas faire autrement, jusqu’à ce qu’un événement la ramène à la réalité : son téléphone chute dans le bain. Le téléphone est mort, fichu, tout son contenu est perdu. Pour Sara, cette perte inattendue est une sorte de renaissance. Vidé des exigences passées, le téléphone immergé se présente comme une matrice neuve, la possibilité d’un nouveau baptême. Elle s’en va dans la rue, solitaire, soudain libre. À quoi sert Marcus dans cette histoire10? Dans le générique de fin11, on le voit réconcilié avec son père quand celui-ci revient à Vitry, son lieu d’origine12. Jean sait que dans ce bel appartement parisien, il n’est pas à sa place. L’amour excessif de Sara l’oblige à s’éloigner de temps en temps, à faire ses courses ailleurs, en un lieu où il sera reconnu pour ce qu’il est. Quand il parle à son fils, il insiste sur la singularité. Lui se nomme Jean, son être est Jean, son fils se nomme Marcus, son être est Marcus, ils sont irréductibles à ce qu'on dit d'eux (l'ex- taulard, le Noir, l’élève médiocre, etc.). Cette singularité manque à Sara. En la quittant, Jean se débarrasse de la rhétorique de l’amour. Il faut que Sara se libère de Jean pour que Jean se libère de Sara. Sara est-elle pour autant débarrassée de l’archi-amour qui, pendant tant d’années, a gouverné ses choix, ses affects ? On peut en douter13. Il se pourrait que tout revienne, avec d’autres Jean, d’autres François. |
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Création
: Guilgal |
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Idixa
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Films CinemaChrono 2022.DE.NIS ProEtreDN.KKL zm.Denis.2022 Rang = YDenisAmourAcharnementGenre = MH - NP |
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