Derrida
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L'écranophile en voix off                     L'écranophile en voix off
Sources (*) : CinéAnalyse : en laissant l'autre venir chez soi (hospitalité)               CinéAnalyse : en laissant l'autre venir chez soi (hospitalité)
Ozzy Gorgo - "L'écranophile", Ed : Guilgal, 1988-2019, Page créée le 20 novembre 2021

 

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Adieu (Arnaud des Pallières, 2003) - Sans hospitalité, il n'y a ni promesse, ni altérité, ni avenir

   
   
   
                 
                       

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Ismaël quitte l'Algérie d'urgence car il est menacé par des ennemis (non nommés) qui l'ont menacé de mort, lui ont volé les écrits de son père et se sont introduits chez lui. Sa femme Leïla et sa fille, qu'il nomme ma Princesse, ont été mises à l'abri. Il écrit une première lettre à sa femme et ensuite une série de lettres à sa fille, mais plutôt que de lui raconter son voyage à travers la Méditerranée puis la France, il raconte une autre histoire, celle du prophète biblique, Jonas. C'est la toute première énigme du film, la plus étrange, la plus incompréhensible au premier abord. Pourquoi Ismaël s'identifie-t-il à Jonas ? S'il s'enfuit, ce n'est pas à la suite d'un appel divin, c'est pour se protéger. Ce n'est pas à Dieu qu'il s'adresse, mais d'abord à sa femme et à sa fille, la princesse, auxquelles il ne promet rien d'autre que son retour, dès que possible, vivant. L'engagement est fragile, terriblement incertain, mais c'est le sien. Pourquoi le réalisateur a-t-il choisi précisément cette histoire, et nulle autre ? Alors que dans le récit biblique, la question posée est celle du pardon (finalement accordé aux habitants de Ninive), dans le film, c'est celle de l'hospitalité. En quittant son pays, l'Ismaël du film fuit une Ninive algérienne pour se retrouver dans une autre Ninive, tout aussi corrompue. Il ne demande presque rien, juste la possibilité de vivre ici quelque temps, mais personne ne lui répond. Comme Jonas, il se retrouve enfermé dans un ventre monstrueux, un camion machinique. Il écrit à sa fille, sa princesse, comme s'il s'adressait à Dieu. Mais alors qu'à l'époque de Jonas, cet appel pouvait être entendu, à notre époque, il résonne dans le vide. Les habitants ne reconnaîtront pas leurs fautes, ils ne se convertiront pas, et la dureté des temps se retournera contre Jonas. Nous vivons un temps sans pardon ni miséricorde, où le monde continue à fonctionner comme un univers machinique, brutal. Le curé perd la foi, les fils du paysan ignorent ce qui se passe autour d'eux, Ismaël débarque dans un pays vide de pensée, un pays dans lequel la fraternité est ensevelie aux côtés des cochons et des fils de famille qui disparaissent dans des accidents de voiture.

Ismaël-Jonas poussé vers l'avion de retour par les autorités françaises.

 

 

Le mot hospitalité n'est jamais prononcé dans le film, mais il est partout sous-jacent. Il n'y a pas d'hospitalité, dit-il, il n'y en a nulle part. Partout elle est refusée, aussi bien en France qu'en Algérie, mais il y a pire : elle n'est même pas demandée. Ismaël n'attend rien de la France, mais il souhaite y rester quelque temps - façon détournée de la solliciter quand même ou de la présupposer. Il n'attend rien de l'Algérie, mais il espère pouvoir y revenir. Il n'a jamais envisagé que son voyage se prolonge ailleurs : depuis le départ, il s'agit d'un circuit qui doit le ramener chez lui. Comme Jonas, il sait qui il est, il sait d'où il appartient, et il n'a aucune intention de changer.

L'idée d'avoir été retenu pour une mission, d'avoir été élu, n'est pas introduite à propos d'Ismaël, mais à propos du prêtre quand il s'adresse à son confesseur. Le prêtre déclare qu'il n'a pas tout à fait renoncé à l'élection, mais qu'il ne sait pas ce que cela signifie. Cette position est aussi celle d'Ismaël qui se réfère à Jonas, le prophète, en vidant la prophétie de tout contenu.

Les paysans vivent entre des bâtiments, entre des murs, sans jamais s'exposer à l'extériorité. Restant entre eux, ils ne croient ni en Dieu, ni en l'altérité. Ils sont chez eux, pris dans un fonctionnement quotidien qui est leur seul souci. Leur répétition aveugle d'un cycle de vie toujours identique résonne avec la problématique du camion, de l'usine, de la fabrication. Apparemment le camion n'est qu'une machine, mais il a lui aussi un secret : le transport des immigrés. De même que l'absence de mère, de descendant pour les paysans est un non-dit du film, l'usage illégal du camion est un non-dit du système industriel. Le fond du camion est comme le fond de la baleine : l'endroit où se noue le rapport à la mort, à la survie et à une construction éventuelle de l'avenir. Le film se termine par le long passage de l'avion dans le champ, puis sa disparition hors-champ - comme si c'était là, en-dehors du champ, que l'aventure de Jonas pouvait se prolonger.

 


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