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TABLE des MATIERES : |
NIVEAUX DE SENS : | |||||||||||||||||
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L'écranophile en voix off | L'écranophile en voix off |
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Sources (*) : |
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CinéAnalyse : en déclarant l'exception souveraine | CinéAnalyse : en déclarant l'exception souveraine |
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Ozzy Gorgo - "L'écranophile", Ed : Guilgal, 1988-2019, Page créée le 24 novembre 2019 - |
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CinéAnalyse : autohétérobiographies | Les Misérables (Ladj Ly, 2019) - Le souverain de banlieue, ce jeune (lionceau) incontrôlable, introduit l'imprévisible, l'incalculable, dans le lieu clos de la cité |
CinéAnalyse : autohétérobiographies |
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CinéAnalyse : en posant le voyou | CinéAnalyse : en posant le voyou |
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CinéAnalyse : en nommant, d'un (ani)mot, l'animal | CinéAnalyse : en nommant, d'un (ani)mot, l'animal |
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Orlolivre : conjuguer vie et mort, sans les opposer | Orlolivre : conjuguer vie et mort, sans les opposer |
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Etrange ressemblance avec un autre film de la même année, Joker (Todd Phillips, 2019). Le Joker de ce film est le Gavroche local, Issa (qui porte le même prénom que l'acteur, Issa Perica), jeune garçon qui se transformera en une sorte de juge qui se donne à lui-même le droit de condamner à mort ou de gracier les trois prisonniers. Quelle que soit sa décision (qui reste incertaine dans les dernières images, quand la scène de l'escalier se clot dans l'obscurité), tout se passe comme si Issa occupait la place du souverain, et ce n'est pas un hasard si son aventure a commencé par le vol d'un lionceau, roi des animaux par excellence, symbole des princes auquel il sera directement confronté dans une cage (la cage du lion, qui deviendra à la fin du film une cage d'escalier). Les autres souverains du lieu, gitans, malfrats ou flics ne pouvaient que lui disputer la possession de l'animal. Ce jeune révolté est un habitué des "bêtises". Son père lui crie après, mais n'a aucune influence sur lui. Personne ne peut le contrôler, ni la police, ni même ses copains qui sont surpris par ses initiatives. Sa nature, c'est d'être quelque part en-dehors des clous, imprévisible, exceptionnel et déjà, à sa façon, souverain. Après la "bavure" où il reçoit un tir de LBD en plein visage, Issa n'est plus le même. Il n'est plus ni un jeune en dérive ni un ado en bisbille avec ses parents, mais un maître, un chef, un adulte surpuissant qui dirige une foule de "microbes" (c'est ainsi que Chris les nomme) en colère qui ont vécu les mêmes humiliations que lui. Sa vengeance est celle de tous. Nul ne peut retenir ni empêcher une violence quasi-divine, au-dessus des lois. En défigurant Issa, les flics en ont fait une autre personne, un autre homme ou un homme autre, un hyper-souverain qui, comme le clown Joker de Todd Philips, prend son rire au sérieux. Ils l'ont transfiguré. C'est un film où il n'y a ni pouvoir politique, ni école, ni famille, ni drogue, ni terrorisme, ni armes, ni rap. Les clichés ordinaires, plus ou moins bien- ou mal-veillants, sont effacés. Dans ce quartier abandonné, la police, les caïds et les jeunes sont directement confrontés les uns aux autres. En l'absence de toute autre instance "légitime", les compromis se passent entre eux. Ceux qui, parmi eux, se présentent comme des médiateurs sont des faux médiateurs, puisqu'ils sont parties prenantes dans le jeu. |
Issa s'enfuit, poursuivi par les deux flics.
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En choisissant pour titre Les Misérables et en concluant par une citation de Victor Hugo : « Mes amis, retenez ceci : il n'y a ni mauvaises herbes, ni mauvais hommes, il n'y a que de mauvais cultivateurs », Ladj Ly, fils d'éboueur malien, laisse entendre que les policiers, les malfrats et les miséreux sont à mettre sur le même plan. Tous seraient les victimes de la misère. Tous identiques, tous misérables, chacun avec ses raisons, ils auraient tous le même droit d'exception. Cette thèse, si elle était vraiment celle du film, risquerait d'aplatir les écarts. Mais ce n'est pas tout à fait ça, car au final le lionceau (l'animal) revient vers le gitan, l'autre lionceau (Issa) organise la chorégraphie de l'escalier, tandis que les flics risquent fort de finir leur vie entre deux caddies. Le film ne se termine pas sur une symétrie, mais sur un déséquilibre de la terreur. Quand les puissants ne se neutralisent plus les uns les autres, une place s'ouvre pour les impuissants, les microbes qui envahissent le territoire. Plus personne ne peut arrêter le chaos, l'infection. Dans ce monde confiné, fermé sur lui-même, il n'y a pas d'altérité. Les flics sillonnent les mêmes rues que les gamins, ils font du surplace entre les barres d'immeubles, et finissent par s'enfermer eux-mêmes dans une cage d'escalier. Tous les personnages du film sont affectés par cette absence d'échappatoire, ce repli sur soi. Ladj Ly, né à Montfermeil où il vit toujours, ouvre une porte vers l'extérieur, une unique porte mais vaste et féconde : le cinéma lui-même. Son propre fils, Al Hassan Ly dit Buzz, incarne cette ouverture en bricolant un drone capable de surplomber la cité, de montrer sa géographie, de longer les fenêtres pour filmer les filles et de parcourir les rues pour surveiller les flics dans leurs œuvres. Buzz est celui qui voit à travers ses lunettes et le judas de sa porte, il est une figure du spectateur qui en voit plus que le policier supposé nous guider, Stéphane Ruiz. La différence entre les pouvoirs locaux et Issa, c'est que les premiers sont strictement calculables, tandis qu'Issa est incalculable, l'incalculable même. Les édiles sont parfaitement prévisibles : le flic surveille et sanctionne, le trafiquant trafique, le frère-muz contrôle et récupère. Mais que fait le jeune rebelle? On ne peut pas le prévoir. Il est à tout moment capable d'inventer ce que ni les flics ni les autres n'arriveront jamais à anticiper. Il incarne la dernière mutation du virus des banlieues, qu'aucun anticorps ne peut détecter à l'avance et qu'aucun traitement connu ne peut soigner. Issa, c'est le désespoir des autorités. Le film s'arrête au moment où il tient un cocktail Molotov à bout de bras, et nul ne sait ce qu'il va en faire. Il est capable de tous les extrêmes, la plus grande violence comme de la plus grande générosité. Ladj Ly explique que tous les éléments du film sont issus de ses souvenirs. Il a tout vécu, tout entendu, y compris les blagues des flics lors des gardes à vue. Mais pour articuler ces souvenirs, pour les transformer en fictions, il choisit un personnage principal qui, par sa personnalité, sa beauté, son style, dit autre chose que ce qui aurait pu être montré dans une collection de photos, un article de journal ou un documentaire. Ce choix de héros lunaire, presque irréel, qui n'apparait à l'écran que par intermittence, même si tout tourne autour de lui, est une limite à l'autobiographie. Issa est l'autre de Buzz, dont on ne peut raconter la vie que de l'extérieur (vu de haut ou de biais). Il oblige le réalisateur à une hétérobiographie qui l'éloigne de lui-même. |
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Création
: Guilgal |
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Idixa
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Films CinemaChrono 2019.LY.LYL CineSouverainHG.LKJ AlloBioCineCH.KJD CineVoyouFE.LKD IVocalArtefactOL.MOL CinemaDeconsLJ.LLO zm.Ly.2019 Rang = YLyMiserablesGenre = MH - NP |
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