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NIVEAUX DE SENS : | |||||||||||||||||
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CinéAnalyse : en laissant venir le parasite | CinéAnalyse : en laissant venir le parasite |
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Sources (*) : |
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L'écranophile en voix off | L'écranophile en voix off |
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Ozzy Gorgo - "L'écranophile", Ed : Guilgal, 1988-2019, Page créée le 30 mai 2019 - |
Parasite (Bong Joon-Ho, 2019) - Il n'y a pas de limite légitime au parasitage, pas de ligne qui ne puisse être franchie |
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Ce film qui se présente au premier abord comme une comédie sociale ne porte aucun jugement, il n'est porteur d'aucun message, ni politique, ni moral. Les pauvres n'ont pas de projet, ils se contentent de tirer le meilleur parti de ce qui leur arrive. Les riches se conduisent aussi correctement qu'ils le peuvent, selon les règles de leur monde, de leur univers, et les pauvres respectent aussi les règles de leur milieu, en faisant preuve d'une remarquable solidarité familiale. Les quatre pauvres (père, mère, fils, fille) semblent s'entendre parfaitement, sans conflit, tandis que les quatre riches (père, mère, fils, fille) sont isolés les uns des autres, sans communication. Dans l'ensemble la symétrie entre les familles est respectée. Elles se valent plus ou moins, sans transgression majeure des règles sociales, contrairement par exemple au film japonais Une affaire de famille (Hirokazu Kore-eda, 2018). Ce qui vaut pour les deux familles vaut aussi pour le couple arrivé en premier qui parasitait déjà la maison. Leur histoire est triste, ils n'ont rien fait de mal, ils se sont adaptés aux circonstances, la morale est sauve. Pourtant les choses se gâtent de manière inexplicable. Entre les parasites, c'est la guerre, ils finiront par s'entre-tuer. Entre les deux familles, la haine finira par éclater. Les pauvres sont mal à l'aise, ils se sentent coupables, mais ils sont incapables d'arrêter la logique sacrificielle. Moon-gwang se précipite pour venger la mort de sa femme, que personne n'a vraiment voulue, tandis que dans le reste de la maison, il n'y a pas eu la moindre préméditation. La haine nait d'une histoire d'odeur. Le riche accuse les pauvres de sentir mauvais, c'est la cause immédiate, passionnelle, de la vengeance. On ne peut pas empêcher les odeurs de venir, elles franchissent la ligne, elles viennent brouiller les distinctions légitimes. Qu'on lui reproche sa propre odeur est insupportable pour Kim. Park le déguise en indien, il lui fait sentir qu'il ne pourra jamais lui parler d'égal à égal. Avant la violence physique, il y a cette violence verbale, et après le meurtre, Gi-taek devra revenir vers le sous-sol, près des égoûts, refluer dans le lieu souterrain d'où il avait voulu se dégager. |
Cannes 2019. Palme d'or.
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A première vue, Parasite est un film social où les pauvres trompent et exploitent les riches, avant de perdre soudainement tout ce qu'ils avaient cru gagner. Mais ce schéma simpliste où l'ordre social finit par triompher est compliqué par le thème du parasitage. Comme l'annonce son titre, le film est irréductible à une fable sociale, il est (en outre, aussi) porteur de tout autre chose : une pensée du parasite. Je dis pensée du parasite, car il ne fait pas qu'illustrer le sens usuel de ce mot, il dit autre chose, il en dit plus. La pensée du film ne répond pas à une question ontologique [du genre : "Qu'est-ce qu'un parasite ?"], elle n'explique rien, elle est de l'ordre du performatif : "Qu'est-ce que ça fait, quand du parasitage s'ajoute au parasitage ?". La particularité du parasite, c'est qu'il y en a toujours plus d'un, il peut toujours en faire venir un autre : le fils, la fille, le père, la mère. Quand la famille pauvre a occupé toutes les places, on croit que c'est fini mais ce n'est pas tout : il y a, plus loin, une autre famille qui parasite encore plus et depuis plus longtemps. Et alors ça fait quoi, ce parasitage au carré, puis au carré du carré? Ça brouille les lignes. Au début, il n'y a qu'un franchissement par membre de la famille. La fille Park tombe amoureuse de Ki-woo, le chauffeur interroge son patron sur l'amour, Madame Park est manipulée par tout le monde. Mais peu à peu, le parasitage s'étend, on ne peut plus l'arrêter. C'est comme une odeur : on ne peut pas la confiner, elle se répand dans une voiture comme dans une maison. Dans le scénario du film, le brouillage fait aussi irruption par une force externe sous la forme d'une tempête qui va mettre fin au camping des patrons et détruire le logement précaire des domestiques. On ne maîtrise plus rien, tout semble déstabilisé, il n'y a plus ni convention, ni borne. C'est insupportable pour Monsieur Park qui le paiera très cher, par sa propre disparition. Dans la scène de la garden-party, le plus ancien parasite se venge du plus récent destiné à prendre sa place, lequel se venge à son tour du patron qui finira par être remplacé par le fils du second parasite. Vous suivez ? (il paraît qu'il ne fallait pas révéler l'intrigue). Sur ces trois chefs de famille, un seul survit, grâce à son fils qui s'enrichit et rachète la maison (nouveau retournement, nouveau parasitage). Il n'y a dans cette scène finale aucun salut, aucune rédemption, mais la conséquence ultime d'une faillite généralisée des systèmes immunitaires. Tout se passe comme si les anticorps ne fonctionnaient plus. Les personnages et les familles, incapables de se protéger de ce qui arrive de l'extérieur, ne peuvent pas non plus contrôler les forces qui viennent de l'intérieur. Du début à la fin, c'est la même inondation, le même déluge qui détruit le camping des riches, le logement des pauvres et aussi la limite entre les deux. Il semble qu'aucun plan, aucune organisation, aucun programme, ne puisse arrêter la transformation d'une maison d'architecte en lieu inhabitable. On voit mal en effet comment cette famille pauvre devenue riche pourrait vivre à l'endroit où leur fille, leur sœur, a été assassinée. Le problème du parasitage, c'est qu'il est inéliminable, il revient toujours.
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Création
: Guilgal |
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Idixa
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Films CineParasite GG.LEF CinemaChrono2019.BO.NGB zm.Bong.2019 Rang = ZYBongParasiteGenre = MH - NP |
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