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TABLE des MATIERES : |
NIVEAUX DE SENS : | |||||||||||||||||
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L'écranophile en voix off | L'écranophile en voix off |
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Sources (*) : |
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CinéAnalyse : en accueillant l'autre par le biais de l'oeuvre | CinéAnalyse : en accueillant l'autre par le biais de l'oeuvre |
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Ozzy Gorgo - "L'écranophile", Ed : Guilgal, 1988-2019, Page créée le 16 sept 2018 - |
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CinéAnalyse : impossibilité de l'art pur, souverain | Dans le film "Manifesto", de Julian Rosefeldt (2015), c'est l'art en personne qui déclare, à travers ses manifestes : "Sauf l'art, rien ne peut être sauvé" |
CinéAnalyse : impossibilité de l'art pur, souverain |
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CinéAnalyse : le pire, ce qui ne répond pas | CinéAnalyse : le pire, ce qui ne répond pas |
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CinéAnalyse : en déclarant l'exception souveraine | CinéAnalyse : en déclarant l'exception souveraine |
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CinéAnalyse: Un pas qui délie de toute dette | CinéAnalyse: Un pas qui délie de toute dette |
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Julian Rosefeldt a réuni au moins une douzaine de manifestes sur l'art : des futuristes aux dadaistes, de Fluxus aux situationnistes, de Dziga Vertov à Stan Brakhage, de Tristan Tzara à Sol LeWitt, de Ben Vautier à Jim Jarmusch, de John Reed à Valentine de Saint-Point, de Lucio Fontana à Tristan Tzara, Stan Brakhage ou Yvonne Rainer, de Malevitch à Lars von Trier (ou peut-être pas, ou d'autres encore, on ne les reconnaît pas). C'est Cate Blanchett qui les profère, ou plutôt treize Cate Blanchett à la douzaine, puisqu'elle incarne, chaque fois grimée différemment, changeant de ton comme d'accent, des personnages distincts dans des contextes distincts : la mère ouvrière, l'employée de laboratoire, le clochard, la maîtresse d'école, la chorégraphe, la speakerine, la fille punk droguée, la marionnettiste ou l'opératrice de marché. Etalés sur un siècle, les manifestes datent d'époques différentes. Ils défendent des points de vue différents sur des régions différentes de l'art, en des lieux différents. Mais par la bouche de Cate Blanchett, qui personnifie elle-même l'art, ils font valoir un point commun à tous ces manifestes : le statut d'exception. Il faut enterrer tout le reste, tout ce qui n'est pas l'art. Il faut faire son deuil du monde. C'est un deuil qui prend une forme agressive, vengeresse, colérique, mais aussi nostalgique et triste. Ce qui est terrible, c'est qu'il n'y a pas que le monde qui soit en ruine, il y a aussi l'art. Il faut aussi faire son deuil de l'art. Comment l'art peut-il faire son propre deuil? Par la déclaration. Lui seul peut déclarer, et s'il le peut, c'est parce qu'il ne parle au nom de personne d'autre que lui-même. Seul l'art peut produire ce genre de manifeste. Seul l'art est véritablement souverain dans ce monde. Il a lui seul le droit d'être aussi violent que le reste du monde. Il crache son mépris, son dégoût, il injurie cette société qui s'auto-détruit. Puisque tout est en ruine, tout est permis pour lui. Puisque le monde n'est qu'un déchet, un tas d'immondices, il peut surplomber ce tas. Même s'il tombe dans la fosse, il sera toujours et encore, à l'instant d'avant ou à l'instant d'après, dehors, dans la pureté de sa profération déclarative. |
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On dit très souvent NON dans ces manifestes. NON au vieux monde, au capitalisme, à l'espoir, au paradis, aux idoles, non à la sincérité, aux mythes, aux idées mystiques, au passé et à l'avenir, non à la mémoire et à la nostalgie, non aux politiciens, aux héros et aux anti-héros, à la religion, non à Dante, Shakespeare, Tolstoï ou Goethe, non au spectacle, à la virtuosité, non au dilettantisme, au professionnalisme, à l'intellectualisme, aux systèmes, aux finalités, à l'académisme, à la logique, à la raison et à la sagesse, non aux émotions, à l'amour et à l'esthétique, non aux formes, aux objets, à l'imitation, au style, à la rétrospection, non à la tradition, au modernisme, aux excentricités et aux lâchetés, non au kitsch, à la séduction, à l'artefact, à l'illusion et aussi aux musées, aux écrivains, aux musiciens ainsi qu'aux artistes eux-mêmes. De quoi cette négation est-elle la dénégation? Quelle est la poussée, le danger, la menace auxquels l'art doit absolument faire face? Que rejette-t-il en lui-même, puisqu'il est tout, il est la vie? Ce qui le menace n'est pas (ou pas seulement) en-dehors de lui, mais en lui. C'est en lui qu'il se saisira de la violence, la jeunesse et l'audace qui lui sont arrivés de l'extérieur. Pour sauver l'art, il ne faut pas seulement s'en prendre au monde, il faut aussi s'en prendre à lui, à l'art. Il sera sauvé par son auto-destruction, qui est la mise en abyme de l'auto-destruction du monde. C'est là, au lieu du pire, là où les valeurs s'annulent, que par la prière ou la déclamation, on peut sortir vers le haut. Le film est un appel à la transmutation. Il ramasse les scories de l'art et les déverse dans ses espaces clos, ses constructions chargées d'angoisse. Il ne propose rien à ses interlocuteurs qui d'ailleurs sont aussi mutiques que des spectateurs. Les rares fois où il se tourne vers le grand large, c'est pour montrer un espace vide, indifférent. Périodiquement, l'art nous regarde dans les yeux. Cate Blanchett s'adresse à nous, mais sans véritablement nous voir, comme si nous n'existions pas, comme si nous étions aussi anonymes que les danseuses, comme si toute cette histoire n'avait absolument rien à voir avec nous. L'art n'envisage jamais de nous sauver, il ne pense qu'à se sauver lui-même, et il ne nous demande pas non plus que nous le sauvions. Il est le sujet du film, il est le film. On peut comparer la formulation que je propose à propos du film, Sauf l'art, au titre que Jacques Derrida a retenu pour l'un de ses textes : Sauf le nom. On y retrouve le triple sens du mot sauf : un salut (au sens de saluer), une rédemption (au sens de sauver), une exception. On a déjà commenté les paradoxes de l'exception : d'un côté, il faut dire non à tout, sauf à l'art; mais d'un autre côté, on dit aussi non à l'art, sauf s'il se sauve lui-même. Le salut, c'est celui qui est fait à ces innombrables personnages cités, artistes, auteurs de manifestes. Ils nous saluent par leur texte, et nous les saluons. La rédemption, c'est qu'au fond tous ces textes sont chrétiens, ils ne savent ni ce qu'ils cherchent ni ce vers quoi ils tendent, et néanmoins ils posent la question du salut. Il n'y a pas de contradiction, car ils ne se situent pas sur le plan du savoir. |
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Création
: Guilgal |
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Idixa
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Films CinemaChrono 2015.RO.SEF ArchiOeuvreAutreCF.LKJ CineArtGE.LDF MalRadIncondHF.LKD CineSouverainSF.LKJ FilmsPasAudelaUD.LKF zm.Rosefeldt.2015 Rang = YZRosefeldManifestoGenre = MH - NP |
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